Le quatrième pouvoir est-il bon pour la tête? (30/11/2018)

barazzone savary.jpgLe quatrième pouvoir a-t-il contraint Guillaume Barazzone aujourd'hui, Géraldine Savary hier, x, y et z demain, à ne pas solliciter un nouveau mandat politique? Non. C'est accorder bien des pouvoirs aux médias professionnels (ou traditionnels). Les pressions sont venues d'ailleurs et bien souvent des partis même, dont ces politiciens ont été (et seront peut-être un jour) les porte-drapeau. Et leur décision, je veux le croire, ressort de leur propre examen de conscience.

Politiquement, ces deux personnalités étaient devenues des poids morts, des risques trop importants pour leur parti respectif. La sanction qu'elles s'infligent peut paraître lourde mais elle s'impose et permet de remettre les compteurs à zéro. Elles en tireront même un avantage car c'est une vertu que de reconnaître son erreur. Leur acte sert de jalon. On leur en saura gré.

Qui pouvait imaginer - à l'exception des partis concurrents - que le conseiller national Barazzone, ci-devant co-maire de la Ville de Genève, puisse conduire la liste du PDC l'automne prochain pour les élections fédérales et au printemps 2020 pour la Mairie de la Ville? Celui qui, il y a peu encore, était pressenti pour le Conseil des Etats a sagement tiré les conséquences de ses notes de frais dispendieuses. C'est tout à son honneur. On espère que les autres élus en délicatesse sauront en tirer d'égales conclusions. 

“On ne fait pas de politique avec de la morale, mais on n'en fait pas davantage sans.”

La célèbre maxime de Malraux résume la situation. Elle dit aussi qu'il ne sert à rien d'attendre une éventuelle relaxe ou une condamnation par la justice, procédure longue et formelle derrière laquelle se réfugie trop de mes concitoyennes. C'est le contrat de confiance entre l'élu et la cité qui a été érodé au point que le retrait s'impose. Car la gouvernance d'une cité plus encore que celle d'une entreprise exige le respect des gouvernés pour leur gouvernement.

Ceci encore. Vilipender la presse - comme si casser ou cacher le thermomètre faisait descendre la fièvre - ne relève pas d'un comportement citoyen. Soyez heureux, au contraire, citoyens de Genève, d'avoir (encore?) une presse qui a le courage et la liberté d'informer. 

Jusqu'à présent ce sont en effet les journaux professionnels (traditionnels) - et singulièrement mon journal préféré - qui ont enquêté, recueilli les déclarations, recoupé les faits, démonté la fake news dont celle fabriquée par l'un des élus mis en cause, résisté aux pressions, offert aux lecteurs de larges espaces pour qu'ils puissent exprimer leur point de vue. 

Les blogs et les réseaux sociaux ont colporté leur lot de commentaire. Ils ont aussi contribué à cette liberté d'expression que nous plaçons au faîte de nos droits humains (surtout quand elle concerne les autres). 

On saluera donc la prochaine naissance annoncée de heidi.news. On lui souhaite d'avoir les moyens de ses ambitions. Mais on doute que la souscription publique suffise à lui assurer les ressources et la pérennité nécessaire. Trop d'autres canards vivotent dans leur niche qui démontrent l'implacable loi du marché. Car ce qui compte, c'est de conquérir un large lectorat fidèle, constant et surtout payant. 

"Bon pour la tête", phénix en ligne de l'Hebdo, a bien de la peine à être à la hauteur de son ambition affichée de journal indocile. Bpt va bientôt boucler sa première année. Sa rédaction publiera-t-elle un bilan? 

Republik, l'autre tentative éditoriale née en 2018 outre-Sarine qui revendique 20'000 co-éditeurs (dont la moitié à Zurich et 70 à Genève), a publié début octobre son premier rapport annuel d'activités pour la période janvier-juin 2018 (43 pages ici). 

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