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La presse n’a pas le moral

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«Je l’ai lu dans la presse!» L’affirmation vaut souvent démonstration que la nouvelle est vraie. Vraiment ? La presse est-elle toujours crédible? Le sondage que publie le quotidien La Croix en France démontre que cette crédibilité s’érode un peu plus chaque année. Une grosse centaine de journalistes dont plusieurs pointures de la presse écrite et audiovisuelle romande ont fait un premier tour de la question ce mardi à l’occasion des premières assises de la presse romande.


Impression d’audience à l’issue des quatre débats organisés par le syndicat des journalistes Impressum: grosse déprime, morosité persistante, insécurité économique croissante, avenir incertain.



Bref la presse n’a pas le moral, même si Eric Hoessli claironne son optimisme face aux vieux hérauts d’un journalisme d’investigation en panne de moyens, les de Diesbach et autres Christian Campiche. Le directeur de la Tribune de Genève et de 24 heures parie sur le retour des jeunes à la lecture, affirme que les lecteurs sont toujours friands de nouvelles taillées à l’aune de l’honnêteté intellectuelle, sans prêchi-prêcha, et prétend que la presse est meilleure aujourd’hui qu’hier.

 

Vraiment? Christoph Büchi le correspondant de la NZZ en Suisse romande illustre en deux chiffres l’ampleur du problème des moyens: «Quand j’ai commencé à couvrir la Suisse romande, nous étions une quinzaine de journalistes de Suisse alémanique. Aujourd’hui nous somme trois ou quatre.» Trois ou quatre face à des chargés de communication d’entreprises, d’institutions qui ne cessent de se multiplier. Trois ou quatre pour raconter la Romandie aux Alémaniques, face à une flopée d’internautes qui bloguent à tout va et ajoutent leur brouhaha personnel plus qu’ils n’informent.



Bref encore, les médias sont drôlement secoués par un long tremblement de terre technologique et économique de force 7 ou 8. Les gratuits sont devenus les journaux les plus lus en moins de cinq ans. L’internet interactif donne à chaque citoyen l’accès à l’édition quasi gratuitement. Les annonceurs harcèlent éditeurs et rédacteurs en chef pour qu’ils s’ouvrent à la publicité «créative» (des annonces au milieu des articles, des articles de complaisance) et transforment leurs titres en des produits joyeux et policés, futiles et utiles. Bref toujours mieux formatés, en résonance esthétique et éditoriale avec leurs réclames vantant et vendant la vie en rose.



Et que devient l’intérêt public dans ce flot de commentaires un peu nombrilistes et désabusés ? Il s’est un peu perdu dans l’angoissante question de la survie économique des quotidiens payants d’information générale. Qui voient bientôt leur dernière heure sonner. Heureusement quelques intervenants ont rappelé que les journalistes n’étaient pas les seuls à devoir résister contre l’emprise de l’argent roi, à devoir lutter pour conserver leur esprit critique et leur indépendance.



Ce soir, à Cornavin, la pile à peine entamée de Tribune enfermée dans sa caissette à bandit manchot contrastait méchamment avec les caissettes vides de 20 Minutes et du Matin Bleu. Sauve qui peut dans le net?

 

C'est le mot d'ordre. Tous y investissent. Philippe Favre de 20minutes.ch prétend couvrir ses frais. Info ou intox? Gabriel Sigrist, le pionnier du journalisme en ligne romand sur www.Largeur.com avoue que c'est l'édition papier qui fait vivre les 12 collaborateurs de son bureau de presse. Pierre Haski créateur du français www.rue89.com n'a pas démenti. Le net offre une grande indépendance, mais ne nourrit pas (encore) les journalistes.

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