Le pont de Genève en 2030? (11/04/2011)
Philippe Joye voulait inaugurer son pont des Nations le 1er juin 2015, à l'occasion du 200e anniversaire de l'ancrage de la République et canton de Genève à la Suisse. Dans l'Illustré du 19 octobre dernier, l'ancien Conseiller d'Etat assurait même avoir trouver les quatre milliards nécessaires à la réalisation de l'ouvrage. Il faudra, selon le rapport du Conseil d'Etat dévoilé ce matin par Mark Muller, quinze ans de plus. Pour réaliser un projet qui paraît, en première analyse, très incomplet et risque de ce fait de ne jamais voir le jour. [Lire le communiqué de presse de Mark Muller ici]
Comment accepter de payer trois milliards - si on a utilisé la même règle de calcul que celle du CEVA lors du vote du premier crédit en juin 2002, on peut ajouter sans crainte un à deux milliards à la facture - pour un tracé uniquement routier, alors qu'à l'évidence il faut associer un train à cette traversée même si techniquement la pente entre le sommet du pont et le tunnel sous Cologny risque d'interdire cette option.
Comment accepter un projet qui prévoit un raccordement au réseau autoroutier français au terme d'une épingle à cheveux souterraine sans doute originale mais assez problématique. Il est vrai qu'on n'en est qu'au stade de l'intention et que le glacier du Rhône aura fondu un peu plus...
En trois ans, le ministre des infrastructures - et le Conseil d'Etat que Mark Muller n'a pas invité à la conférence de presse de ce matin - n'a donc été en mesure de prendre suffisamment langue ni avec l'Office fédéral des routes, qui est désormais seul maître en matière de routes nationales, ni avec les Français. Pourtant c'est Berne qui paiera la facture. Pourtant, depuis des lustres, l'Etat de Genève trace des plans avec les autorités vaudoises et françaises pour accueillir 265'000 nouveaux habitants d'ici 2030 dans la région, promet d'installer des trams transfrontaliers et se félicite de consulter à tout va dans le cadre du projet d'agglomération franco-valdo genevois. Certes il annonce l'inscription du futur pont dans le projet Agglo II qui doit être signé en juin 2012. C'est la moindre des choses, tant un ouvrage de cette nature est structurant et aurait dû figurer déjà dans Agglo I.
Comment accepter un rapport, qui se préoccupe de préserver la nature (le projet empiète "sur l'entité paysagère et agricole à protéger de la Haute Seymaz, à faible distance du marais renaturé de Rouelbeau et du site classé des ruines du château") et évoque déjà le recyclage des déchets, alors que l'enjeu majeur est l'impulsion urbanistique de toute la région Arve et Lac et même de tout le Chablais savoyard? Chacun sait qu'une nouvelle infrastructure de transport crée une formidable propension à construire à l'intérieur du périmètre et aux carrefours.
Comment accepter un rapport qui, sans doute délestera, le centre-ville et le dernier pont construit sur le lac - celui de l'ingénieur Guillaume Henri Dufour - sans annoncer une forte réduction de la circulation routière sur les quais et sur le pont du Mont-Blanc?
Comment poser des cartes de trafic automobile en 2030, sans prendre l'élémentaire précaution de présenter simultanément le réseau ferré (grandes lignes, RER et trams) et sa fréquentation?
Bien d'autres questions restent sans réponse en l'état. Sans doute le rapport du Conseil d'Etat qui a coûté 3,5 millions et pris trois ans pour être établi donne-t-il quelques clés. A suivre donc!
[cliquez sur les images pour les agrandir. La photo montage est tirée du blog de Philippe Joye http://babar2.blog.tdg.ch les plans ci-dessus du dossier de presse de ce matin]
12:33 | Tags : traversée du lac, pont sur la rade | Lien permanent | Commentaires (15)
Commentaires
pffff en attendant le pont du mont blanc reste bouchoné du matin au soir ........ d'ici 2030 j'imagine meme pas, à croire que la suisse est vraiment incompetante, dans nimporte quelle autre pays ca ferait longtemps que ce serait finis.... pourquoi ne pas accepter l'offre du quatar?
Écrit par : geneva | 11/04/2011
Quel petit jeu politicien ridicule et quel désespoir surtout de voir autant de réactions négatives quand on considère l'état lamentable de la circulation à Genève. Je me fiche de savoir si c'est la droite ou la gauche, un libéral ou un UDC, je me fiche de savoir si on met la charrue avant les boeufs ou les boeufs avant la charrue. Je pense que je fais partie des milliers (dizaines? centaines?) de genevois qui attendent une solution pour désengorger le centre-ville, et ce ne sont pas de tels propos qui vont solutionner le problème.
Écrit par : Alge | 11/04/2011
Il est tout à fait étonnant qu'à 15h, la grosse grosse bêtise que vous avez dénoncée ce matin figure toujours sur le site de l'Etat, qui mentionne que le peuple a refusé le principe d'une traversée en 1988 alors qu'elle avait été acceptée à une majorité des deux tiers, et reste toujours valable !
Malveillance ou étourderie ?
Écrit par : Séraphin Lampion | 11/04/2011
C'est rectifié. Voir http://etat.geneve.ch/dt/mobilite/traversee_lac-754-4458-10968.html
Écrit par : Laurent Forestier | 11/04/2011
Si M. Mabut s'était donné la peine d'assister à la conférence de presse de ce matin (http://www.ge.ch/dcti/presse/2011-04-11_conf.pdf), voire de lire le rapport complet (http://www.ge.ch/dcti/presse/2011-04-11_conf_annexe.pdf), il se serait rendu compte par lui-même que l'analyse n'est de loin pas "très incomplète", comme il le prétend.
Si M. Mabut s'était donné la peine d'assister à la conférence de presse de ce matin, il aurait appris qu'il n'est pas question que la Traversée du lac finisse en cul de sac aux Communaux d'Ambilly, mais que le Canton n'est pas autorisé à faire des études portant au-dela de son territoire - à l'inverse de la Confédération. Le raccordement au réseau autoroutier français est envisagé - et même souhaité !- par Genève.
Si M. Mabut s'était donné la peine d'assister à la conférence de presse de ce matin, il aurait appris appris que le Conseil d'Etat a pris langue avec l'Office fédéral des routes - il a même écrit à la conseillère fédérale Doris Leuthard.
Si M. Mabut s'était donné la peine d'assister à la conférence de presse de ce matin, il aurait appris que le rapport a bel et bien examiné l'impact de la traversée du lac en terme de charge automobile: -30% sur le pont du Mont-Blanc.
Enfin, en tant qu'ancien haut fonctionnaire de l'Etat de Genève, M. Mabut sait parfaitement que même si telle avait été sa volonté, le conseiller d'Etat Mark Muller n'aurait pas pu tenir éloignés ses collègues du Conseil d'Etat de la conférence de presse. Celle-ci ayant été annoncée jeudi dernier lors du point de presse hebdomadaire du gouvernement, les autres magistrats auraient pu s'y joindre s'ils l'avaient jugé utile.
Le rapport du Conseil d'Etat donne quelques clés, en effet. Encore faut-il vouloir en prendre connaissance, même si cela prend un certain temps (199 pages!).
Bonne lecture...
Écrit par : Laurent Forestier | 11/04/2011
Mon cher Laurent, restons zen.
Je vais lire le rapport de 199 pages, sauf que le lien proposé dans ton commentaire ne m'envoie pas au bon endroit. Peut-être aurais-je dû en demander une version sous embargo. Je me suis en effet à ce stade contenté de réagir au communiqué de presse, que chaque citoyen peut lire rapidement.
Il faudra donc m'expliquer pourquoi depuis plus de six ans le canton produit moults rapports et autant de plans dans le cadre du projet d'agglomération franco-valdo-genevois (lequel possède un site internet fort intéressant et plein d'informations). Il est donc possible de dessiner des trams jusqu'à Ferney, St Genis, St-Julien et Annemasse (sans parler du CEVA qui, comme chacun sait s'arrête au Foron), mais en matière autoroutière, il faudrait rester confiner dans les limites du canton?
Justement parlons-en de l'OFrou qui n'était pas présent ce matin, alors que c'est la Confédération qui détient les clés et les financements de la traversée du lac à moins d'envisager,je n'ose y croire, une simple route cantonale?
Je suis bien le dernier à contester l'intérêt de la traversée du lac. Mais je crois que son adoption par les Genevois réclame une politique beaucoup plus intégrative qui permette à tous d'apprécier tous les avantages et tous les inconvénients d'un tel projet dans une perspective englobant tous les modes de transports. Les Genevois je crois ne se contenteront pas d'une réduction de 30% du trafic sur le pont du Mont-Blanc.
Evidemment je ne me prononcerai pas sur la question des savoir si le président du Conseil d'Etat aurait dû ou pas dû envoyer un bristol d'invitation à ses collègues Künzler et Unger ou attendre qu'ils s'invitent d'eux-mêmes...
A tout bientôt
Écrit par : JF Mabut | 11/04/2011
PS: j'ai trouvé le rapport. Et je me mets à sa lecture.
Écrit par : JF Mabut | 11/04/2011
que quelques mot a dire: bougez vous le cul, 15 ans pour un pont (et depuis le temps qu'onen parle....) , on aura tout vu, dubai construit the world en moins de temps !!!!
Écrit par : lente suisse... | 11/04/2011
Je pense que les diagrammes que vous avez mis au bas de votre article parlent d'eux-mêmes. Le déplacement de charge permettra de libérer le centre-ville et de décharger l'autoroute de contournement. (d'ailleurs pas besoin de diagramme pour comprendre cela, on le sait intuitivement depuis des décennies !) Et le rapport mentionne bien des mesures d'accompagnement pour réduire le trafic en ville. On va enfin rendre le centre-ville plus accueillant. N'en déplaise à l'ATE qui continue à prétendre que la traversée augmentera le trafic au centre-ville ! (autrement dit, permettez aux gens d'éviter le centre, et ils y iront tout de même juste pour s'amuser à provoquer des embouteillages, car ils n'ont rien d'autre à faire dans leur vie...)
2030 c'est loin. Mais si on me promettait que cette date est définitive, je signerais sans hésiter. Hélas, je n'y crois pas trop. Ici c'est le pays de la Genferei. Il y aura bien quelqu'un pour s'amuser à retarder ce projet...
Concernant les responsabilités, le Conseil d'Etat voulant inscrire l'ouvrage parmi les routes nationales, il deviendra de la responsabilité de la Confédération. Ca sera donc à cette dernière de négocier avec la France. Je pense que Genève a plus son mot à dire quand il s'agit d'infrastructure urbaines. Par exemple pour les trams. Pour ce qui est du CEVA, infrastructure ferroviaire et donc aussi nationale, à ma connaissance c'est bien la Confédération qui négocie avec la France.
Mais ce qui risque d'être très amusant, c'est que ce projet ne tient pas compte de la volonté de la commune de Gaillard de transformer le tronçon d'autoroute reliant la douane de Vallard à l'échangeur d'Etrambières en boulevard urbain ! Cette belle traversée risque bien de déboucher sur un cul-de-sac !!!
Écrit par : Kad | 11/04/2011
@JMF : Veuillez avoir l'obligeance de corriger votre lien vers ce rapport de 199 pages, car il y a ), en trop.
http://www.ge.ch/dcti/presse/2011-04-11_conf_annexe.pdf
Comme ça les autres pourront aussi le lire...
Merci
Écrit par : Lyonnais du 69 | 11/04/2011
Autre chose: il ne me semble pas que le rapport mentionne une augmentation de capacité de l'autoroute A1. Pourtant je pense qu'une mise sur 2x3 voies de l'autouroute entre l'échangeur du Vengeron et Nyon serait une mesure complémentaire absolument nécessaire pour pouvoir absorber un trafic plus important venant des deux contournements de Genève.
Écrit par : Kad | 11/04/2011
Ravi de constater que M. Mabut a quelque peu réadapté son texte suite à mon précédant commentaire...
Écrit par : Laurent Forestier | 11/04/2011
Manifestement mal parti. La jonction avec la France c'est bien joli, mais avec la Suisse ?
Pour la jonction avec la France, il apparaît, au vu des flux prévus en 2030, que la section Puplinge-Vallard/Gaillard n'a pas lieu d'être. Les faibles flux que ce tronçon est destiné à absorber, et qui pourrait bien déboucher sur rien dès lors que la France envisage de supprimer l'autoroute à Gaillard, peuvent être aisément absorbé par l'autoroute de contournement actuelle. Ce qui est importe c'est le dégagement sur le Chablais (Thonon). Les flux y sont plus importants que sur Vallard. Peut-être est-ce dû à ce que les français n'ont rien prévu. Un peut comme le CEVA, qui n'est pas financé entre la frontière et Annemasse et ou rien ne se fera au delà d'Annemasse en direction du pied du Salève, de Thonon et de la Vallée de l'Arve, tant il est vrai que l'Agglo veut, sous l'impulsion du Mouvement citoyen du genevois français (AV), imposer sa volonté et prendre le pouvoir politique à Genève (Suisse).
Par contre, Genève est en Suisse et la mini-mégapole lémanique a, contrairement à l'arrière pays européen genevois, de l'avenir et pourrait être un paradis de l'emploi à haute valeur ajoutée, soit assurer la prosperité des habitants de ce pays. Mais pour cela, encore faut-il développer les transports sur tout l'arc lémanique.
Ne pas aller en Suisse au delà du Vengeron, c'est pitoyable.
Manifestement mal parti. Seule une modification de la Constitution fédérale permettra de lever les obstacles juridiques, financiers, et de politiques cantonales qui s'opposent à une vue d'ensemble.
Écrit par : CEDH | 12/04/2011
Et pourquoi pas une chaussée flottante avec 5 ferrys rapides, 2 de chaque côté et un de réserve ???
Écrit par : Dalmuti | 13/04/2011
2030 ça paraît loin... Quand on voit que certains ponts sont construits beaucoup plus rapidement...
Ce pont est vraiment important, ce qui me gêne: "raccordement au réseau autoroutier français au terme d'une épingle à cheveux souterraine" ...
Enfin pour l'instant rien de concret attendons un peu
Écrit par : pont re | 24/05/2011