Le maire de Genève et la Tribune de Genève (07/09/2018)
Qui snobe qui? La question se pose à la lecture du programme #Actmedia, un raout médiatico-politique sur le thème - ô combien d'actualité - "quels journalistes demain au service de nos princes régnants", que le musée d'ethnographie - le lieu en dit long sur le quoi, le pour quoi et l'avenir plombé de la presse - accueille vendredi prochain 14 septembre. La question se pose car le nom du principal quotidien de Genève n'y figure pas. La Tribune aurait-elle déjà disparu des écrans radar de notre bon ministre de la Culture et maire éphémère de notre bonne ville de Genève? L'enquête est en cours.
De mauvaises langues notent qu'en fait le rédacteur en chef du quotidien de la rue des Rois sera bien présent en la personne d'Ariane Dayer, rédactrice en chef Tamedia. Et voilà.
Que nous promet donc cet hackathon * de la presse régionale?
Un ex-rédacteur en chef (du Courrier de Genève) esquisse en 30 pages un futur assez brouillardeux, un peu usine à gaz, sans jamais se demander pourquoi les lecteurs, surtout les jeunes, sont aux abonnés absents.
On pourra bien mettre sur pied des infrastructures communes, à coup d'argent public, pérorer sur l'art et la manière de faire du bon journalisme, critique, indépendant, etc, on ne sauvera pas les journaux tant qu'on n'aura pas répondu à la question des lecteurs (surtout ceux précieux qui veulent bien s'abonner ou acheter au numéro ou à l'article).
Où sont-ils donc passés?
Les réponses sont multiples.
Plus d'intérêt. En marge de l'affaire Maudet, Florence Kraft-Babel, une blogueuse hélas trop épisodique, en donne une qu'il ne vaut pas ignorer (encore qu'elle se trompe de prince). Elles s'en prend à cette presse qui dégomme Pierre Maudet et ne nous dit rien du charmant prince émirati. Un autre blogueur, Maurice Gardiol, met en regard l'affaire Maudet et la décision du conseil fédéral de libéraliser les ventes d'armes. La leçon que je tire est que les lecteurs prennent leur distance car le choix des nouvelles et leur traitement les dépriment ou ne les rassurent pas. Les lecteurs ont besoin d'être réenchanter. Nos téléjounaux s'y emploient. Ils montrent de moins en moins la guerre ou la misère et occupent leur temps d'antenne avec des reportages bien de chez nous, sans aspérités, sans critiques, onctueux comme des yaourt bio nature, à l'image des publicités qui les encadrent et nous persuadent que l'agriculture, c'est l'histoire de Martine à la ferme. Le prie dans le genre, c'est Couleurs locales, le journal régional de notre chère RTS.
Plus le temps Les lecteurs passent de plus en plus de temps dans les transports et n'ont pas la place d'y déployer la Tribune qui devrait - mais c'est sans doute trop tard - adopter le format de 20 Minutes.
Stressés. Les gens et familles souvent multirecomposés consacrent beaucoup de temps et d'énergie à leur vie (sans parler du boulot), c'est tout ça que l'on retranche sur le sommeil et la lecture des quotidiens.
Oû ai-je la tête? Les divertissements divers sont nombreux. Bien sûr, il y a les réseaux sociaux, les chats, le boulot encore, et Monsieur le maire n'est pas pour rien dans la foultitude de sorties et autres événements que sa bonne ville propose aux quidams en mal d'occupation. Encore du temps pris à la lecture des quotidiens.
Bougillons Et puis le monde ne s'arrête pas aux frontières de la ville de Genève (invisibles) ni à celles du canton (qu'on franchit sans contrôle) et EasyJet est à un saut de puce pour s'envoler trois jours ici et là pour bien moins que l'abonnement annuel à un quotidien.
Racines. Lles Genevois dont plus de la moitié sont étrangers (il faut encore ajouter un quart de confédérés) s'enracinent dans plusieurs potagers, le genevois, le frontaliers, le portugais, l'espagnol, l'italien, l'albanais, etc et parfois plusieurs quand les familles composées et recomposées ignorent elles-aussi les frontières. Ah l'amour sans frontière... Naguère on voyait cette variété aux antennes paraboliques accrochées aux balcons. Aujourd'hui le petit smartphone est polyglotte et lui aussi sans frontière. Encore du temps perdu pour les quotidiens.
On continue?
* Un hackathon, pourquoi pas un brainstorming ou mieux un remue-méninges? L'hackathon est sans doute plus branché et renvoie au mythe qu'on peut réaliser des trucs qui sauvent avec un peu de bonne volonté et un zeste de génie, bref ça ressemble furieusement à la Pat Patrouille qui fait fureur chez les 3-4 ans.
07:26 | Lien permanent | Commentaires (1)
Commentaires
L'avenir de la presse ? Le journalisme d'investigation. Donc, bravo pour votre insistance et le suivi du feuilleton Maudet.
Écrit par : Hubacher | 08/09/2018