Les 80 lus ont finalement digéré les 740 thèses que ses cinq commissions thématiques avaient concoctées dans le secret de leurs délibérations. Ils ont voté des thèses à la pelle sans toujours bien en mesurer la portée. Ils se sont déchirés sur quelques vieux principes. Ils sont complètement pasés à côté du XXIe siècle, de la démocratie et de la gouvernance participative en ligne, du "soft power" cher à Xavier Comtesse, du Grand-Genève qui se construit davantage grâce à Schengen que grâce au projet d'agglo franco-valdo-genevois. Ils ont échoué à réformer la gouvernance des trois pouvoirs et la réorganisation des communes. Ils se sont beaucoup battus pour conserver des acquis.
Ils sont devenus les spécialistes des thèses de majorité, de minorité, des amendements, des sous-amendements, des motions d'ordre et du règlement. Ils ont reçu des dizaines de propositions individuelles et associatives, souvent généreuses, toujours orientées. Ils ont beaucoup consulté dans le secret des commissions, n'ont migré sous d'autres cieux - ceux du CICG - que forcés et contraints.
Avant même la mise à l'eau, les vents contraires ont secoué la galère. Des écueils de toutes sortes ont surgi. La mer des sarcasmes est une mer amère. C'est miracle que l'embarcation n'ait pas coulé. Bien des marins n'ont eu de cesse de saper le navire, jusqu'au sein même de l'équipage. Quant aux capitaines, ils n'ont pas manqué de mérite. Mais le mérite n'était sans doute pas suffisant. L'assemblée a manqué de souffle, elle a manqué de tribuns, au centre de l'échiquier politique notamment, capables de contrecarrer les forts en gueule des deux ailes.
On les a entendu plus que de raison les Pardo, Grobet, Mouhanna, de Dardel, Ducommun, tous des dark Vador pour reprendre les surnoms que quelques constituants se sont donnés au plus chaud des débats.
Au centre justement, les forces nouvelles, peu nombreuses et surtout présentes chez les Verts, ont tardé à s'affirmer. Heureusement leur influence croît. La plus brillante préside la commission de rédaction. Le radical Murat Julian Alder va passer ses vacances de Noël à rédiger le rapport de la commission et l'avant-projet attendu pour la mi-janvier. Sont en phase ascendante Olivier Perroux, Florian Irminger, Jérôme Savary chez les Verts, Boris Calame et Yves lador pour les Associations, Cyril Mizrahi chez les socialistes. Tandis que son collègue Baranzini et les jeunes libéraux Halpérin et Roy sont encore en deçà des attentes.
Parmi les sages, le socialiste Thierry Tanquerel se détache sans conteste. Quelques autres jouent les conciliateurs, Maurice Gardiol, Laurent Extermann, David Lachat, Albert Rodrik chez les socialistes, Antoine Maurice, trop peu actif, chez les radicaux, Michel Hottelier, Simone de Montmollin chez les libéraux, Marco Föllmi, Raymond Loretan au PDC, Marie-Thérèse Engelberts au MCG, Alfred Manuel des Associations de Genève, Benoît Genecand sur la liste patronale GE-Avance, Jean-François Rochat à l'AVIVO, Pierre Scherb, Pierre Schifferli à l'UDC...
A lire à l'heure du bilan l'article du Temps ce matin Le consensus, tabou ultime de la Constituante genevoise
Le show est fini! 2011 sera l'année de la consultation, des concessions, des arrangements, des conciliations. Objectif faire une Constitution acceptable par les Genevois en 2012. Les élections municipales au printemps et les nationales en automne effaceront la Constituante de la scène médiatique.
Après six mois de sessions plénières tendues, difficiles, houleuses, voire chaotiques, politiciennes et quelquefois populistes, la Constituante est entrée hier soir en hibernation. Sur un ultime échec retendissant: la réforme des communes. Les districts ont bien été adoptés le 21 septembre, mais hier soir les élus ne sont pas parvenus à leur donner des organes politiques.
Petit bilan au seuil de l'Avent, temps de renouvellement et de renaissance.