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C'est difficile de faire la fête de Genève

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Étrange ambiance, samedi soir, à la sortie du feu d'artifice du désormais Geneva Lake Festival. Une fois la dernière fusée éclatée dans un tonnerre de crépitements assourdissants, le jet d'eau s'est effondré. Il avait majestueusement ponctué le dernier quart d'heure des tirs bien rythmés et plutôt poétiques du Français Berthonneau. Il n'a pas réapparu laissant la rade dans une nuit d'urgence, celle des feux bleus des vedettes de la police.

La foule a poliment applaudi. Sans manifester ni effusion ni émotion ni fraternisation. Genève est une cité hors sol, davantage encore en plein été. Le monde s'y cotoie sans s'embrasser. Elle s'est calmement fondu dans les rues. Le quai du Mont-Blanc était bondé, mais il n'y avait rien à y faire. Aucun bal populaire.

De la rue, les club-house barrent la vue du lac, où il ne se passe plus rien. La navette lacustre gratuite (dont l'accès relève du parcours du combattant) joue les abonnés absents. Dix minutes, vingt? On décide dans une semi-pénombre de rallier la rive gauche par le pont des Bergues. Le pont du Mont-Blanc annoncé interdit à la circulation laisse néanmoins circuler des colonnes de piétons sur un tiers de sa largeur. On s'y engage. On progresse entre le double parapet métallique qui sépare les autos des piétons et les barrières qui ont enclos les spectateurs payants. 

Étrange ambiance.

La promenade du lac est sordide, jonchée de détritus (comme le quai du Mont-Blanc d'ailleurs, partout les poubelles dégueulent). Le monument national, l'horloge fleurie, le jardin anglais sont plongés dans la nuit. Des ombres semblent s'y promener ou se reposer sur le gazon éteint.

Tandis que le staff des fêtes plient les chaises, on déambule devant des stands sans attraits que des cerbères barrent aux visiteurs qui ne déclarent pas vouloir consommer. On finit pas s'asseoir. Après deux ou trois rappels on nous apporte deux petites flûtes de champagne servies dans des verres en plastique et une bière (servie sans verre). Pour 37 francs. 

On n'ira pas plus loin. Au bout du quai, les manèges des forains gesticulent sans bruit. On dirait des miniatures esseulées. Où est la grande roue?

La promenade du lac plonge sous le pont du Mont-Blanc. Peur sur la ville. Bonjour les toiles d'araignée! Le coeur de la ville prend des airs d'une morne banlieue. Le chemin de pavés inégaux longe Le Lacustre, hideux bunker de béton. Il faut remonter sur le quai Général-Guisan, dont les boutiques, comme celles des autres rues commerçantes, n'arborent aucun décoration particulière, car les Terrasses de Genève se sont barricadées derrière de grande bâches blanches que surveillent des videurs musclés.

Pas une lumière supplémentaire, pas un projecteur ne viennent animer les lieux. La place du Rhône est vide. Le Molard paraît en vacances. L'île Rousseau découpe ses arbres noirs sur une ville fantôme. Les aménagements végétaux du pont des Bergues sont à peine visibles. Et c'est ainsi jusqu'au pont de l'île. Aucun grand hôtel n'a mis en valeur son immeuble.

Il fait 20 degrés, la nuit est douce. La ville est triste. Un jeune aviné a la gueule ouverte. 

Sur l'autoroute, les panneaux d'information routière ont affiché durant les dix jours des fêtes: "Genève centre ville entravé!"

Commentaires

  • J'y suis allé ce week end. Mais j'ai préféré ne pas aller voir les feux. Ces fêtes et leurs kilomètres de barrières m'ont un peu déprimés. J'ai l'impression que ces fêtes concernent surtout les touristes.

    Rive droite pour les riches clients des palaces et rive gauche pour les autres....

  • Cher Jean-François,
    Que faire alors ?
    Orientons l an prochain les Fêtes de Genève vers son histoire, la vieille ville, à l image des Clefs de St Pierre. Avec un fil conducteur didactique "L histoire de Genève" pour rappeler les moments fast et moins drôles tant aux résidents qu au étrangers.
    Avec le grand feu tiré depuis la rade, les forains sur la plaine de Plainpalsis,
    Les Festivités sur les quais sont devenus obsolètes.
    Réfléchissons ensemble et avec d aucuns, Patrick Dimier, p.ex., à un concept très genevois.
    Une chose est certaine, dès Nyon, on oublie l'esprit calviniste !
    Amitiés et bonne journée emplie que de dièses.

  • Monsieur Mabut, votre billet désabusé m'apparait comme la caricature du Genevois las et blasé.
    Je boudais les feux depuis quelques années. Marre de revoir ce remake d'un show qui ne se renouvelle pas.
    Mais voilà, une copine m'a demandé de l'accompagner.
    Je n'ai pas regretté. Le spectacle m'a cette fois envouté.
    D'abord grâce à la musique qui, contrairement aux autres années avec raffut et emphase ne venant que s'ajouter au spectacle pyrotechnique, accompagnait avec finesse et discrétion le spectacle. Le programmateur a eu l'intelligence de synchroniser le son sur le départ des fusées puisqu'il est impossible de prévoir précisément le moment où elles explosent.
    Idéalement placé sur la terrasse du Kempinsky, j'ai pu cette fois voir ce qui se passait au raz de l'eau. La Neptune déguisée en bateau pirate et surtout les danseurs acrobates qui se transformaient en fanions sur les mats m'ont littéralement envoutés. Comme un enfant, je suis parti dans un rêve visuel, mes pensées se sont arrêtées.
    Les flammes sur la jetée, synchronisées avec une embarcation mobile, donnaient du rythme et de la vigueur avec la chaleur du feu naturel.
    Les bateaux lanceurs effectuaient eux aussi une chorégraphie bien réglée qui contrastait bien avec les plateformes statiques des années précédentes.
    Et quelle excellente idée d'allumer le jet d'eau avant la fin. Ce monument s'est vu accompagner et transformer par les fumées et les couleurs. Quelle intelligence d'utiliser le patrimoine en l'intégrant dans le spectacle !
    Bref, que du bonheur, de l'intelligence, de la créativité.
    Je partagerai peut-être la critique de M. Driesberg sur ces murs privatisés que constituaient les zones réservées aux VIP des cinq étoiles et les difficultés d'accès à des zones qui offraient une bonne visibilité. Mais pour le reste, je dis bravo aux organisateurs et à Genève tourisme car la mission n'était pas évidente et le résultat est bluffant.
    Allez Monsieur Mabut, gardez l'élan de vos vacances en Sicile et restez positif ! Il y a assez de Genevois pour râler sans en ajouter d'autres, et surtout pas ceux qui sont aussi visibles que vous.

  • excellent article qui reflète bien cette non ambiance, pas un mot plus haut que l'autre, mais du visuel, du ressenti, mais surtout de la déception. Genève fête son luxe, mais rien pour le genevois ordinaire que l'on ne respecte pas. Sans parler de tous les simples touristes, suisses ou étrangers, venus vraiment faire la fête, mais il n'y avait rien pour la fête.

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