Robert Ducret, les années faciles (01/10/2017)

robert ducret rts.pngRobert Ducret est mort jeudi à 90 ans. Il était contemporain de mon père avec qui il avait siégé au Grand Conseil. L'un était commerçant de combustible à Carouge, l'autre paysan à Bardonnex. Deux chefs de très petites entreprises, TPE comme on dit aujourd'hui, deux indépendants avec une fibre sociale développée.

Chacun était assez emblématique de ces artisans et paysans genevois. Ils ont contribué à faire la Genève de la second moitié du XXe siècle. L'un était radical, l'autre chrétien-social, deux partis qui ont disparu, l'un avalé par l'esprit libéral, l'autre par la démocratie-chrétienne, un parti entre deux, faute d'avoir la force d'être en avant. 

Je garde de Robert Ducret, comme Pascal Décaillet, le souvenir d'un politicien proche des gens et toujours prêt à répondre aux journalistes. Ce fut un ministre des finances respecté sans grandes histoires, favorisé par la conjoncture*.  

Deux souvenirs me reviennent.

Dans les années 80, le canton faisait régulièrement des bénéfices. On mettait un mois à boucler le budget, lequel était voté sans grande tension. L'Etat pouvait être généreux alors. On l'a payé cher tout de suite après. Quand la bulle immobilière genevois sauta à la fin des années 80 et précipita le canton dans une décennie de chiffres rouges. Plus rouges que le déficit annoncé pour 2018. Mais la dette était encore modeste et étaient largement couvertes par des actifs qu'on amortissaient rapidement. 

L'autre souvenir concerne la fiscalité communale. Vers la fin de son mandat, Robert Ducret consentit à supprimer la progression à froid. La progression à froid c'était le fait que les impôts augmentaient à cause de l'inflation qui faisait gonfler les revenus alors que les barèmes d'impôt n'étaient pas indexés. Ainsi sans que leur pouvoir d'achat n'augmente les Genevois voyaient leur facture fiscale augmenter. Robert Ducret en a beaucoup profité.

A l'époque, il y a avait un impôt cantonal perçu sur les hauts revenus qui ne donnait pas lieu à une taxation communale. Pour simplifier le système, cet impôt sur les hauts revenus a été fusionné avec le barème général qui allait désormais être indexé. Globalement la charge fiscale n'a pas augmenté mais les communes où logeaient ces riches contribuables ont soudain vu leur budget augmenter car ces hauts revenus étaient soumis désormais aux centimes additionnels communaux. Le canton faisant alors des bénéfices perdit quelque 35 millions si ma mémoire est bonne, soit 1% de ses recettes fiscales au profit de ces communes.

Je rappelle ce fait car je défends l'idée de rétablir un impôt cantonal et uniquement cantonal sur les hauts revenus. En fait, je suis convaincu que nous ne parviendrons pas à simplifier la fiscalité communale et le système péréquatif actuel hypercomplexe si nous ne distinguons pas les très haut revenu des autres. 

J'ai  exposé dans ce blog à plusieurs reprises cette question. Et je ne la développerai pas ici. 

annees ducret.pngRobert Ducret était un self-made man, un peu comme Luc Barthassat. 40 ans les séparent, mais Luc Barthassat aborde sa fonction de conseiller d'Etat comme son aîné. Avec beaucoup de bon sens, le souci de l'efficacité et de l'économie et la volonté de ne pas se laisser enfermer dans les normes et les règlements. C'est beaucoup plus difficile aujourd'hui que dans les années 80. L'Entente genevoise dominait alors largement le Grand Conseil.

 

 

* De 1985 à 1989 (L'OCSTAT ne fournit pas de données avant 1985), les comptes de l'Etat de Genève passent de 2,8 à 3,8 milliards de charges par an, soit une hausse sur la période de 1 milliard soit +36%, soutenue par des revenus presque aussi dynamiques (+760 millions soit +25%). Les investissements, qui augmentent  ou entretiennent les infrastructures publiques du canton, augmentent de 2 milliards. Quant à la dette, elle croît de 2,8 à presque 3,8 milliards. Les belles années.

 

Sur la réforme fiscale communale:

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La fiscalité au lieu de domicile n'est pas une bonne idée

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