Déplacer les pions municipaux et redessiner les géographies communales et cantonales sont des exercices aussi périlleux dans l'Hexagone qu'en Suisse. Les 20 propositions que l'ancien premier ministre Balladur a remises hier au président Sarkozy pour réformer les étages inférieurs du millefeuille institutionnel français suscitent quelques émotions chez nos voisins. Pourtant l'essentiel de la réforme avait été dévoilée par Le Figaro le 12 janvier dernier. J'avais à ce propos publié un billet intitulé Napoléon a créé les communes, Balladur les réformera-t-il?
A pas de Sioux, Balladur propose rien moins que de fondre les communes dans des intercommunalités et des métropoles et les départements dans une quinzaine de régions de 4 à 6 millions d'habitants. Trop ambitieux pour réussir?
Dans la liste des agglomérations et des métropoles, le rapport ne cite pas Genève. Pourtant avec ses quelque 700'000 habitants, notre agglomération flirte avec celle de Bordeau et se hisse au cinquième rang des régions urbaines les plus peuplées de France, derrière Paris, hors catégorie, Lyon, Lille et Marseille.
La frontière empêche, il est vrai, Genève d'être citée. Encore que le projet d'agglo FVG rappelle que depuis 2005, la candidature franco-valdo-genevoise a été retenue parmi 15 lauréats, dont 8 projets transfrontaliers, dans le cadre de l'appel à coopération « pour un rayonnement européen et international des métropoles françaises ».
Le rapport Balladur risque comme bien d'autres d'être "schubladiser". Il contient nénamoins quelques propositions qui pourraient inspirer les constituants au moment où ils aborderont la réforme des communes genevoises et la gouvernance future du Grand Genève.
Commentaires
Il ne sera jamais trop tard pour réhabiliter les options prises par Napoléon III en 1860 qui, pour une fois, avait vu moins faux que d'habitude (http://www.cernex.fr/Cernex/1-Notre_commune/D-Cernex_son_histoire/19eme_siecle/1800-1826/1816/1816_Zone_Franche.htm).
Mr Mabut, quand cessera donc cette aberration linguistique d'agglo FVG ? Le terme de région lémanique suffit à elle-même pour expliquer ce concept et respecte de la même façon les relations historiques, économiques des peuples réunis autour d'un simple lac et ce, au-delà de toutes les appréciations partisanes ou luttes picrocholines...
Lorsque l'on pense que Bardonnex est le centre du Monde, il est assez évident que Genève, c'est un peu Tokyo...
M. Mabut, Genève est une métropole suisse, et non française. Le département du Léman a été supprimé en 1815. Que cette métropole suisse déborde sur la France ne la rend pas française. J'ai un peu du mal à comprendre pourquoi à Genève on attend quelque chose de Paris. Désir enfoui de revivre l'époque de Napoléon, peut-être ? Cette nostalgie a du reste joué un rôle certain, dans l'élan du rattachement de la Savoie à la France : nombre de Savoyards regrettaient eux aussi Napoléon. J'y consacrerai un article, à l'occasion : le souvenir inconscient de Napoléon dans le canton de Genève. Il est vrai que sans Napoléon, les communes réunies ne seraient peut-être jamais devenues genevoises, c'est à dire suisses. Honnêtement, ce disours décalé qui montre que les Genevois se sentent parfois plus proches de Paris que de Berne participe un peu du folklore. Pour être placée par Paris parmi les villes françaises, il faudrait que Genève paie les impôts de la même façon que les villes françaises. Annemasse n'y change rien : ce n'est pas depuis Annemasse qu'est dirigée la métropole genevoise.
La remarque est tres pertinente. Le Conseil Regional de Rhone Alpes a pris en compte le fait que l'agglomeration genevoise est la deuxieme plus grande agglomeration de la region meme si elle est binationale.
En terme electoral, Geneve concentre autant d'electeurs que de tres grandes villes francaises : 40 000 francais ou binatioaux resident sur le canton de Geneve, 40 000 francais ou binationaux n'y resident pas mais y travaillent, et plusieurs centaines de milliers resident et travaillent dans le Genevois Francais.
Cependant l'oubli de la commission Balladur est legitime dans la mesure ou la commission n'avait pas autorite a faire des propositions qui depasse le territoire francais. Puisque ni Berne ni Paris n'ont autorite pour mettre en place les institutions necessaires a la bonne gouvernance de notre agglomeration il serait sage que nous fassions ensemble les propositions. Cela peut se faire effectivement de maniere parallele aux travaux de la constituante avec un groupe de travail binational.
Quant aux termes, il est vrai que le terme d'agglomeration franco valdo genevoise a le merite de ne vexer personne... mais a le tort de ne plaire a personne. L'Agglomeration Lemanique est sans doute plus pertinente mais aurait besoin d'investissement considerables pour etre visible. Cote Francais, l'appelation meme de la commune de Saint Julien en Genevois montre que le Genevois francais se considere Genevois depuis plusieurs siecles.
Il me semble que l'appelation d'agglomeration binationale est plus approprie que le terme d'agglomeration transfrontaliere. D'une part parce que du point de vue de l'agglomeration elle est effectivement binationale - l'agglomeration est a la fois suisse et francaise. Mais aussi parce que les 15% de binationaux sont la garantie que dans quelques generations une majorite de ses habitants seront binationaux egalement.
Amicalement,
Antoine
M. Vielliard, j'ai écrit un article sur ce terme "en Genevois", qui existe aussi pour Clermont, près de Rumilly. Vous confondez. Cela date du temps où le comte de Genève résidait à Annecy. "Genevois" se disait par rapport au comte de Genève, qui résidait à Annecy. Cela fait plusieurs siècles que la capitale, pour Saint-Julien, est Annecy. Cela n'a été Genève il y a bien mille ans, maintenant. Les termes conservés des temps anciens sont poétiques, mais on ne peut rien en tirer de politique. Hermance et Annemasse étaient dans le Faucigny. Cela dit, comme Genève est une ville riche - plus qu'Annecy -, la poésie, cela peut flatter l'imagination.
(J'ajoute que le terme "en Genevois" n'a pas été apposé au nom de Saint-Julien par la population de la ville, mais par l'administration du duc de Savoie, qui voulait ainsi différencier ce Saint-Julien des autres Saint-Julien qui pouvaient exister, de la même façon que Clermont fut dit en Genevois pour le différencier par exemple de Clermont-Ferrand. Cela signifie peut-être que le duc de Savoie était attaché à Genève ; d'ailleurs, ce n'est un secret pour personne qu'il aurait aimé en faire une de ses capitales. Mais "en Genevois", pour la population ancienne, cela ne signifie en rien un lien direct avec Genève : le duché de Savoie avait une province appelée "Genevois", ancien duché dont la capitale était Annecy. J'ai écrit à ce sujet l'article intitulé "Duché de Genevois" : à lire, à mon avis.)