Jean Romain m'envoie par courriel sa dernière chronique publiée dans le Nouvelliste du 2 novembre. En résumé, "l'esprit des blogs", c'est son titre, ne s'encombre pas de l'esprit des lois, c'est son propos. [cliquer sur l'image pour obtenir une version lisible]
Dans son ouvrage publié à Genève en 1748, le philosophe français Montesquieu prône la bien connue séparation des trois pouvoirs (exécutif, législatif et judiciaire) comme fondement d'un régime politique soucieux de garantir la liberté des citoyens. Pratiquement né avec la démocratie moderne, le quatrième pouvoir, celui de la presse, avec ses défauts et ses qualités, est la mouche du coche qui peut et doit, en toute indépendance, dénoncer les dérives des institutions politiques.
Qu'en est-il des blogs? Jean Romain les installe comme une ébauche de cinquième pouvoir, un pouvoir diffus, incontrôlé, où le pire - la rumeur, la manipulation - côtoie le meilleur: "La déontologie journalistique étant absente, ils sont aussi bien des poubelles que
des écrins", écrit-il. Mais un pouvoir tout de même, dont les plumes les plus sagaces se sont mises à leur tour, se réjouit Jean Romain, et immédiatement à dénoncer les dérives de la mouche du coche. C'est tout bénéfice pour la démocratie.
Et notre philosophe local de s'amuser que des grands quotidiens locaux "couvent en leur sein une flottille de blogs qui se mettent sous la protection du navire amiral. Est-ce pour donner plus d’opportunité à ce cinquième pouvoir ou pour mieux canaliser l’esprit des blogs?" demande-t-il...
Comme en écho à cette chronique valaisanne, Le Monde de cette fin de semaine revient sur le verdit de la justice française qui a blanchi, lundi dernier 29 octobre, la Fondation Wikipedia - propriétaire de l'encyclopédie collaborative Wikipedia - des accusations d'atteinte à la vie privée et de diffamation portées par trois particuliers, dont les préférences sexuelles avaient été rendues publiques au détour d'un article.
Une première importante victoire juridique pour Wikipedia, note le quotidien français. Qui, dans l'éditorial, dénonce toutefois cette issue - "la législation actuelle laisse la porte ouverte à ce genre d'abus" - et réclame des mesures urgentes des politiques. De fait la netétiquette n'a pas plus d'effet sur les "corbeaux" que la politesse sur les impolis. Il faut donc un vrai code des routes virtuelles. De quoi préserver les braves gens des rumeurs malveillantes et fausses que la toile peut colporter à la vitesse de la lumière.
Dans l'article "Wikipedia, ni coupable ni responsable", Le Monde cite Lionel Thoumyre, directeur de la revue en ligne spécialisée Juriscom.net: " Le juge a estimé que, puisque la fondation n'exerce aucun contrôle sur le contenu des articles, elle n'a pas à supporter une responsabilité de type éditorial." Selon la loi française sur la confiance dans l'économique du 21 juin 2004, un hébergeur n'est pas tenu de surveiller a priori tous les contenus qu'il accueille", explique le patron de Juriscom.
Dont acte. Mais faut-il pour autant, comme le réclame le grand quotidien français, une législation ad hoc qui police spécifiquement les blogs et les internautes? Le remède risque d'être pire que le mal et donnera des arguments aux pays non démocratiques qui ne se privent pas déjà de gouverner l'espace des droits de l'homme.
Il faut donc comme pour la presse tolérer les dérives et compter sur le contrôle social pour maintenir le château de cartes en équilibre. Tous les internautes savent qu'ils peuvent informer le gérant d'un site (le webmestre) de l'existence d'un contenu illicite ou litigieux. A lui de réagir avec diligence et en opportunité.
C'est ce que nous faisons, comme animateur de la flottille des blogs de la Tribune de Genève. En ayant posé deux garde-fous:
- nous invitons nos blogueurs et les internautes qui laissent des commentaires à s'inspirer de la Charte des devoirs et des droits des journalistes suisses et
- nous nous réservons le droit de supprimer les articles discourtois, hors sujets ou non signés.