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Zappelli, huitième conseiller d'Etat?

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464131606.jpg Fut un temps où le huitième conseiller d'Etat demeurait au Journal de Genève. Notre consoeur François Buffat, aujourd'hui romancière, connaissait le banc et l'arrière banc de la République. Elle savait fourrer son nez partout. A la même époque, cette fonction occulte lui était disputée tantôt par les Barde, patrons des syndicats patronaux, tantôt par les chanceliers d'Etat, seul fonctionnaire à avoir rang de magistrat, dont certains furent plus politiques que les autres. Désormais c'est le procureur de la République qui a officiellement été intronisé hier 8e conseiller d'Etat.

 

Le chef du ministère public a parachevé, dans un "discours de Saint-Pierre" prononcé à la première personne du singulier, l'accaparament de son emprise sur la police entamé par le socialiste Bernard Bertossa. Les Genevois se sont-ils rendus compte que depuis trois ans bientôt le Département de Justice et police a disparu au profit d'un département des Institutions. Ont-ils mesuré les conséquences du fait que depuis quelques années le budget du Palais de Justice est défendu au Grand Conseil par le procureur général et non plus par Laurent Moutinot, ministre de tutelle désormais sans portefeuille.

Cette dérive n'en est en fait pas une, du point de vue historique tout au moins. Il suffit pour s'en convaincre de lire le feuillet publié sur le site internet de l'Etat de Genève par Gérard Bagnoud, archiviste du Pouvoir judiciaire pour en comprendre l'origine. Le procureur général est la plus ancienne magistrature du canton encore en fonction. Elle remonte à 1534.

Est-il sain en ce XXIe siècle débutant que le premier magistrat du Pouvoir judiciaire s'arroge des pouvoirs d'ordre public? Assurément non. Il y a manifestement confusion. Et l'on attend du Grand Conseil sinon de la Constituante de remettre de l'ordre dans nos institutions. On peut discuter de l'opportunité de rattacher la police judiciaire au ministère public, mais il n'est pas acceptable que celui-ci instruise Madame la cheffe de la Police et lui commande séance tenante un rapport sur la sécurité dans les quartiers.

Au-delà de la redéfinition claire des attributions des pouvoirs exécutif et judiciaire, le discours de Zappelli manifeste une autre dérive. Celle du vedettariat qui s'attache désormais au chef du Palais de justice. Dans un précédent billet du 15 avril, j'avais proposé que la Constituante crée un collège de procureurs, disposition de bonne gouvernance plus conforme au génie suisse. 

L'évolution de la criminalité exigerait aussi que le procureur déborde les frontières cantonales, voire nationales, qui entravent aujourd'hui son action. L'existence de procureurs intercantonaux, voire internationaux sorte d'ambassadeurs de justice pourrait offrir une piste.

Enfin, et ce n'est pas la moindre des réserves, si le procureur devait devenir effectivement le ministre de l'ordre public, il conviendrait de préciser à qui et comment il rend des comptes. La même obligation de rendre des comptes concerne également le corps des juges sur lequel le procureur général n'a d'ailleurs qu'un vague pouvoir adminsitratif. Le rapport annuel du Palais de justice ne saurait suffire à contrôler leurs actions. 

Commentaires

  • Bonjour !
    "Entre formalisme et pragmatisme, choisis ton camp, camarade !"
    Il est hors de doute que notre Police avait besoin d'un "Patron" respecté. Elle l'a avec M. Zappelli.
    A la Constituante, en effet, de redéfinir les règles du jeu, mais il devenait intenable d'avoir un tel vide à la tête de la Police. Avec les résultats que l'on sait...

  • "Effectivement, il manque à la fonction de Procureur général la liberté de faire appel à la Police sans devoir en passer par le Conseil d'Etat. C'est seulement à ce moment-là qu'adviendra une vraie séparation des pouvoirs (en l'occurrence, politique et juridique, dans la tradition de l'esprit des Lumières Montesquieu)."

    Ecrit par : Micheline Pace | 22.04.2008 in La Constituante

    Oui, le Procureur général doit pouvoir faire appel au corps de police sans "courtisanerie". Il est de fait le 8e Conseiller d'Etat; il manque d'être reconnu comme tel de jure!!!
    (Surtout avec les Mous qui se succèdent à la tête de ce département qui n'en est pas un.)

  • Zapelli à la tête de la police ? Je vois que certains n'ont pas tout compris à la structure qui compose notre république.

  • Cher Monsieur, je suis étonné que vous en oubliez le véritable 8ème conseiller d'état, le chancelier.

    Robert Hensler, Chancelier d'Etat.

    Nommé par le Conseil d'Etat le 6 décembre 1993. Renommé les 8 décembre 1997,
    3 décembre 2001 et 5 décembre 2005.

  • Dès lors que Zappelli conduirait lui-même la police, il serait effectivement devenu un "Conseiller d'Etat", bien avant Hensler qui ne gère qu'un modeste service administratif. La situation décrite par J.-F. Mabut mérite effectivement réflexion, car il faut voir ici une volonté manifeste de la droite de court-circuiter la gauche en charge du Dép. des Institutions. J'y vois un point positif: on pourra enfin juger Zappelli sur un bilan concret, celui-là même qui empoisonne la vie des genevois, à savoir la délinquance de rue. Et bien évidemment il ne pourra que se casser la gueule, dans la mesure où des conditions essentielles n'auront pas été remplies au préalable: notamment une police réorganisée en profondeur, une Justice rapide et efficace, des lieux d'incarcération dignes des Droits Humains et en nombre suffisants et des accords de réadmission. Aussi, nous attendons l'appui à Zappelli du camps bourgeois au Grand-Conseil. Sans illusion, d'ailleurs....

  • Merci pour votre article, je l'ai analize de tous les cotes, et vous savez je partage completement votre opinion sur ce sujet. Oui c'est une question rhétorique que le premier magistrat du Pouvoir judiciaire s'arroge des pouvoirs d'ordre public.

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