Dans toute cette histoire, pas un mot de la France qui relia Genève au monde ferroviaire deux mois avant la Suisse et met la dernière main à la ligne des Carpathes, avec des capitaux suisses, qui raprochera Genève de Paris de 20 bonnes minutes. La Foire de Genève qui accueillera l'exposition des CFF corrigera-t-elle cet oubli?
Pour mémoire, c'est la compagnie privée Paris Lyon Marseille, la fameuse PLM, qui a lancé la première les travaux de liaison avec Genève et qui aurait souhaité une gare à La Praille ou à Annemasse. La nécessité de relier les villes suisses fait pencher la balance pour Cornavin qui sera installé tout comme la nouvelle basilique Notre Dame, dont on fête aussi cette année les 150 ans, à l'emplacement des remparts.
Traverser Genève pour rejoindre la vallée de l'Arve était en effet plus simple que de devoir grimper jusqu'à Archamps où la SNCF peinait du temps de la vapeur à hisser ses trains. Combien, enfant, n'ai-je vu de convois patiner furieusement et même partir à reculons vaincus par cette côte qui est l'une des plus raides d'Europe.
Le détail de la construction de la ligne est raconté sur le site Passion - trains .
Article paru dans la Tribune du 25 juin 2008
La voie entre Genève et Lausanne fête ses 150 ans
Laurent Aubert,
A 150 ans, la ligne de -chemin de fer Lausanne-Genève est loin de prendre sa retraite. Elle voit passer 200 trains de voyageurs par jour et 38 000 personnes. Pourtant, elle a bien failli ne pas voir le jour. Ou, en tout cas, être recalée au rang de petite ligne secondaire. A l'époque de sa construction, la guerre du rail faisait rage et plusieurs tracés étaient en concurrence. Au nord, on voulait construire une ligne allant de Genève jusqu'en Suisse alémanique en passant par Yverdon. Au sud, il était question de relier les deux bouts du Léman par la rive -savoyarde...
En fiacre ou à dos d'âne...
Il faut dire que si les Suisses sont aujourd'hui champions du monde de train, ils ont au début pris pas mal de retard sur leurs voisins. La première ligne de Suisse romande, entre Bussigny et Yverdon, a été construite en 1855. Avant, les transports se faisaient en diligence, char ou fiacre, ou encore, pour les marchandises, à dos d'âne.
Ou alors par voie lacustre. Le premier bateau à vapeur de Suisse, le Guillaume Tell, est introduit sur le Léman à Genève en 1823. Il assure une liaison régulière avec Morges ainsi que des croisières jusqu'à Vevey le week-end. Il a une capacité de 200 personnes et une vitesse de pointe de 13 km/h.
Suite au succès de ce mode de transport, les différentes compagnies genevoises et vaudoises se livrent une concurrence acharnée qui fera rapidement croître la puissance et la capacité des engins. Côté route, 500 diligences de la Poste sillonnent le pays à une vitesse moyenne de 8 km/h. Il faut donc bien huit heures pour faire Genève-Lausanne. Avec l'ouverture de la ligne ferroviaire, les deux villes ne sont tout d'un coup plus qu'à une heure et vingt minutes l'une de l'autre. En 1859, il y a déjà six allers-retours par jour.
Lausanne «hors de portée des chemins de fer»
Mais la jonction n'aura pas été facile. Les bisbilles sur le tracé amèneront notamment l'Etat de Vaud à mettre la Ville de Lausanne sous tutelle pour avoir pactisé avec un Etat étranger (Fribourg). En effet, la commune, considérée hors de portée des chemins de fer», avait souscrit à 600 000 francs d'actions de la Compagnie d'Oron, pour que la Confédération impose le tracé topologiquement difficile de Berne-Fribourg-Lausanne. Ceci contre les projets de la Compagnie de l'Ouest qui a plusieurs concessions en terre vaudoise.
Premier tronçon
Cette dernière réunit un groupe de capitalistes anglais à un groupe suisse. Mais après des difficultés financières, les Anglais se retirent et sont remplacés par des Français. C'est Ouest-Suisse qui construira le tronçon Bussigny-Morges, inauguré en 1855. Puis celui qui relie Lausanne, en 1856. Mais le groupe a un adversaire de taille: la Compagnie Genève-Versoix, créée par les Rothschild et des banques anciennes, d'entente avec le gouvernement genevois. C'est elle qui reliera Genève au réseau français, le 18 mars 1858, date de l'inauguration de la gare Cornavin. En avril, Ouest-Suisse finit de prolonger la ligne de Morges à Versoix. Et le 25 juin, Genève-Versoix ouvre le dernier tronçon du même nom. Quant à la deuxième voie, elle sera achevée en 1879. On attend toujours la troisième.
«Le potentiel d’augmentation est de 30 à 40%»
Quel avenir pour la ligne Lausanne-Genève - La Plaine?
Responsable Grandes Lignes, Vincent Ducrot répond à nos questions.
Cet anniversaire ne souligne-t-il pas la vétusté de la ligne?
Avec ces fêtes, nous voulons montrer le développement continu des transports. Cette ligne a été ouverte il y a cent cinquante ans, le matériel a fortement évolué, les temps de parcours ont été réduits, le nombre de voyageurs a explosé. Pour présenter l’histoire qui sous-tend la mobilité actuelle, nous avons choisi d’aller au-devant des gens au Comptoir de Lausanne et à la Foire de Genève. Ce ne sera pas une fête nostalgique avec de vieilles locomotives mais un événement tourné vers l’avenir.
Quel est, selon vous, le vrai problème sur cette ligne?
Le premier est lié à la topographie: il n’y a pas d’axe de délestage. En cas de panne, la ligne est interrompue, sans possibilité de contournement. Pour nous, c’est le problème le plus grave, qui ne peut pas être résolu. Le nombre de places assises est aussi un problème aux heures de pointe, mais il n’est pas spécifique à Lausanne-Genève. On le rencontre aux abords de toutes les grandes agglomérations.
Allez-vous appliquer des tarifs différenciés?
On va forcément y arriver. Mais il ne faut pas en attendre un changement des habitudes des pendulaires. Cette mesure s’adresse plutôt à une nouvelle clientèle qui peut partir plus tard parce que ça coûte meilleur marché. Ça ne touchera guère Lausanne-Genève où les pendulaires forment l’essentiel de la clientèle.
Quel est votre pouvoir pour faire avancer la troisième voie?
Notre rôle est de préparer les études pour l’Office fédéral des transports qui planifie et arbitre. Le désavantage de la troisième voie est qu’elle n’induit pas d’effet réseau sur l’ensemble du système ferroviaire. Même si elle est très importante pour la région. Notre position est qu’il est possible d’absorber la croissance du trafic dans les années à venir et que la troisième voie sera indispensable à l’horizon 2020-2030.
Comment se présentera-t-elle?
Le risque, si on construit la troisième voie tout de suite, c’est de la faire au mauvais endroit. Sur cet axe, notre objectif est d’accélérer le temps de parcours entre Lausanne et Berne. Il faudra en tenir compte pour déterminer la position idéale des tronçons à trois, quatre voire cinq voies que nous voulons construire. Car poser une troisième voie sur toute la ligne serait une aberration. Il vaut mieux raisonner en termes de croisements et de séparation du trafic.
Quelles sont les solutions dans l’immédiat?
Nous allons engager systématiquement des Intercity à deux niveaux. En trafic régional également, des trains à deux étages seront introduits. Nous comptons aussi sur l’OFT qui doit différencier le prix des sillons (ndlr: droit de passage sur la voie) pour inciter le trafic marchandises à circuler aux heures creuses.
Qu’en attendez-vous?
Le potentiel d’augmentation est de 30 à 40%. C’est beaucoup mais ça dépendra de l’évolution du trafic. Actuellement, la croissance est de 7% par an!
"Le miel coule dans les oreilles romandes". Le Temps nous a raconté jeudi une belle histoire d"amours ferroviaires sur la ligne Lausanne-Genève" où l'officialité alémanique concédait l'urgence - toute relative on est en Suisse - de la 3e voie CFF. Le gratin politique de la mobilité romande s'est donc assis dans un train d'époque pour commémorer les 150 ans de la ligne Lausanne Genève (ici et là). Le convoi est allé jusqu'à La Plaine, gare terminus! Non sans faire escale à Satigny, histoire de déguster quelque rouille du sieur de Châteauvieux. Au dessert, on a parlé donc parlé de la troisième voie. Le lendemain, la Tribune qui avait boudé l'événement a raconté une matinée du patron des CFF au contact des pendulaires. Au ras du ballast.