"Mais im Bundeshuus" du cinéaste Jean-Stéphane Bron a fait connaître aux Suisses la manière de faire la politique, l'action des lobbies, la faiblesse des partis qui enrobent leur posture du vernis des valeurs et n'ont aucun pouvoir d'imposer leur ligne à leurs élus. L'indépendance des parlementaires par rapport à leur parti est même consacrée par la Constitution, alors que leur dépendance par rapport aux lobbies n'est que déclarée publiquement mais nullement interdite.
Tant que les lobbies - multinationales, branches économiques, corporations, syndicats - avaient des activités pas trop prédatrices pour les ressources et des hommes ou pas trop dangereuses pour la santé et l'environnement ou pas trop concurrentes du pouvoir politique, la démocratie pouvait s'en accommoder et les intérêts de GM pouvaient être confondus avec les intérêts des Etats-Unis pour paraphraser Wilson l'ancien patron du premier constructeur automobile devenu ministre de la défense.
En Suisse, Daniel Vasella, patron de Novartis, n'est pas ministre de la santé, mais ses choix d'installer ses laboratoires en Suisse, de l'autre côté de la frontière ou aux Etats-Unis ont évidemment un impact sur le cours de la chose publique. Et les patrons des assurances et leurs affidés sont nombreux dans les travées du Parlement fédéral.
C'est cela entre autres qui explique l'érosion continue depuis des lustres des partis de l'Entente nationale. Une érosion qui, à Genève, a atteint un niveau si grand que les radicaux ont préféré, en se jetant dans les bras du grand frère libéral, la mort lente à la mort subite. Choix que n'a pas (encore) fait le PDC. Conséquence, il est mot de mort subite à Vernier. En ville de Genève, le parti de Darbelley doit sans doute une fière chandelle ou vibrionnant Michel Chevrolet. Pour combien de temps?
On est jamais meilleur que dans l'adversité. Les radicaux l'ont démontré et ont donné le change, un temps, avec le duo Longchamp Maudet. Pierre Maudet, même s'il caracole en tête de l'élection du Conseil municipal, sait parfaitement qu'il doit son siège à la Mairie que parce que la gauche lui concède un strapontin.
Les règles de l'élection du Municipal ne sont pas les mêmes que celles qui président à l'élection de la Mairie. Dans le premier cas, c'est un match de football que l'on gagne à onze, douze ou treize si l'on compte le public, l'entraîneur et les financiers. Dans le second cas, c'est un marathon que l'on gagne seul (évidemment aussi grâce au public, à son parti et sa capacité de nouer des alliances et aux financiers)
Cette fois encore le jeune radical, qui a des ambitions cantonales, nationales, européennes et même onusiennes, sera réélu. La gauche en effet a appris de l'expérience calamiteuse du gouvernement monocolore de droite qu'elle n'a pas intérêt à truster les cinq fauteuils du gouvernement municipal. Elle a donc renvoyé Boris Drahusak à sa fonction de fonctionnaire. Extraordinaire! Le Vert va se retrouver aux avant-postes de la ville dans une fonction directoriale, alors qu'il a été désavoué par le peuple. Si les Verts avaient une once d'honneur, ils lui trouveraient un job dans une autre entreprise.
Pierre Maudet doit-il s'allier avec le MCG? La réponse est évidemment oui.
Le héron radical avait essayé un pas de deux avec le bel Antonio Hodgers. A eux deux, ils allaient redynamiser le centre, marier le fer du XIXe siècle et le Vert du XXIe. Le projet n'a duré qu'un printemps. Les radicaux sont un parti de droite, d'entrepreneurs et de commerçants (accessoirement de fonctionnaires), Pierre Maudet le sait et doit assumer son rôle de leader du camp de la droite.
Le Mouvement citoyens genevois rassemblent les râleurs. Et alors! N'était-ce pas le cas du fondateur du Parti radical lors de la révolution de 1847? Eric Stauffer n'a pas de programme. Et alors! Qui lit les programmes des partis? La politique, c'est une dynamique. La politique c'est l'art de saisir l'esprit du temps, de rassembler le mouvement populaire et de construire avec lui une société juste, solidaire, durable et prospère. En abandonnnt si possible aucun humain que la terre porte sur le chemin.
Commentaires
Je ne crois pas, Jean-François. La réponse est non. La mienne en tout cas. Ou alors il faudrait que le MCG change de responsables, de ligne politique, bref de tout... Le MCG n'est pas le parti des râleurs, car alors il serait le parti de tous les genevois, ce qui n'est pas le cas. Le MCG, au niveau de ses élus, est un conglomérat de gens en révolte, mais dont les sujets de révoltes, pour le moins variés, sont très contradictoires.
Qu'y a-t-il de commun entre une avocate libérale de Champel passée au MCG par détestation du CEVA et les gros bataillons populaires d'origine immigrée d'Onex ou Vernier ? La détestation des frontaliers. Ce qui ne fait pas une politique, sauf à sombrer dans une xénophobie absurde et heureusement honnie de la plus grande partie de la population.
Le MCG peut faire illusion quelques temps en apprenant aux gens à rédiger leur CV. Ce qui sert effectivement à ce qu'un dossier d'embauche ne soit pas classé verticalement (direction la poubelle) à la première lecture. Mais c'est un peu maigre, car si tout va bien, après, il y a l'entretien d'embauche. Où ça risque de se gâter. Entretemps, le MCG se sera constitué une clientèle de chômeurs, exactement comme le PS et l'extrême-gauche l'ont fait avec les locataires, par l'intermédiaire de l'ASLOCA. Sauf que les locataires sont 15 fois plus nombreux à Genève que les chômeurs, et ils le restent à plus long terme. La gauche a donc encore de beaux jours devant elle. Le MCG, c'est moins sûr.
Du coup, le MCG s'est mis en tête de résoudre la crise du logement par un grand ensemble de plus, à l'image de ce qui s'est fait dans les années 60 à Meyrin, Vernier, Onex, là précisément où le MCG récolte le plus de voix. La ficelle est un peu grosse.
Si le MCG y fait un tabac, c'est pour des raisons inverses de celle de l'avocate qui veut avant tout préserver son confort bourgeois de Champel (sans même se rendre compte qu'un RER va plutôt l'améliorer). Les gens qui votent MCG à Vernier ou Meyrin le font parce qu'ils ont de gros problèmes au quotidien, que la vie est chère, les enfants turbulents, le paysage de ces grands ensembles un peu glauque, la circulation infernale, bref qu'ils souffrent de vivre dans un ... grand ensemble à cause de leurs moyens modestes. Donc le MCG propose de construire un ghetto supplémentaire, où davantage de gens modestes seront malheureux ensemble... et voteront pour lui.
D'autant que, surtout lorsqu'on est dans la mouise, il est réconfortant de pouvoir se croire supérieur à quelqu'un, qui serait le mal absolu (dans le cas présent les frontaliers) et c'est la came que vend le MCG. En face, les frontaliers réagissent parfois avec le même type de comportement imbécile à l'égard des "suisses". Ce qui n'avance personne mais entretient le schmilblick.
Tout cela ne fait cependant pas plus une majorité qu'un socle solide. Embrumé par ses fantasmes maurassiens, Pascal Décaillet nous projette sa vision de l'intelligence politique, mais il a semble-t-il oublié d'apprendre à compter.
Il faut reconquérir les électeurs du MCG, c'est certain. Ne pas les laisser aux mains de gens comme Stauffer, Rappaz, Pardo ou même Poggia, qui ne l'oublions pas s'était présenté en Italie sous les couleurs de Berlusconi. Pour y parvenir, il faut inventer des solutions nouvelles, qui permettent aux gens de se loger dans des endroits agréables à l'échelle humaine, pour un prix correct. Qui permettent d'employer des jeunes sans formation, ou de donner une fonction sociale à des quinquagénaires peu enclins à se remettre en question.
Bref il faut s'atteler à améliorer les conditions de vie de tous, dans notre petit coin de planète. Ce qui implique entre autres une collaboration renforcée avec les autorités françaises qui nous entourent, qui font bien davantage partie de la solution que du problème. Tout le contraire de ce que représente le MCG. Sans compter que s'il s'allie au mouvement des chômeurs genevois, Maudet perd ses appuis à gauche.
Reste qu'un conseil administratif ainsi dominé par la gauche ne correspond ni au résultat des urnes, ni à l'intérêt public, car il faut du renouvellement dans la gestion des affaires publiques et que 24 ans, c'est assez. L'alliance un peu indigeste de Kraft-Babel et de l'UDC, dans ce sens, est la plus porteuse d'espoir. Elle devrait profiter à la libérale... Si elle ne lui coûte pas trop de voix potentielles à gauche. Au moins Bertinat a-t-il saisi l'importance de notre arrière pays du Genevois français. Vouloir carrément l'annexer n'est pas très malin et encore moins diplomatique, mais c'est au moins une déclaration d'amour. Et c'est bien moins un déni de la réalité que l'attitude haineuse du MCG.
A moins que finalement, pour contrer l'alliance libérale-UDC la gauche ne file un coup de main discret à Chevrolet, dont le parti a clairement dit non à une telle alliance. Bref, il va y avoir du sport, jusqu'à ce futur dimanche soir...
Tu penses vraiment, Philippe, que des gens dans l'Alternative filerait un coup de main à Chevrolet ? Inquiétant, très inquiétant.
cordialement
Ok. Tout s'explique ! Si même le modérateur des blogs de la Tribune roule pour le MCG... Ils sont trop forts ces populistes.... a force de jeter de la poudre aux yeux, ils fascinent tout le monde..ou presque...
"Extraordinaire! Le Vert va se retrouver aux avant-postes de la ville dans une fonction directoriale, alors qu'il a été désavoué par le peuple."
Extraordinaire de haine de la gauche (au sens large) ce commentaire de jfm qui se dévoile ici en partisan et en fervent soutien de l'extrême droite. Depuis quand les emplois au sein d'une administration dépendent-ils d'un vote populaire? Les candidats enseignants ou policiers qui se présenteraient à une élection et qui ne seraient pas élus devraient démissionner? Un appel à une sorte de maccarthysme est de retour sous la plume de jfm!
Merci d'avoir tombé le masque.
Je comprends mieux certaines affinités.