Point de hooligans (nous les aurait-on cachés? J'en doute), partout des vibrations populaires festives, aux fenêtres, des mariages de drapeaux improbables, sur le terrain, des outsiders qu'on adopte comme les membres d'une famille dans une joute amicale, décidément cet Euro 2008 scelle une Europe des peuples plus sûrement que les pactes, constitutions et autres traités laborieusement négociés à Bruxelles, Nice ou Lisbonne. Je craignais le déferlement des nationalismes haineux en ce mois de juin 2008. Je me suis trompé, je l'avoue. Mais d'où vient cette possible fraternité européenne?
Du fait, je crois, que l'Europe est désormais le rempart commun des 450 millions d'Européens et de ceux qui souhaitent aussi jouir un jour prochain de cette liberté, égalité, fraternité qu'elle nous promet et garantis tant bien que mal. Contre la barbarie. L'Europe naît d'un élan populaire à l'heure où le peuple la réclame pour se protéger. Ainsi ce continent se forge, comme d'autres pays, moins à l'idée d'un progrès économique et social, que dans le sentiment d'une défense commune. Les ennemis d'hier, confrontés eux aussi au même péril, s'allient soudain. Quand un bateau tangue, les rancunes et les haines se taisent.
Soumise à la mondialisation, concurrencée par la Chine, l'Inde, le Brésil, l'Europe tangue. Entre le gaz russe et le pétrole arabe, la péninsule eurasiatique sait son énergie bridée par des puissances inamicales. Il est temps de s'unir. Mais paradoxalement, les politiques ne savent pas saisir cet instant, enchaînés qu'ils sont dans des jeux démocratiques essentiellement nationaux. Le souverain émietté est aveugle à l'intérêt général de l'Europe. Il s'épuise dans l'addition d'intérêts locaux contradictoires.
Comment mobiliser l'énergie fraternelle de l'Euro 2008 pour forger l'Europe?