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Fins de vies: parlons-en!

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darbellay matin dimanche euthanasie.jpg«De l'euthanasie pure et simple!» c'est la réaction de Philippe Barraud aux propos de Christophe Darbellay dans le Matin Dimanche sur le coût de la fin de vie. Le publiciste cite le président du PDC suisse dans son blog Commentaires: «Certains pays comme la Scandinavie disposent de critères médicaux et éthiques pour prendre ce genre de décisions.»

«La Scandinavie n’est pas un pays, commence par répondre Philippe Barraud. Mais, poursuit le publiciste, certains pays du Nord, y compris la Grande-Bretagne, appliquent des critères économiques et statistiques littéralement meurtriers pour les personnes de plus de 75 ans, puisque les soins, dialyses et autres opérations leur sont par principe refusés, à moins qu’ils ne puissent les payer. C’est de l’euthanasie pure et simple...» Vraiment?

Sur un ton tout aussi définitif, Alain Hubler écrit sur son blog:  «Si chacun a le droit de se poser la question de la souffrance, de la vie à tout prix, de la fin, de la vie et de la mort du point de vue éthique, cela me paraît parfaitement scandaleux de se la poser dans une optique économique. En effet, s’il y a bien un domaine où il est difficile d’abuser – la théorie des « abus » est tellement à la mode – c’est dans mort.»

Et la naissance, ajouterais-je, cher blogueur, le début de la vie, frappé des mêmes inconnus du fait des progrès incessants de la médecine? Fin et début n'ont pas fini de poser des questions éthiques et économiques qui s'ajoutent à celles toujours irrésolues des fins et des origines de la vie...

Il y a cinq ans ma mère est décédée d'un cancer. Diagnostiquée tardivement, la maladie l'a emportée en quatre mois. Dès le début, le cancérologue ne nous a pas caché que le pronostic de survie n'était pas important. Elle s'est battue puis a renoncé. Elle avait 73 ans. Je me souviens encore de son joli visage esquissant un sourire d'éternité.

Il y a dix ans mon père qui devenait aveugle a choisi la voie d'Exit. Il avait 73 ans. Il nous parlait de la mort depuis 20 ans. Son geste singulier remue encore les consciences parmi ses parents et ses proches. Pas un mois sans qu'on ne m'en parle.

J'ai entamé la lecture du livre de Jacques Donzel et de son fils Olivier. Le mercenaire, qui sort de presse ces jours, raconte la mort sur l'échafaud à Vidy, le samedi 24 avril 1723, du major Davel et ses tribulations de mercenaire, où il avait pêché, notamment en Hollande, les idées de liberté et d'autodétermination, que Leurs Excellences de Berne et leurs affidés vaudois ne pouvaient tolérer. Je retiens de ce texte fort intéressant cette citation de Sénèque: "L'essentiel n'est pas de vivre longtemps, mais de vivre pleinement."

Je ne sais pas comment je mourrai. Personne ne le sait. Mais je sais que nous n'échapperons pas au débat politique sur la fin et le début de la vie. On peut certes discuter des manières de le porter sur la place publique. Mais on débattra, on s'écharpera pour savoir où placer le curseur qui marque le point où le droit à la vie et  le droit à la mort s'opposent à l'acharnement ou à l'expérimentation thérapeutique. Il est évidemment différent pour chacun d'entre nous. Mais il nous concerne tous collectivement, dès que nous supportons tous les coûts de cette médecine de l'extrême.

La vie à tout prix n'est ni un droit fondamental ni une attitude philosophiquement ou éthiquement défendable. A ce sujet, on lira avec attention le billet qu'a publié hier le pasteur Daniel Neeser sur son blog http://dneeser.blog.tdg.ch

Commentaires

  • Ce qui me semble dommage, c'est que le débat sur les soins en fin de vie ne devienne envisageable que pour des raisons économiques.

    En effet, nombreux sont ceux qui ont tentés de l'ouvrir mais les politiques se sont empressés de le refermer par peur sans doute de déplaire à leurs électeurs.

    Si on commençait par écouter les malades, et respecter ceux qui souhaitent soit ne plus recevoir de soins soit mourir?

  • "Si on commençait par écouter les malades, et respecter ceux qui souhaitent soit ne plus recevoir de soins soit mourir?"
    Voilà, c'est exactement cela. Inma Abbet dans un autre blog a trouvé l'adresse des directives anticipées du CHUV. Il faut en parler autour de soi, diffuser l'idée qu'on peut échapper à l'omnipotence des mandarins médicaux. les éternels angélistes qui nient le problème sont encore une fois plus malhonnêtes que naïfs. Tout le monde a entendu parler de la lutte de ces parents italiens contre cette secte extrémiste qu'on appelle église catholique pour pouvoir débrancher leur fille après 30 ans de coma...

  • Manquait ceci :
    http://www.chuv.ch/spn/spnvd-directives_anticipees.pdf

  • Je l'ai déjà écrit il y a plusieurs mois, mais il me plaît de le répéter, tellement l'exemple et édifiant. Lorsqu'il y a une dizaine d'années, le Territoire du Nord australien a accepté une loi qui permettait l'assistance à la mort dans certains cas extrêmes, les partis au pouvoir au Parlement fédéral de Canberra, inspirés et soutenus avec force par diverses autorités ecclésiastiques ont mené une bataille sans précédent pour faire abolir la loi en question et l'ont emporté, malgré les appels déchirants et rendus publics d'une patiente qui souffrait véritablement l'enfer depuis des années. Puis quelque temps plus tard, la même coalition de faux-culs, dont la majorité n'aura jamais de peine à trouver un médecin compatissant pour abréger leurs souffrances si besoin était, ont voté massivement contre une demande de budget qui devait permettre de développer les soins palliatifs donnés aux patients sans chance de guérison et en proie à une souffrance insupportable.

  • Vous posez, comme toujours, les bonnes questions, Jean-François! La médecine est chose humaine, donc faillible. De même qu'un malade condamné peut brusquement prendre le chemin de la guérison, un autre assuré de guérir peut décéder de manière inexplicable. Alors si l'économie s'en mêle… Que les sornettes du fanfaron Darbellay sortent de la bouche d'un démocrate-chrétien est assez inquiétant! Où est le respect de la vie? Où, la liberté du malade? Et où la liberté du médecin?

  • Jean-Paul II, dans l'encyclique 65 (Evangelium vitae) résume bien quelle est la position de l'Eglise, dont ne s'éloigne pas tellement M. Darbellay :

    « Il faut distinguer de l’euthanasie la décision de renoncer à ce qu’on appelle l’acharnement thérapeutique, c’est-à-dire à certaines interventions médicales qui ne conviennent plus à la situation réelle du malade, parce qu’elles sont désormais disproportionnées par rapport aux résultats que l’on pourrait espérer ou encore parce qu’elles sont trop lourdes pour lui et pour sa famille. Dans ces situations, lorsque la mort s’annonce imminente et inévitable, on peut en conscience "renoncer à des traitements qui ne procureraient qu’un sursis précaire et pénible de la vie, sans interrompre pourtant les soins dus au malade en pareil cas" »

  • Bonjour à tous,

    Votre débat est inévitablement prioritaire et contemporain. Je me dois de réagir car je suis infirmier. J'ai travaillé au quartier opératoire ,en soins intensifs pendant 4 ans et demi, en maison de repos, à domicile et maintenant en hémodialyse.J'ai été aussi malade. Atteint d'un mélanome , le pronostic sévère ne dépassait pas l'année. Cinq ans ont passé et je suis replongé dans la vie. J'écoute la souffrance des personnes qui se confient, je l'atténue par des soins et des traitements. Cette confrontation à la douleur, à la tristesse et au deuil d'une existence révolue à travers les patients dont je fais partie me permets d'avoir un avis qui n'a rien de scientifique ni religieux mais philantropique et donc politique.
    Je me suis battu pour que soit respecté mes convictions vitales: la qualité de vie passait avant tout ! Pas question de chirurgies ou traitements expérimentaux ou inutiles. C'était mon choix. Cela a été possible par ma volonté, par le fait que j'étais conscient de vivre dans une démocratie. Souvent dans mon métier, j'ai rencontré des personnes qui souffraient de façon insupportable même avec des traitement conséquents. L'élan que j'ai vers mon semblable, mon écoute active, mes échecs, mes réussites humaines me conduisent à considérer l'existence comme une possibilité illimétée de pouvoir partager, donner, reçevoir et aimer. Les soins infirmiers constituent un métier. Les notions de naissance et de mort en passant par le bonheur et la souffrance constituent des réalités dont nous tenons compte. Que ce soit dans les soins curatifs, les soins palliatifs ou même une désescallade thérapeutique , l'important est de prendre conscience que le malade a une histoire, son histoire. Une famille, des amis... et qu'avant de partir ou même pendant, il est nécessaire de l'entourer avec le plus de professionalisme ( les infirmiers) et d'amour ( la famille). Sans tout cela , la mort nous semblera toujours comme un acte agressif et donc déplorable.
    De plus ce débat de l'euthanasie ou des soins palliatifs s'applique uniquement dans les pays riches. Ailleurs,en Amérique du Sud, en Afrique, à Madagascar, en Asie , les mort est un passage naturel avant lequel l'instant présent prévaut sur le passé et l'avenir. Seul ce moment de souffrance est considéré avec toute sa valeur physique , psychologique et transcendental.

    Donc pour en finir, la politique a tout à faire là. Il y a trop de personnes souffrantes en fin de vie ou non qui nécessitent d'être entourées .la justice a le devoir de créer une loi pour lutter contre l'isolement et l'abandon qu'inflige notre société aux malades et personnes agées.Les écoles se doivent de sensibiliser les élèves à propos de l'acte de solidarité. La sécurité sociale n'est pas due , elle se conçoit, s'élabore, s'applique et s'évalue. Sans cela, nous obtenons ce que nous vivons actuellement: un déficit que nous avons creusé.

    Le soins que nous apportons est individuel et donc différent de par l'histoire qu'a construit le malade en fonction de ses désirs.

    N'oublions pas Fèdre: " vivons si vers le vie on peut me ramener".

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