A l'aune de la transparence et du parler vrai, Bernard Gaud, maire de Chevrier (à propos quand donc notre ministre de l'instruction publique impose-t-il aux petits genevois de connaître un peu mieux la géographie de la région franco-valdo-genevoise qui est notre avenir à tous?) a remporté la palme et même des applaudissements des quelque 80 personnes présentes à la salle communale de Veyrier. [photo: Bernard Gaud avec Robert Cramer signant le projet d'agglo 1 le 5 décembre 2007]
Le président de la commmunauté de commune du Genevois (région de Saint-Julien) a notamment déclaré que "le CRFG était une machine à ne rien faire" et que "le Conseil du Léman était juste bon à publier la liste des foires de la région". Et encore que "l'on s'adore de part et d'autre de la frontièrespour autant que l'on ne parle pas gros sous...."
"Qu'à propos des 80 millions que la Confédération offre "généreusement" pour développer les transports publics en France voisine, Berne pouvait se les garder si le but du projet d'agglo était de continuer à concentrer les emplois à Genève et les cités dortoirs en France. Et ce ne sont pas les bisous de Lellouche et de Calmy-Rey qui vont changer quelque chose. (...) J'ai voté contre Agglo 2" (dont la signature doit intervenir en juin 2012 et relancer le processus engagé en décembre 2007) a déclaré Bernard Gaud.
Si même les Français émettent des doutes sur le projet d'agglomération franco-valdo-genevois, on peut se demander si ce bateau livre (l'agglo c'est surtout des études technocratiques: trois bureaux d'urbanistes pour chacun des neuf PACA) ne va pas s'échouer. Du côté genevois, on ne sait toujours pas qui tient la barre. "Ce n'est pas moi" a redit hier soir le ministre genevois des Affaires régionales. Si ce n'est lui c'est donc Mark Muller qui a déjà bien à faire pour relancer le PAV, sauver les communaux d'Ambilly du naufrage, et faire sortir de terre le quartier des Vergers à Meyrin, sans parler des multiples projets qui traînent dans son département.
Tout n'est pas noir pour autant. La région progresse. Moins vite qu'on le voudrait - un spectateur s'est fait le chantre de l'éphémère département du Léman, tombé à Waterloo avec Napoléon - Bernard Gaud s'est néanmoins félicité de l'existence d'un nouvel instrument: le GLCT, le Groupement local de coopération transfrontalière. C'est notamment cet instrument qui tient le téléphérique en marche un peu comme le pendu tient la corde. Qui fait circuler quelques bus transfrontaliers (tous à plaques soixante-quatorze et leurs conséquences syndicales), qui permet de traiter les eaux usées du Pays de Gex et de Saint-Julien et donc d'éviter que les poissons flottent le ventre en l'air à l'occasion des étiages estivaux.
Le GLCT ou son avatar, le GECT ou GEC sont des mots qui vont enrichir ces prochains temps le vocabulaire déjà bien abscons des clercs de l'urbanisme régional. Et là, Genève a un petit désavantage par rapport à Bâles. Pour créer un Groupement européen de coopération transfrontalière, il faut deux Etats de l'Union européenne. C'est le cas à Bâles, ce n'est pas le cas à Genève, à moins d'étendre la région franco-valdo-genevoise jusqu'à la Vallée d'Aoste. Les juristes se contorsionnent donc les méningent pour sortir de l'imbroglio et offrir à Genève métropole un statut légal digne de ses ambitions.
A noter toutefois que Bâles est jalouse de Genève s'agissant du Comité franco genevois (la machine à rien faire de Bernard Gauc) qui a été créée en 1973 à l'issue des accords fondant la rétrocession fiscale de Genève à la France: quelque 200 millions de francs par an sur une rentrée fiscale des impôts payés à la source par les frontaliers de 600 à 700 millions de francs.
Alors quand il s'agit de débattre de l'idée d'un Fonds d'équipement régional, histoire de financer les parkings d'échange, l, qu'avait proposé naguère Pierre Milleret l'ancien président de feu l'AGEDRI, tout le monde se regarde en chien de faïence.
A noter que deux des trois questions du public ont eu trait à la décroissance, l'une demandant aux maires d'Annemasse et d'Etrembières, quelle était la limite du développement urbain, l'autre réclamant du ministre Unger une pause dans la promotion économique genevoise. Les réponses furent unanimes. Nous ne sommes pas les élus de la décroissance mais de la maîtrise d'une croissance qui nous est imposé. Bernard Gaud - encore lui - eut des mots très forts sur la nécessité des riches d'accueillir quelques pauvres diables du monde.
A suivre (si j'ai le temps).
Pour en savoir plus: le site officiel du projet d'agglo, le blog Métropole Genève
PS: Aux personnes qui étaient à Veyrier hier soir, pourquoi ne pas créer un blog ou/et laisser un complément ci-dessous en cliquant sur commentaire. La région c'est votre affaire, l'information citoyenne aussi.
* Un propos tenu dans le cadre d'un interview expresse où le ministre de l'économie tentait d'expliquer que l'intérêt national commandait de serrer les rangs. En clair la Suisse prenait des risques à exposer au monde ses bisbilles internes. Les parlementaires doivent donc faire bloc derrière le gouvernement et voter la loi sensée préserver tous les établissements bancaires qui auraient jouer avec le feu et les lois américaines. Bref tout le monde est prié de rentrer dans les clous.
A propos du vote sur la livraison de 4450 noms de clients UBS à l'Amérique de "saint" Obama, Pierre-François Unger a cette jolie formule dans mon journal préféré ce matin: "On va tous sortir notre mouchoir parfumé, nous le coller sous le nez et traverser courageusement le tas de fumier. L'herbe ne pourra être que plus verte ensuite." *
Pas sûr cependant que les Suisses soient appelés à entériner le prochain vote des Chambres. A Genève, le Grand Conseil avait privé le peuple de se prononcer sur le sauvetage de la BCG concocté alors par le duo Grobet Calmy-Rey. Une facture de 2,5 milliards pour le canton. Pour l'instant l'histoire UBS a rapporté de l'argent à Berne (et coûtera sans doute quelques milliards à la BNS).
Pour un ministre des finances, traiter quelques anciens dirigeants de la première banque du pays de l'élément constitutif du fumier, relève soit du populisme, soit de l'inconscience. A moins que ce propos ne résulte tout simplement du bon sens de quelqu'un qui exerce sa dernière législature et ne se représentera plus devant les électeurs. Encore que, par les temps qui courent, ce soit plutôt bien porté - électoralement parlant, à gauche comme à l'extrême-droite - de cracher sur les banquiers distributeurs de bonus.
Comme le dit le grand Starobinski, excellemment interviewé par Etienne Dumont dans le même journal: "Nous subissons une séduction de l'émotion présente qui entraîne une régression de la capacité de mémoire". Et plus loin: "A la mobilité dans le temps (qui valorise la mémoire et la comparaison avec le passé) a succédé l'ivresse de la mobilité dans l'espace."
Hier soir à Veyrier, devant une modeste chambrée, on a pu constater le même effet. Les politiciens sans avenir ont tenu un langage critique, ceux dont le sort dépend de l'humeur du peuple, ont tourné sept fois leur langue dans leur bouche. Ainsi va la démocratie. Le courage n'est pas la vertu que les urnes récompensent le plus.