Quatrième temps du Forum Etat et médias dans la démocratie: un quartet de politiciens glose sur le financement de la presse. Le débat tourne court. La faute peut-être à l'animateur qui ne parvient pas à creuser le sujet vraiment.
Le porte-parole de l'UDC Martin Baltiser du haut de son mètre nonante a tôt fait de régler le sujet: Pas question de financer la presse! La libérale Martine Brunschwig Graf abonde dans le même sens. La question du financement de l'information générale et politique n'est cependant pas épuisée avec ces réponses à l'emporte-pièce. Le PDC de Buman et le socialiste Berset ne prennent pas non plus la mesure de l'enjeu.
C'est que l'information générale et politique est à la démocratie ce que l'air pur est à l'être humain, quelque chose d'indispensable. Or il est fini le temps du modèle économique des lecteurs citoyens prêts à payer cette information générale et politique en partenariat avec des annonceurs, respectueux de l'indépendance rédactionnelle.
Que constate-t-on: les politiques sont souvent très critiques - parfois à juste titre - sur la qualité et la quantité de l'information générale et politique dans les médias, mais ils ne sont pas prêts à entrer dans le débat du financement de sa production, parlent de Swissinfo qui n'est pas un média national, détournent le sujet en causant des journaux gratuits qui polluent le macadam, mettent le doigt sur une erreur dans l'affaire libyenne pour dénoncer le comportement irresponsable des médias.
Sarkozy a été plus courageux.
Dans la foulée du Grenelle de l'environnement, il a convoqué des états généraux de la presse. Un état des lieux qu'il conviendrait de faire en Suisse. La presse française est soutenue par l'Etat depuis longtemps, beaucoup plus qu'en Suisse. Elle n'est pas la meilleure du monde. Mais sans ce soutien, elle serait sans doute pire.
De ces états généraux est sorti un effort supplémentaire - des annonces payées par les régies publiques pour soutenir les médias. En contre-partie, la fin la publicité sur les chaînes de service public. Ce n'est pas la panacée, mais c'est une politique qui a le mérite d'exister. En Suisse on n'organise que les médias audiovisuels. Quant au blogs, au réseaux sociaux, aux milliers de commentaires publiés par des anonymes sois les articles mis en ligne par les médias classiques, ces nouveau modes d'expression sauvages sont tout simplement ignorés.
On lira dans les notes précédentes quelques suggestions.
Pour les résumer, je postule que la presse d'information générale et politique (pour être plus précis celle qui relate régulièrement les activités des parlements) livre des prestations d'intérêt général que le marché n'est plus en mesure de financer. Tout comme le paysan qui entretient les paysages et reçoit des paiements directs pour ces prestations, les médias doivent à l'avenir pouvoir obtenir des moyens pour augmenter la quantité et la qualité de ce type d'information. Il en va de l'avenir de la démocratie. En contre-partie, elle devra signer une convention de prestations avec une Fondation de droit public.
Le débat reste ouvert. La diversité de la presse, c'est d'assurer une diversité de son financement. Si la presse n'est soumise qu'au intérêt du capital, il ne faut pas s'étonner qu'elle le serve.
PS: Dans un entretien que la NZZ publie ce samedi, Tettamanti reproche aux journalistes suisses "Zuviel «political correctness», von der er ohnehin nicht viel hält. Zu viel Konformismus schade der Schweizer Presse". A suivre
On lira dans les notes précédentes le suivi critique, heure par heure, du Forum Etat et médias dans la démocratie
Commentaires
Subventionner la presse, c'est l'asservir! On peut le vérifier en France avec la mainmise de Sarkoléon sur la presse écrite et télévisée!
Subventionner la presse c'est l'asservir, certes, mais ne croyez-vous pas qu'elle est aujourd'hui un peu asservie par les lecteurs qui lui font des infidélités et ne veulent pas payer le juste prix et par la publicité?
Les infidélités des lecteurs ne sont sans doute pas le fruit du hasard, mais très vraisemblablement le prix d'une sanction, pas forcément réfléchie dans tous les cas. Le lecteur, s'il n'est pas encore asservi, peut être influençable et quelque fois influencé. Mais le libre-arbitre subsiste...