Je me souviens, enfant, avoir assisté à la messe, chaque dimanche à 10 heures, et aux Vêpres, à 15 heures, dans ma paroisse de Compesières. Les chanteuses étaient installées dans la nef. Le choeur des hommes était perché sur la galerie, blotti contre le grand orgue. Son souffle puissant transformait en épopées lyriques et fantastiques les histoires du Tohu Bohu, d'Adam et d'Ève, du Déluge, des Dix Commandement, de Samson, de la Passion et de la Résurrection. L'islam était alors un mot inconnu.
Point de femmes dans le chœur de l'église. Les grands mères portaient un chapeau, un foulard ou une mantille. Les grands-pères enlevaient leur couvre-chef. Le curé tout de noir habillé sondait régulièrement les âmes des fidèles dans une boîte grillagée. Il officiait à l'autel, surchargé de fleurs et de cierges et parfois enveloppé d'un brouillard odorant, l'encens. Le mystère était présent comme le Christ dans l'hostie. Une fois l'an, il bénissait les maisons et les moissons. Point de filles parmi notre cohorte d'enfants de chœur, qui servions la messe en latin, à 7h30, juste avant l'école...

Le comptable du camp d'Auschwitz ressurgit dans l'actualité assombrie par les crimes de Daech, les noyés de la Méditerranée et bien d'autres injustices qui ne percent pas la croûte des médias. Il n'était pas comptable mais supervisait le tri des malheureux déportés à l'entrée du camp de la mort. Il avait raconté sa vie de fonctionnaire endoctriné en 2005 au Spiegel. Il est jugé pour complicité de meurtre de 300'000 juifs hongrois déportés en 1944, un petit tiers des personnes éliminées à Auschwitz. Il ne nie pas les faits. Il a demandé pardon. Il dit qu'il n'était alors qu'un petit rouage de ce qui était alors perçu comme une méthode de guerre avancée. Un jour, il a assisté au meurtre d'un bébé fracassé par un soldat sur la porte d'un wagon. Ça l'a écœuré. Aurais-je dû tirer sur ce soldat, demande-t-il à ses juges allemands?...