En 1970, deux événements majeurs retenaient l'attention des élus et de toute la population de Bardonnex: la présentation de la nouvelle salle communale et le 700e anniversaire de la donation de l'église à l'ordre hospitalier des chevaliers de Malte par l'évêque de Genève en 1270, première mention de Compesières dans un document officiel.
L'alors future salle communale, attendue depuis longtemps, était présentée dans le seul journal communal - Bardonnex Information* - par Jacques Delétraz, maire.
Ce soir, 13 octobre 2020, le Conseil municipal de Bardonnex doit discuter d'un projet de délibération qui pourrait avoir pour conséquence la démolition totale ou partielle de la salle communale. Toute une histoire.
Le site de la commune https://bardonnex.ch est en train de faire peau neuve. Espérons que ce changement de look augure d'un enrichissement prochain. Pour l'heure, il n'offre guère d'éléments sur l'histoire récente de notre commune ni sur les tribulations qu'a dû subir le site de Compesières. Je n'ai pas été capable non plus ce jour de retrouver les PV du Conseil municipal. Et je m'interroge, pour la petite histoire, sur un site qui a certes une antenne à Carouge, mais dont un des webmasters est, semble-t-il, domicilié dans les îles Cocos en Australie?
Le premier document que je livre est ce fameux numéros de Bardonnex Information, no 14 de novembre 1970 (à télécharger ici).
Il présente en première page l'image de la future salle communale telle que l'imaginait l'architecte Virginio Malnati (cliquer sur l'image qui ouvre cette note pour l'agrandir) et en page 2 l'article de Jacques Delétraz. Malheureusement, la commission des monuments et des sites, qui était déjà abusivement toute puissante, imposa un dessin plus paysan - ce sont ses mots - à un bâtiment qui devait se fondre dans la nature. La nouvelle salle communale fut inaugurée en 1977 en grande pompe. Toute la population s'était habillée en costume 1900 (C'est là l'origine de la moustache de rigueur à l'époque, que je porte encore comme quelques autres communiers)
Pour la petite histoire, la salle communale fut érigée à l'emplacement d'une chapelle, dressée là à la fin du XIXe siècle par les catholiques restés fidèles à Rome de Bardonnex et de Plan-les-Ouates (la paroisse de Plan-les-Ouates n'a été créé qu'au milieu du XXe siècle). En ces temps troublés, la République dominée alors par des radicaux anticléricaux entendaient rogner les ailes ou plutôt les clefs de Saint-Pierre (de Rome, la Saint-Pierre de Genève avait été confisqué en 1536 par les réformés). Il reste de ce temps quelques souvenirs dont le chemin de la baïonnette, en référence à un baptême d'un nouveau-né carougeois, que son père voulait voir officier en l'église de Compesières par un curé qui avait prêté serment à la République. Les maires d'alors de Bardonnex et de Plan-les-Ouates qui étaient nommés par le Conseil d'Etat refusèrent de donner les clés de l'église (la loi de séparation devenue loi sur la laïcité récemment ne sera votée qu'en 1907). Ils furent destitués et il fallut faire monter les gendarmes en force pour que la loi de la République s’applique enfin. Par la suite, l'église de Compesières fut interdite au culte romain ce qui incita les paysans du cru à bâtir la fameuse chapelle sur une parcelle donnée par la famille du cardinal Mermillod. (photo tirée de la Mémoire de Bardonnex sur Facebook)
Si la salle communale a été érigée sur la parcelle Mermillod, c'est que, dans les années 70, la ferme de Compesières était encore en pleine activité et que son propriétaire, âgé et sans descendance directe, refusait de la vendre à la commune. L'achat survint cinq ans après l'inauguration de la salle communale. Pour 2,2 millions, la commune acquit la ferme, ses dépendances et les terrains agricoles qui s'étendent du chemin des Rempart à la route de Saconnex-d'Arve. Un des adjoints d'alors a rappelé récemment qu'il avait contribué à faire baisser la facture de 400'000 francs.
Le deuxième document est le résultat du concours d'architectes réalisé en 1997(à télécharger ici).
Il prévoyait de construire une nouvelle école à l'emplacement de la ferme de Compesières. Le premier prix, une architecture intégrative comprenant des grands toits et même un donjon firent hurler les architectes qui se prétendaient dépositaires de Le Corbusier et consorts. Ils trouvèrent la faille pour mener à bien leur opération de destruction. La commune confiante dans la promesse du canton de classer Compesières en zone ad hoc était allée de l'avant jusqu'à la demande d'autorisation de démolition de la ferme. Le Tribunal fédéral mit son aula comme je l'ai déjà expliqué dans une note récente.
Le architectes ne s'opposaient pas à ce qu'une nouvelle école soit construite à Compesières. Ils s'opposaient un premier prix et à son architectes François Bouvier et ne seraient sans doute pas intervenus si une forme cubique en béton et verre, signature du présent siècle, avait été choisie par le jury.
Pour des raisons qui me restent obscures, la commune a renoncé à construire une nouvelle école sur le site de Compesières. Son projet est de la bâtir sur la parcelle Mermillod, dont elle est devenue pleinement propriétaire en octobre 2019. Le problème, qui semble avoir échappé à la présente mairie, c'est que le programme du concours d'idées réalisé cette année ne demandait clairement pas aux architectes de conserver la salle communale également salle de gymnastique. Et dont que la plupart des concurrents, y compris le vainqueur, proposent de démolir le bâti existant. Ce qui veut dire, que la commune sera privée de salle communale pendant plusieurs années.
Pour le maire sortant, Alain Walder, qui a présidé le jury du concours d'idées, rien de scandaleux à ça. Son idée, qu'il avait présentée à la population en 2016 ou 2017 (de mémoire) était de réaliser simultanément l'école et la transformation de la ferme de Compressives, où possiblement pourrait être créée la nouvelle salle communale de Bardonnex.
Or la Mairie actuelle semble avoir renvoyé à plus tard l'épineuse question de la ferme.
Je ne doute pas que toutes ces questions trouveront une réponse dans le rapport de la commission des bâtiments qui se verra confier la tâche d'étudier le projet de délibérations présentés ce soir.
Parfois, je me dis qu'on devrait peut-être tout remettre à plat. On ne demandera pas aux élus PDC de se désavouer. Mais on peut espérer que Bardonnex Alternative et le PLR commencent à poser les bonnes questions. Ensemble ils ont la majorité.
* Le rédacteur en chef du journal Bardonnex Information, Jules Mabut, député indépendant chrétien social, leader paysan, devait succéder à l'inspecteur d'école, de 1975 à 1987, comme maire PDC et Entente.