Le projet de reconstruire l'orgue de l'église de Compesières et au passage de l'agrandir et de lui adjoindre un positif dans le choeur de l'église, chroniqué dans cette note, a suscité un commentaire d'un voisin et ami, facteur d'orgue de profession, que j'ai rencontré fortuitement sur le chemin des vignes que surplombe la tour d'eau de Landecy - ces eaux que la Mémoire de Bardonnex a naguère narrées - où nos chers SIG, dans leur recherche de se distinguer et de verdir leur image, pourraient avoir la bonne idée de créer un mur de grimpe original.
L'avis du facteur d'orgue est carré. S'en ajoute un second reçu ce lundi. Ils me vaudront bientôt, je l'espère, une réponse de l'initiatrice de ce projet ambitieux. Dans l'intervalle, j'ai pris langue avec Carouge et Lancy, dont les églises catholiques accueillent des orgues de qualité et où des concerts sont donnés.
Note mise à jour le 22 mars à 9h
Commentaire posté par Jean-Christophe Pidoux, "En tant que facteur d'orgue, je trouve ce projet mégalo pour Compesières. Un orgue de tribune n'aura aucune utilité pour la paroisse et que peu pour des concerts. J'ai proposé à la paroisse un magnifique positif avec un clavier transpositeur, et je n'ai jamais eu de réponse, alors que le seul instrument utile pour les concerts serait un orgue positif pour les continuos.
Les grandes orgues sont nombreuses à Genève et très peu utilisées. Sur les 35 ans de facture d'orgues, plus de la moitié des instruments que j'ai construits ne sont presque plus joués. Le choix d'un facteur d'orgues allemand est un scandale, les facteurs suisses souffrent du manque de soutien de la part des paroisses. Nous parlons de soutenir le local. Il faut savoir qu'un orgue a besoin d'être accordé une ou deux fois par année, et déplacer un facteur d'orgues de plusieurs centaines de kilomètres n'est pas très cohérant. Nous avons de très bons facteurs d'orgues en Suisse."
Commentaire posté lundi 22 mars par Bernard Leresche: Projet bien étrange. Ancien facteur d'orgue, j'ai vu avec Christophe notre petite entreprise romande disparaître en 2000. On ne manquera pas de relever la contradiction cruelle entre l'argument du passionné dont je reconnais, 40 ans plus tard, l'exacte expression dont il nous assurait l’imprescriptible qualité qui, je le note, s'appuie aujourd'hui sur un document marketing très partenariat public-privé de bien bonne figure. Je suis encore étonné par la vacuité de l’exposé qui se répète génération après génération, en ces jours paraît-il propices à la réflexion fondamentale.
A quoi on réplique spiritualité, rayonnement, esprit et beauté, développement, orgue unique (à Genève), compréhension du besoin ! respect (de tout) et, c'est particulièrement pervers finalement, pérénisation de la facture d'orgue + technologie, prestataire + crowfounding : n'en jetez plus... Pervers en ce qu'il s'agit, finalement comme d'habitude, de concepts vaporeux destinés à convaincre le sponsor et une (très petite) foule anonyme.
Autre remarque qui moi m'évoque quelque ancien art de l'enfumage, le titre de rénovation — ah, gloire à la conservation du patrimoine — avec dans le "projet" cette mention qui dit presque tout, je cite le document officiel : sauvegarde (si possible) de l'orgue actuel. Eh bien je ne suis pas sûr que l'époque se prête vraiment à ce genre de fantaisie dont on trouvera d'autres exemples au cours des temps. L’image de ces façades XVIIème masquant des bureaux climatisés et des Zara mérite d’être rappelée, pour mémoire. Il y a quelque chose d'étonnant dans "l'enthousiasme" de commande qu'exige ce "projet" dans ses perspectives à la fois voulues grandioses et pourtant très suisses, mais avec cette touche mondialisante qui semble faire loi chez les grands commis de l'Art.
Cependant, cette question pourrait bien se poser de manière plus aiguë d'ici peu, dans ce pays qui n'a plus assez de médecins, d'informaticiens, de restaurateurs, de menuisiers, de cantonniers de trouver une manufacture d'orgues à peu près locale pour honorer l'entretien du futur instrument (et sa technologie) sans plus pouvoir jouir comme on le croit établi pour toujours du bénéfice du grand déménagement du monde. Mais peut-être est-il effectivement trop tard pour préserver un artisanat local, des compétences régionales riches et variées et faut-il en accepter la perte de valeur foncière.
Je suis bien convaincu qu'il faut chérir toute perspective de bonheur à laquelle nous admettrons que l'art devrait contribuer fondamentalement. Par contre, quand il est question de proportions, de "valeurs" et de pertinente opportunité, certaines entreprises à l'heure qu'il est manquent sérieusement de grandeur.
L'orgue de l'église Sainte-Croix de Carouge
Le site Orgues et Vitraux et celui de l'Unité pastorale Carouge Acacias, étendue à Veyrier, Troinex et Compesières le 15 décembre 2020, indiquent que cet orgue à un clavier a été conçu en 1832 par un facteur d'orgue nommé Jean Baud. Son agrandissement fut décidé en 1872 et les travaux confiés à Joseph Merklin mais ne furent pas terminés. C'est donc les facteurs Tschanum qui le transforma avec trois claviers et une traction pneumatique. En 2010 une nouvelle restauration fut réalisée sur cet orgue pour un montant de plus d'un million de francs. Depuis avril 2016, Andrea Boniforti est organiste titulaire des orgues historiques de l'Église Sainte-Croix de Carouge.
La dernière rénovation commencée en 2008 fut confiée à la maison Kuhn (Männedorf – ZH). L'instrument est entièrement démonté pour être nettoyé en atelier. Le plan d'approvisionnement en air des tuyaux est entièrement repensé, on fabrique des registres supplémentaires pour compléter et unifier son style et sa palette sonore et en faire un instrument symphonique français à trois claviers et 33 registres.
On trouve désormais la console « en ifenêtre », là où la manufacture de Genève avait installé le positif (IIe clavier). Ce dernier a été ingénieusement réintégré à l'intérieur du buffet derrière le grand orgue (Ier clavier) et sous le récit (IIIe clavier). La place utilisée par chaque tuyau est calculée au plus juste, et la conception générale très habile pour faire entrer les 33 registres dans un espace relativement compté en raison du buffet historique à respecter. La traction des claviers est reconstruite à neuf et à nouveau mécanique, le tirage des registres est électrique et accouplé à un système de combinateur très performant (11 x 1000 combinaisons). Des détails techniques sont disponibles sur la page Sainte-Croix du Répertoire suisse de l'orgue.
Le temple de Carouge possède également un bel instrument dont le titulaire est Marcelo Giannini. Deux dates clés selon le Répertoire suisse de l'orgue: 1962 Construction par la Manufacture de Grandes Orgues de Genève avec 25 jeux sur trois claviers et pédale. 2003 Révision générale par la Manufacture d’orgues Saint-Martin après la rénovation de l'église.
A noter encore que les Carouge sont une famille de facteur d'orgue du XVIIe siècle.
Les orgues de Lancy
"Muet et abandonné durant vingt ans, l’instrument de l’église Notre-Dame des Grâces a fait peau neuve. Récit d’une renaissance avec les artisans qui ont pris soin du grand malade." (La Tribune de Genève du 13 avril 2018)
A fin 2016, L'orgue de Lancy est démonté et part pour les ateliers des facteurs italiens I. Colzani et E. Bastici à Villa Guardia, près de Côme (Italie). Le célèbre organiste Diego Innocenzi (titulaire de l'orgue du Victoria Hall à Genève, le même qui conseil Claire Haugrel pour Compesières) s'est investi de manière importante dans ces travaux. Il assura notamment l'animation et l'inauguration de l'orgue restauré, en avril 2018. Il est, on peut le dire à l'origine de la renaissance de cet instrument. (Légende de la photo de Lucien Fortunati tirée de l'article de la Tribune: Les deux facteurs d’orgues Ilic Colzani (à g.) et Ettore Bastici (à dr.) entourant l’organiste Diego Innocenzi, expert consulté pour la restauration.) Ce qu'en dit le Répertoire suisse de l'orgue.
L'orgue de Bernex
Sur le site de la commune de Bernex on peut lire ceci: "Les grandes cathédrales d’Occident s’enorgueillissent d’avoir des orgues à la gloire de leurs églises. L’église catholique St-Maurice de Bernex, édifiée entre 1864 et 1865 par l'architecte J.-F. Charrière, est modeste, mais possède une excellente acoustique architecturale que l’orgue ancien, datant de 1899, a excellemment servi durant près d’un siècle.
Les nouvelles orgues ont donc été installées, à l’achat desquelles a participé la Commune de Bernex, et font maintenant partie du patrimoine culturel appartenant à la population. Ce magnifique instrument, d’une valeur artistique incontestable, est très largement mis à contribution puisqu’il assure l’accompagnement musical de nombreux offices religieux en plus des Concerts spirituels, organisés d’abord par l’Association des Concerts spirituels de Bernex (1981-2018) et aujourd’hui par le service culturel communal. " La page Bernex du Répertoire suisse des orgues donne des détails techniques sur la nature de la restauration de 1987.
Et sur la page du Service culturel de Barnex dédiée aux concerts spirituels, on lit encore: Les Concerts spirituels sont organisés trois à cinq fois par année à l’église Saint-Maurice de Bernex par le service culturel communal. Jusqu’en 2018, ils étaient programmés par l’Association des Concerts spirituels de Saint-Maurice-Bernex (ACSB), qui s’était donné deux objectifs principaux lors de sa fondation en 1981 : promouvoir une activité artistique en proposant des concerts spirituels et contribuer au remplacement de l’orgue, que la paroisse catholique n’avait pas les moyens de financer. Grâce à un inlassable travail de terrain de ses membres elle a pu acquérir un nouvel instrument six ans plus tard et l’offrir à la paroisse.
Dès leurs débuts, les Concerts spirituels ont présenté des œuvres et des instruments variés formant des ensembles originaux. Ils donnent régulièrement à de jeunes artistes de talent l’occasion d’exercer leur art. L’orgue est fréquemment de la partie, comme soliste ou accompagnant, et l’église Saint-Maurice a aussi le plaisir d’accueillir les tant appréciés concerts d’avant-fêtes « Chantons Noël ».
L'orgue de Veyrier
L'instrument construit en 1977 par le Facteur d’orgues Xavier Silbermann, Thonon F, avec 13 jeux sur deux claviers et pédale nécessite un gros entretien, selon la présidente du Conseil de paroisse, Mme Schenk-Gottret, mais la paroisse n’entend effectuer qu’un entretien minimal. Il n’est actuellement guère joué en dehors des célébrations.
L'orgue de Confignon
Plus modeste, l'orgue de l'église de Confignon est néanmoins décrit dans le Répertoire suisse de l'orgue: 1927 Installation d’un orgue d’occasion, provient d’une chapelle de Carouge. Nous n’avons aucune informations sur cette orgue, ni sur sa composition, ni sur le facteur d’orgue. 1967 Construction d'un nouvel orgue par le facteur d'orgues Saint-Martin, Chézard-St. Martin, avec 13 jeux, dont 1 jeu est absent à ce jour (Plain- jeu 1'), sur deux claviers et pédale