Je n'étais jamais allé à Ronchamp. De loin l'église à l'air d'une barque qui fend des flots blancs. Le sanctuaire est courroné d'arbres qui ont grandi depuis sa construction sur les ruines d'une église bombardée durant la deuxième guerre. C'est un lieu de pèlerinage ancien. Il faut le rebâtir et le projeter, en ce début des années 50, prometteuses d'Europe unie, dans un XXe siècle en quête de paix sinon de pain après deux guerres et des dizaines de millions de morts et autant de gens meurtris et déplacés, entre deux nations chrétiennes, phares toutes deux de la civilisation occidentale, mais aussi d'empire du soleil levant contre un empire émergent.
Une association naît et requiert un phare de l'homme nouveau grand prêtre de la matière moderne: le béton.
Le béton vieillit mal. De tout près, l'œuvre de Le Corbusier fait peine à voir. Le vaisseau garde son élan, mais la matière s'effrite. La lèpre de la carbonatation érode la toiture, de longues fissures creusent les murs extérieurs, le crépi grossier s'est couvert de pollution et mouchette la peinture blanche.