Pauvres politiques. Plus encore en ces temps de pandémie où la mort rôde, qu'en temps ordinaire - mais le temps n'est pas ordinaire, puisque le réchauffement climatique nous promet une mort infernale - on réclame des surhommes (pardon des surhumains) : dictateurs éclairés mais néanmoins démocrates et à l'écoute, pères de la nations, solides et généreux, mères de la patrie, pragmatiques et consolatrices? Sommes-nous donc tous des enfants, des oisillons, des victimes?
Je lis dans le Temps du 31 janvier le compte rendu du face-à-face Fischer-Maudet. Pour l'avoir pratiqué, je sais combien l'exercice est périlleux et frustrant. D'autant qu'il ne s'agit pas d'élire un dictateur le 7 mars, mais un membre d'un gouvernement, qui est lui-même soumis au contrôle d'un parlement de milice, à l'arsenal touffu des lois en vigueur et à des administrations en place mais pas toujours aux ordres (et non soumises à réélection) pour faire avancer la galère genevoise dans une bonne direction.
Premier point. Pierre Maudet s'est disqualifié lui-même. On peut gloser sur la gravité de sa faute. Elle ne justifiait et ne justifie sans doute ni la prison ni le bannissement. Cependant, ce gamin mal élevé a cru pouvoir prendre toute la République de haut et lui mentir éhontément. L'imagine-t-on revenir au Conseil d'Etat, auréolé de l'onction populaire, alors que son comportement et ses mensonges ont rompu la confiance sans laquelle aucun collège ne peut correctement fonctionner?
Tous ceux qui le soutiennent font du mal au Canton et à ses institutions.
Mais revenons à ce débat. Chaque protagoniste joue son jeu. A commencer par les journalistes elles-mêmes piégées par la situation. Même si Pierre Maudet est indigne et culotté de se représenter, il faut bien lui tendre le micro. Et même si l'Etat de Genève n'a aucun pouvoir sur le covid et l'approvisionnement en vaccins, il faut coller à l'actualité comme si l'issue du scrutin du 7 mars dépendait de cette question: "La campagne de vaccination prend du retard, des centres ferment faute de doses. Inquiétant?" Le Temps ne s'attendait sans doute pas à se que la candidate verte tombe dans le piège de la sincérité en affichant un scepticisme en matière de médecine et de vaccin, très en vogue dans son milieu. Il lui a fallu dare dare démentir la méchante rumeur. Un point pour Maudet qui sait l'importance du message clair et univoque et que la République n'a que faire de ses humeurs personnelles.
Cinq questions sur la pandémie, c'est trop et ça laisse accroire que les ministres cantonaux détiennent un quelconque pouvoir à ce sujet et sur la frontière en particulier (partagez-vous l'avis du conseiller national vert de Carouge qui veut fermer les frontières suisses en l'absence de test systématiques?). Bref, le Temps perd son temps et le nôtre et jette le discrédit sur des candidats qui ne peuvent évidemment pas refuser de répondre et alignent donc des poncifs déjà entendus.
Le débat tangue. Les deux journalistes recourent à la ficelle usée mais qui marche toujours: "Concrètement, comment on fait?" La candidate verte est toujours la première à répondre (grave erreur): 1) revenu universel, 2) crise climatique: "En matière d’urbanisme, plaçons-nous un instant en 2050 ou 2080: avec le réchauffement de quoi aurons-nous besoin en termes de logement, d’arborisation, de mobilité?" Trop facile pour Maudet qu'on sent rire sous cap: "J’entends une récitation d’un catéchisme écologique; vous parlez de la fin du monde, je parle de la fin du mois."
Bref, la seule question à la portée d'un gouvernement genevois (Swissport, qui ne peut pas payer ses employés à ne rien faire, contrairement aux travailleurs sous statut public de l'aéroport payés eux à 100%), on sent frémir une différence idéologique.
Dommage, il y avait plein d'autres questions à poser au futur magistrat dont on ne sait pas s'il dirigera la police, la santé, l'emploi et l'économie et deviendra s'il est réélu en 2023 président du Conseil d'Etat.
Comment rétablir l'équilibre des finances publiques et en combien de temps?
Comment stabiliser la dette genevoise? (il ne suffira pas comme le prétend Fischer d'aller pêcher des milliards à la BNS)
Comment accélérer et généraliser l'usage des TIC dans l'enseignement?
Comment introduire un système d'échange, genre Erasmus, dans l'enseignement secondaire
Comment relancer le Grand Genève?
Comment répondre aux défis de la cybercriminalité?
Et tant qu'à faire, j'aurais bien aimé connaître l'avis de Maudet de Fischer sur les sujets soumis au vote le 7 mars: la burka et la sécurité de notre identité électronique.
...
La Tribune et le club suisse de la presse propose un débat entre tous mais sans Maudet mardi 9 a 18h.
Ajouté le 6 février. J’ai visionné avec grand intérêt l’entretien de Pascal Décaillet avec le prof Panteleimon Giannakopoulos, chef redoute jusqu’en 2014 du Service de spécialité psychiatrie et directeur medical de Curabilis depuis 2015 et qui signe la préface de Quarantaine, le livre que Pierre Maudet a publié Cabedita - un grand moment de télévision et un rappel utile: nous avons tous des démons en nous et parfois ils nous rattrapent. On peut télécharger la préface de Giannakopoulos sur le site de l'éditeur.
Commentaires
"la candidate verte tombe dans le piège de la sincérité en affichant un scepticisme en matière de médecine et de vaccin"
Ce sera donc NON pour elle. Et qu'on impose un stage en réanimation aux HUG pour tous les candidats.
P.S. En tant qu'observateur en non comme patient ...
Bonjour, je vous ai envoyé ce mail :
Cher Monsieur,
Vous m'avez demandé de rectifier un intitulé de mon avant-dernier billet qui vous paraissait insultant. J'ai obtempéré, et vous m'en avez remercié.
Or, depuis hier, mon dernier billet n'a plus sa visibilité dans la plateforme
Blogs TdG - Tribune de Genève
Seul peut-il être lu dans la plateforme
Les blogs
Merci de bien vouloir le rendre à nouveau visible, comme avant, dans "Blogs TdG - Tribune de Genève"
Merci d'avance.
David Frenkel