Your Name. My name is..., la ritournelle tourne dans la tête de tous les apprentis guides. Sans doute le métier le plus à la portée des jeunes de Khajuraho qui veulent échapper au sort de leur parents. La mère de Rocky, de son vrai prénom Ganesh - les gens de la caste des travailleurs manuels ne portent generalement pas de nom de famille - travaille comme porteuse de gravier, de sable, de brique de béton sur les chantiers routiers. Son père est jardinier quand le travail se présente. Tout juste de quoi nourrir une famille de cinq enfants. Il dit payer son école à Chatachpur en faisant le guide.
À 17 ans, Rocky n'est qu'en septième année. Il a perdu deux ans parce qu'un de ses frères a attrapé la malaria. Mais son grand père lui a ranconté l'histoire de la cité aux 80 temples, connus dans le monde entier pour quelque douze hauts reliefs inspirés du kamasutra (l'américain iPad ignore ce mot et substitue la soutra ou lama ultra...) Pas de quoi battre sa femme! Les déhanchés sensuels des nymphes reproduites par centaines est bien plus gracieux et suggestifs que les acrobaties qui violent les tabous.
Un commentaire lu dans le Times of India me suggère une troisième piste: les temples de Khajuraho seraient un hymne aux prostituees de luxe, des courtisanes, des geishas indiennes, expertes dans l'art de dynamiser les mecs face au temps qui engloutis leurs énergies... Un autre article signale que des fournisseurs d'accès internet ont saisi un tribunal pour savoir si les photos prises par les touristes et postées sur le net tombaient sous le coup de la pornographie. On sait combien Facebook, soumis au puritanisme américain, est sourcilleux à la vue du moindre sein.
Et qui sont ces hommes à la manœuvre? Des amants, des prêtres, des seigneurs vainqueurs qui exploitent leur droit de cuissage? Les touristes mitraillent les statuettes pétrifiées que les guides designent en faisant jouer le soleil dans des miroirs qu'ils tiennent au creux de leur main.