"Électeurs et consommateurs, Internet donne à chacun des droits d'expression inédits. C'est le cinquième pouvoir qui bouscule l'ordre établi." Charly Schwarz l'écrit dans un billet ce matin. "Les blogueurs sont partout, poursuit l'animateur du site Esprit de Genève, qui bataille pour couvrir la ville d'un réseau wifi digne de ce nom*: en Iran avec les dissidents, à Gaza avec les Palestiniens ou dans les coulisses du monde du cinéma."
Cinquième pouvoir? Oui! Mais comme tout pouvoir, les blogs et l'Internet ont besoin de contre-pouvoirs et de régulations. Ceux-ci sont en gestation. En Suisse, notamment, où les Tribunaux inventent la règle, puisque les politiques n'ont pas encore légiféré en la matière. Jusqu'à quel point, l'hébergeur d'un site est-il responsable des billets et des commentaires qui y sont publiés? 2009 devrait donner quelques réponses judiciaires à ce sujet.
Les blogs constituent le meilleur, mais aussi le pire des mondes. Ils consacrent souvent le règne de la subjectivité. C'est d'ailleurs un de leurs attraits, tant que les fondamentaux de l'information sont un tant soi peu préservés: citer ses sources, ne pas colporter des rumeurs, éclairer le contexte, rester indépendant d'intérêts marchands ou d'intérêts idéologiques, respecter la dignité humaine. Des exigences qui sont celles du quatrième pouvoir, mais que les blogs ignorent souvent. Ils sont alors des instruments d'une désinformation ou d'une manipulation de l'opinion.
* étonnant tout de même cette ville et ce canton qui furent les hôtes actifs du premier Sommet de l'information ne pas être en mesure de fournir à ses habitants les voies de la communication moderne alors qu'ils dépensent des milliards pour les routes et le rail.
Commentaires
"C'est d'ailleurs un de leurs attraits tant que les fondamentaux de l'information sont un tant soi peu préservés: citer ses sources, ne pas colporter des rumeurs, éclairer le contexte, rester indépendant d'intérêts marchands ou d'intérêts idéologiques. Des exigences qui sont celles du quatrième pouvoir, mais que les blogs ignorent souvent. Ils sont alors des instruments d'une désinformation ou d'une manipulation de l'opinion."
"Exigences du quatrième pouvoir ?"
hahum... ça se discute.
Et c'est pour cela que: heureusement, il y a les blogs !
:o)
Les blogs "sont alors des instruments d'une désinformation ou d'une manipulation de l'opinion." Euh, on se demande qui manipule qui. Les tribunaux ont bien épinglé le premier pouvoir pour mensonges et manipulations d'opinion!
C'est justement pour ça qu'existe le blog; rectifier le tir, informer plus vite que son ombre, répondre à une insulte injustifiée, réagir à une opinion biaisée, secouer le cocotier.
De plus, certains billets sont repris par des jounalistes en poste.
La recherche de la vérité et d'une éthique de l'information sont souvent du côté du blog, bien plus que dans certains écrits officiels.
"L'information est le rêve paradoxal de la collectivité - l'état hypnotique ou elle se régénérerait, elle et son identité collective, comme il est dit de la fonction du rêve dans la vie individuelle. Ou bien l'information tient la place du sommeil profond, dont la vie réelle serait l'état de veille paradoxale"
(j. Baudrillard in Cool Memories IV éd. Galilée)
.....toujours beaucoupe de plaisir à vous lire, cher Monsieur.
ps : bannissez l'anonymat !!!!!
Bonjour,
Opposer journalistes et blogueurs est dans l'air du temps, et a déjà agité la blogosphère francophone en 2008.
Versac écrivait :
« Journalistes contre blogueurs, c'est un faux débat, qu'entretiennent des journalistes perdus dans leur citadelle et qui se sentent menacés par des gens qui ne leur veulent pas de mal, mais exercent juste un droit de libre correction. L'heure est à la coopération, parfois complexe, entre les journalistes et leurs publics » http://tinyurl.com/5j4phs
Il disait aussi :
"les deux sphères du web social et du web de l'information sont en train de se rapprocher. L'une a une logique plane, à vocation relationnelle, ou sociale. L'autre a une logique de contenu, professionnelle. A la frontière des deux se créent actuellement des initiatives qui tentent de conjuguer ces approches. Cela suppose de réinventer le rôle du journaliste, en tenant compte du formidable potentiel du web, et des pratiques effectives des internautes."
http://tinyurl.com/5bfyt5
Contrairement à vous, je ne crois pas qu'il y ait d'un côté des journalistes vertueux et seuls détenteurs de la Vérité, et de l'autre des blogueurs "instrumentant une désinformation et manipulant l'opinion".
Tous les journalistes ne remplissent pas toujours leurs "devoirs" (cf votre lien) il suffit de lire Piques et répliques pour s'en convaincre ;-) http://pikereplik.unblog.fr/
Les blogs, 5ème pouvoir en Suisse ? Quel pouvoir?
Bonne année.
Deux exemples vivants et genevois du passage de la tenue d'un blog à la politique.
Stéphane Valente et moi, Victor Dumitrescu, nous sommes passés de blogeurs à conseillers municipaux.
Cher Jean-François, je ne crois pas que le 4ème pouvoir (tiens au fait et le pouvoir de l'argent, on le place en combientième position ?) soit vraiment distinct des intérêts marchands ou idéologiques. D'abord parce que les journaux vivent de la pub et ensuite parce que chaque journaliste a des convictions propres. Certes respectables, mais forcément partisanes.
Les chartes de la rédaction et autres engagements à l'objectivité, communs à la presse dite généraliste - notamment en Suisse, sont d'après moi (et 30 ans d'expérience dans le métier de deux côtés de la barrière) une vaste fumisterie. Je crois beaucoup plus en des systèmes qui tiendraient compte de la réalité et de la nature humaine.
Mon père, à qui il arrivait de collaborer à la presse automobile, rêvait d'un journal de bagnoles qui n'accepterait aucune pub des milieux automobiles et toutes les autres. C'est une idée mais évidemment, pour des raisons mercantiles, les journaux de bagnoles sont au contraire remplis d'images payantes de carrosseries enjôleuses.
Dans le même esprit, je crois bien davantage à la presse d'opinion. Au moins on sait ce que l'on va y trouver. Des journaux bourgeois ou gauchistes ou tartempionnistes, dans lesquels écrivent des journalistes qui le sont aussi. Mais évidemment cette diversité coûte cher, beaucoup trop cher sur papier. C'est pourquoi elle trouve sa place, peu à peu sur Internet, où la plupart des sites sont très connotés et spécialisés.
A contrario, l'expérience des blogs de la Tribune est intéressante, car on y retrouve toutes les opinions, dans des confrontations parfois violentes. Ce qui malheureusement ouvre des tribunes imméritées à certaines opinions qui feraient mieux de rester dans l'ombre. Le populisme et la haine sont de réels dangers pour nos sociétés. La démocratie n'est pas un stade de foot et la politique une bagarre de rue entre supporters ultras.
La liberté d'expression doit-elle être absolue ? Je pense comme vous que la justice devra poser certaines limites. Mais il va être aussi compliqué de les dessiner que de les faire respecter.