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Tristounette, anachronique, méritante? Comment qualifier la présence genevoise ce week-end à Saignelégier? Tâche délicate, la courtoisie commande de ne pas froisser les quelque quatre cents personnes méritantes qui ont défilé en habit de laine sur les 900 mètres du champ de course du fameux marché concours. Heureusement pour eux et pour nous assis sur l'herbe humide, le ciel fut clément. Même que des bancs de nuages ont joué les parasols bienvenus. Un coup de chapeau donc aux musiciens de la Landwehr, aux poilus des Vieux Grenadiers, aux peuples et seigneurs de la 1602, aux Dames paysannes, aux élus de tout crin (pas tous candidats cet automne) au syndicat chevalin genevois et autres hôtes et servants obligés, partis de bon matin en car, certains à peine remis d'une nuit assourdissante, feux d'artifices ou Rolling Stones obligent. La courtoisie s'illustre aussi dans les gazettes qui de la Tribune de Genève au Quotidien jurassien titrent leur reportage avec une bienveillance tout factuelle.
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Mais pour le reste, la Genève du XXIe siècle a montré un visage bien tristounet et totalement anachronique. Certes la Fête du Marché concours garde une heureuse allure de kermesse campagnarde. Les chevaux montés à cru, les courses de chars romains ou de voitures à quatre roues gentiment enguirlandées sont dignes d'un arrêt sur image des siècles passés. Les coureurs y croient, chutent parfois durement et galopent pour l'honneur. Le speaker commente avec enthousiasme les courses, citent les noms de tous les concurrents et des chevaux avec ce rien d'accent jurassien qui chante un véritable amour des Franches-Montagnes.
Mais Genève. Que chante notre canton? La ritournelle approximative des Vieux au pas lent, la musique militaire rendue presque inaudible par le contraste d'une sono hyper-présente, les fifres et tambours décimés par les vacances et le silence du cortège de la 1602, la Neptune en modèle réduit juchée sur un char à peine digne d'une vogue de village. Résultat: des applaudissements polis sans plus pour ce défilé officiel de la part d'une foule d'habitués et de curieux, venus surtout admirer les étalons et les juments franc-montagnards et leurs poulains.
Quant aux deux stands genevois, il faisait plutôt peine à voir. Les dégustations de lentilles (36 lentilles vinaigrées dans un godet en plastique non recyclable), de cardon épineux argenté de Plainpalais AOC (13 mini lamelles excellentes au demeurant) et de longeole froide (9 grammes au bout d'un bâtonnet) étaient franchement désertées, le bon peuple joufflu préférant manifestement les débits de bière, cantines, pintes et autres marchands de saucisses alentours. Aucune animation, pas un film, pas un son sur le stand du bout du lac, tout juste quelques brochures pour promouvoir une agriculture genevoise, certes dynamiques, mais qui ne participe plus que pour moins de 1% à la richesse cantonale.
Genève est peut-être la capitale du Jura (il y a plus de Jurassiens dans notre canton qu'à Delémont), mais les Genevois ont raté l'occasion d'innover. Pas un mot, par exemple, dans le billet du président Beer ni dans le discours du conseiller d'Etat Unger sur le projet en cours de l'horloger genevois Frank Muller d'établir au Bois, à quelques kilomètres de Saignelégier, une fabrique et des logements. C'est pourtant de ce genre de coopération dont le Jura a besoin. Quant à Genève, il a urgemment besoin de revoir ses ambassadeurs!
Dernier clin d'oeil du Jura libre