Affaire Cerutti, affaire Ramadan, criminalité de rue, expulsion des étrangers, prison surpeuplée, mendiants, squatteurs et excès de vitesse, il a fallu attendre les dix dernières minutes et les questions du public pour effleurer hier soir le dossier de la BCGe et évoquer par la bande la révolution de la procédure pénale qui va bouleverser la vie du Palais de Justice d'ici 2010, date de l'entrée en vigueur du nouveau code de procédure pénale. (A ce propos François Paychère a publié un billet intéressant)
A assemblée populaire, débat populaire? Tout entier orienté sur la justice pénale de proximité - mais le procureur général n'est il pas l'accusateur, le défenseur de l'ordre public? - le débat de la Tribune a tourné, sur ce terrain mineur, à l'avantage du magistrat radical sortant. L'applaudimètre a passé dans le rouge à deux reprises en sa faveur. (lire aussi ici)
Un entartrage raté, mais spectaculaire, réalisé à la grande joie des squatteurs, a valu à un Daniel Zappelli en bras de chemise, que l'événement avait comme ragaillardi, un retour de star sur l'estrade de l'aula principale d'Uni Dufour quasi pleine. Plus tard, sur le dossier de la BCGe, le procureur déclenche une nouvelle salve d'applaudissements au terme d'une plaidoirie pro domo: "Que savez-vous ne ma connaissance du dossier", lance le radical à son adversaire. "Le dossier sera renvoyé cette année devant le juge" affirme-t-il, insensible à la durée exceptionnelle, que certain juge même scandaleuse, de l'instruction.
Son challenger socialiste n'oppose que des arguments techniques. Pas assez pugnace, François Paychère! Le président du Tribunal administratif n'a manifestement pas l'habitude de plaider. Il s'est contenté de quelques escarmouches, fines et polies. Insuffisant pour manifester clairement sa différence à un public varié et peu au fait des arcanes de la Justice. On sent que n'importe quel ténor du barreau n'aurait fait qu'une bouchée du gentil Zappelli.
Rien donc sur l'impuissance des Justices locales coincées dans leurs frontières cantonales et nationales. Rien sur l'avantage de la défense qui dispose de multiples voies de recours, dont les plus riches peuvent abuser quasi impunément. C'est à peine si l'on a évoqué la nécessité d'un "FBI" national, alors qu'il faudrait une police judiciaire européenne pour traquer un tant soi peu efficacement les réseaux criminels qui livrent la drogue et les prostituées dans nos rues et recyclent l'argent de ces commerces infâmes. Rien non plus sur la criminalité économique qui échappe de plus en plus à la justice publique et que l'on traite, entre soi, dans les bureaux de juges arbitres privés et autrement mieux payés que nos magistrats.
D'où, finalement, cette question. A quoi sert un procureur général? A exécuter des lois qu'il ne fait pas? A diriger l'orchestre du Palais de Justice? Même pas. Le procureur n'est le chef que du Parquet. Un orchestre de chambre donc. Certes le PG est aussi responsable administrativement du Palais de Justice et préside la Commission de gestion du pouvoir judiciaire, mais il ne fut nullement question de cettte responsabilité hier soir.
On en vient à se demander à quoi riment le scrutin du 20 avril et ces duels électoraux réglés comme du papier à musique entre deux hommes qui au fond semblent valser de concert. Tandis que les juges et leur surveillant général à tous, le Conseil supérieur de la magistrature, seront mis en place le 1er juin par le jeu opaque des arrangements entre les partis.