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Air du temps - Page 267

  • La douce gouvernance, c'est la Suisse

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    La gouvernance fait partie de ces mots valise qui déboulent soudain dans le vocabulaire quotidien sans crier gare. Mot valise parce que passée au XIVe siècle du français à l'anglais, la gouvernance revient aujourd'hui de l'anglais au français. Mot valise aussi parce qu'on le met à toutes les sauces.

     

    Ces jours, la Fondation pour Genève nous sert son Cahier no 1 intitulé "Soft Gouvenance", un pavé de cent pages farci de bonnes recettes pour dynamiser la Genève internationale. Micheline Calmy-Rey explique dans la préface que "l'histoire qui nous semblait, il y a encore 15 ans, un tant soit peu prévisible, tendue vers un point précis (lequel?), s'est complexifiée à un point tel que son tracé est devenu des plus imprévisible."

     

    Pour notre présidente, la "soft gouvernance" est cet ensemble de "dispositifs politiques, économiques, sociaux et culturels capable véritablement de faire de la mondialisation un processus réapproprié et non pas subi." Ouf, vous pouvez relire une deuxième fois. "L'image internationale de la Suisse, poursuit notre ministre des Affaires étrangères, est celle d'un Etat neutre et engagé, sans passé colonial, ni agenda caché, doté de l'estime et du prestige que lui valent à la fois sa longue expérience de la démocratie, du pluralisme et sa tradition humanitaire." Re-ouf! 

     

    Et Calmy-Rey de conclure: " La Suisse est en soi le prototype même d'une soft gouvernance."

     

    A noter que la soft gouvernance est dotée d'un soft power (pourquoi n'écrit-on pas doux pouvoir) sur lequel nous reviendrons tantôt. 

  • Robert du nerf "Think Swiss"

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    La petite Suisse se fait pêter les neurones cette semaine aux Etats-Unis où elle présente dans le cadre de l'opération "Think Swiss" ses meilleurs jus de cerveau au public américain. Notre chancelier Robert Hensler est tout fier d'annoncer ce 24 avril sur son site internet www.ge.ch qu'il était du voyage. Dans ses bagages la version gamma (ou beta22) de l'application genevoise de vote en ligne.

    Les élus, fonctionnaires et universitaires américains qui ont participé aux différents ateliers tenus dans l’enceinte de la résidence suisse à Washington ont pu se rendre compte que le vote électronique était parfaitement réalisable dans le respect de la transparence et du contrôle démocratique des scrutins

    Dame, Robert du nerf a sorti de sa manche deux arguments de poids:  1) c'est à Genève qu'a été développée la cryptographie permettant de blinder les échanges entre les PC des électeurs et le serveur. 2) Et les études de science politique montrent que les abstentionnistes réagissent positivement au vote électronique.

    Pas de chance. En France, les mairies qui ont mis en batterie des machines à voter dimanche s'en sont mordus les doigts. Certaines ont même décidé de remiser cette quincaillerie pour revenir au vote papier le 6 mai. En tout cas, les Français n'ont pas eu besoin de confier leur vote aux puces électroniques pour se déplacer en masse en ce dimanche estival.

    Question, Monsieur le chancelier, combien a coûté votre danseuse au budget de l'Etat, depuis bientôt huit ans que vous avez lancé le projet?

  • La fête de la laïcité. Opportune?

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    A l'occasion du 100e anniversaire de la séparation de l'Eglise et de l'Etat de Genève , le parti radical annonce une fête de la laïcité le 28 juin au restaurant du Parc des Bastions. "En présence de prestigieux invités", précise l'invitation.  Qui sont donc les prestigieux? Couchepin peut-être, Mgr Genoud, évêque de Genève, ou Hafid Ouardiri, reconverti dans la libre pensée après son licenciement de la Mosquée?

    Notez qu'on parle toujours de la séparation de l'Eglise (au singulier) et de l'Etat. A Genève on se demande donc de quelle église la République s'est séparée en 1907. Sûrement pas de l'église catholique romaine. En effet, celle-ci avait été "privatisée" plus de 30 ans plus tôt par le régime du radical Carteret. Un épisode peu glorieux de l'histoire de notre République.

    Rappelons les faits. En 1873, Rome fait mine de rétablir un évêque à Genève en nommant le Carougeois Mermillod vicaire épiscopale. L'affaire enflamme la Suisse et la précipite dans le Kulturkampf qui fait rage en Allemagne entre Bismark et le Zentrum (le parti des catholiques). Le Conseil fédéral expulsa Mgr Mermillod. A Genève, Carteret interdit aux catholiques l'accès à leurs lieux de culte, une manière de confiscation de leurs biens.

    Les catholiques romains vivaient donc la séparation de fait depuis plus de 30 ans, quand le peuple genevois vota le 15 juin 1907, du bout des lèvres - c'était la troisième tentative - la rupture des liens organiques et naturelles entre les institutions religieux et la République. Ironie du sort, c'est à la suite de cette votation que les paroisses catholiques recouvrèrent partiellement la propriété des biens confisqués, à condition qu'ils soient affectés au besoin du culte.

    La séparation libéra donc de la tutelle politique non pas l'Eglise romaine, mais l'Eglise de la Rome protestante (nommée alors nationale protestante) et l'Eglise catholique chrétienne, forgée de toute pièce par le Conseil d'Etat, dans laquelle le pouvoir politique radical voulait enrégimenter tous les catholiques du canton restés fidèles à Rome.

    Les défenseurs de la liberté de conscience n'étaient alors pas dans le camp que l'on croit. On vit plusieurs maires (ils étaient alors nommés par le Conseil d'Etat) destitués pour avoir refusé d'obtempérer aux ordres iniques du gouvernement. Privés de leurs églises, les catholiques se réunirent dans des granges puis construisirent des chapelles privées (dites de la persécution), dont il reste un témoignage à Collex (photo) . Il fallut attendre la mort du controversé chef radical, le 28 décembre 1889, pour que la paix confessionnelle revienne à Genève.

    Un mot encore. La séparation genevoise de 1907 ne fut pas la victoire des anticléricaux contre les papistes comme ce fut le cas en France deux ans plus tôt. Mais le souhait, au contraire, des protestants libéraux, auxquels se sont associés les catholiques romains. On vit même des anticléricaux voter contre la séparation afin de maintenir une tutelle politique sur les Eglises et un droit de regard notamment sur la nomination des prêtres et des pasteurs. La question divisa alors tous les partis politiques.

    Faut-il en fêter la séparation cent ans plus tard?

    Je préfère la proposition des Fac de droit, de lettres et de théologie de l'université qui invite à réfléchir à "Un siècle de séparation des Eglises (aux pluriels) et de l'Etat" les 8 et 9 juin prochain.