Cornavin: les millions de l'erreur originelle du CEVA (24/09/2016)
Qui se souvient qu'en juin 2002, par une journée caniculaire annonciatrice de vacances, le Grand Conseil genevois vota la loi 8719, qui ouvrait un crédit de 400,8 millions? C'était la part cantonale pour la construction du raccordement ferroviaire entre La Praille et les Eaux-Vives et l'adaptation des voies existantes entre Cornavin et la frontière suisse vers Annemasse, un chantier, le CEVA, devisé alors à 941 millions?
Sept ans plus tard, alors qu'aucun travaux n'avaient réellement été engagés, la facture genevoise s'allongea de 113 millions, officiellement en raison du renchérissement et de quelques adaptations de sécurité, que les nombreuses études préalables n'avaient pas dépistés... Le devis total avait bondi de 941 à 1,45 milliard: + 50,4%!
Jeudi 23 septembre 2016, le Grand Conseil a voté la loi 11912, qui ouvre un crédit de 425 millions de francs pour créer deux voies sous l'actuelle gare de Cornavin, un ouvrage, pompeusement baptisé noeud ferroviaire de Genève, devisé à 1,65 milliard de francs. Ce crédit couvre-t-il tout ou, comme celui de 2002, va-t-on au-devant d'une grosse rallonge, juste avant l'ouverture du chantier prévue en 2024?
Et ce n'est pas fini, car le noeud n'est pas complet. En effet, ni le tracé du CEVA conçu au XIXe siècle et copié-collé tel quel en 2002 ni le nouveau crédit ne supprime le cul de sac de Cointrin.
Une simple carte montre que le CEVA tourne tout simplement à l'envers. (cliquer sur la carte pour l'agrandir. En venant de Lausanne, les trains circulent à Cornavin, Cointrin puis traversent le lac et sont dans le bons sens pour desservir Annemasse, la vallée de l'Arve, le pied du Salève et Annecy. ça marche dans les deux sens. Une circulation que ne permet pas le CEVA)
Il aurait fallu, à la fin des années 90, quand on eut fini de penser barreau sud* via Bardonnex ou Bossey et métro sous les Rues basses, repenser le RER en fonction de la ville actuelle et à venir plutôt que de s'enferrer à construire la liaison Cornavin Eaux-Vives de 1912 (En 1912, la gare de La Praille n'était même pas pensée. On la conçu et construit dans cette cuvette maraîchère bien plus tard et à cet endroit pour une seule raison, connecter le rail au canal du Rhône au Rhin à la Queue d'Arve...).
Un pont sur le lac où aurait circuler les voitures et le train aurait sans doute réduit les coûts totaux et offert à Genève une circulation ferroviaire et routière bien meilleure.
Cette option n'a jamais été étudiée pour la simple (et sans doute bonne raison) qu'au moment où les autorités genevoises ont ressorti des cartons le projet Cornavin-Eaux-Vives de 1912, il comptait bien contraindre les CFF qui n'en voulaient pas à payer la part de 60%, à laquelle la toute jeune régie fédérale d'alors s'était alors engagée. En fait, le financement fédéral est tombé du premier crédit d'infrastructure des agglomérations qui prévoyait des clés de financement presque aussi généreuses.
A une meilleure desserte et de Cointrin et de Cornavin et d'Annemasse et de Chamonix, la liaison par un pont sur la rade aurait aussi permis d'envisager d'autres extensions du réseau ferroviaire régional, notamment
- la gare de Colovrex imaginée par l'architecte Charles Pictet (et là),
- la liaison vers un nouveau sillon ferroviaire en direction de Lausanne et de la Suisse le long de l'autoroute, réservant la ligne du lac au RER,
- le contournement des trains marchandises par le nord de l'aéroport,
- le raccordement à la voie ferrée du Pays de Gex...
On rappellera aussi le projet d'un autre architecte, Marcellin Barthassat qui voulait relier le Pays de Gex à Saint-Julien et à La Praille.
Pour la petite histoire, savez-vous combien de vélos électriques, on peut se payer avec le budget du CEVA?
Tout ça est lié au projet d'agglo franco-valdo-genevois, qui a disparu des radars médiatiques depuis qu'il s'est appelé Grand Genève.
PS: la carte qui illustre ce billet a été publié dans ce blog en 2008 sur la base du premier projet d'agglo franco-valdo genevois qui déjà prévoyait la raquette permettant de supprimer le cul de sac de Cointrin. Un projet qui semble abandonné aujourd'hui.
Ici d'autres liens relatifs au CEVA sur le blog metropolegeneve.blog.tdg.ch.
A lire aussi sur Wikipedia: CEVA un projet qui remonte à 1850.
Et sur le site de l'Etat de Genève: le chemin de fer dans le canton de Genève par Benedickt Frommel
19:44 | Lien permanent | Commentaires (4)
Commentaires
Il y a peut-être toujours mieux, et toujours plein d'idées de plein de gens.
Mais moi je trouve que faire continuer les trains de Cornavin via Lancy en quelques minutes (je le fais souvent), puis Carouge, Champel et les 10'000 employés des HUG et leur visiteurs, les Eaux-Vives, Chêne-Bourg et tout cela en 20 minutes, est fantastique.
S'y rajoutent bien sûr les connexions à tout le réseau français et les 60 gares du coin.
Notez bien que des boucles ferroviaires comme vous l'entendez et comme l'on nous a beaucoup parlé dans ces colonnes ont des inconvénients incommensurables pour l'horaire cadencé suisse, où qu'elle se trouvent.
De plus, les trains en fins de ligne ont un battement qui leur permet de rattraper un éventuel retard, au contraire de s'ils devaient continuer en permanence à rouler dans les boucles pour suivre leur chemin.
Écrit par : JDJ | 24/09/2016
Ce qui est certain, le CEVA ne diminuera pas la circulation à Genève...
Toutes les ouvertures créées dans le monde, pour la circulation de personnes et de biens ont conduits à amener plus de visiteurs et d'immigrants...
Et ceci est la seule véritable volonté des dirigeants... au détriment des citoyens... pour leur garantir la tranquillité, une certaine qualité de vie...
Écrit par : Patrick Cherpillod | 25/09/2016
@ Cherpillod : Non bien entendu, lorsque l'on pourra aller d'Annemasse ou Chênes-Bourg à Cornavin en 20 minutes, en se laissant glisser, ou des Eaux-Vives aux quais de Cornavin en 10, personne ne laissera sa voiture, bien entendu. Ni de Nyon ou Versoix aux HUG, on est bien d'accord.
Écrit par : JDJ | 25/09/2016
Il est pour moi inconcevable de traiter ce sujet sans faire référence aux travaux de l'ingénieur Weibel. Le silence qui les entoure est devenu assourdissant et la presse nous fait la démonstration de son inféodation au pouvoir et à des intérêts particuliers inavouables se tirant ainsi une balle dans le pied. Il ne faudra pas attendre de la compassion d'un lectorat las et désabusé.
Écrit par : Pierre Jenni | 28/09/2016