Fédérales 2015: les limites du débat démocratique (29/10/2015)

image.jpegQui a gagné le débat de la Tribune?

Le duo rose-vert sortant, Maury Pasquier-Cramer, qui semblait fatigué autant l'un que l'autre,  tous les deux sont restés assis, presque avachis sur leur chaise devant un amphithéâtre au deux tiers plein.

Le candidat PLR Genecand, cible des deux autres bords, qui a joué une (trop) fine partition centrale et pédagogique?

Ou les deux trublions des partis de la fermeture, des "y en n'a point comme nous" et des "nous allons faire entendre à Bruxelles et aux potentats de par le monde de quel bois on se chauffe", j'ai nommé le fielleux Nidegger et le démagogue Stauffer.

Match nul? Démonstration que le débat démocratique est un art redoutable.

Mais quand donc les professeurs en science politique nombreux de l'Universté qui nous accueillait deviendront-ils des ingénieurs capables d'offrif à la démocratie des outils efficaces?

On ne pouvait évidemment pas parler de tout. On n'a donc pas parlé de la défense du pays contre les nouvelles menaces (sécurité des donnés, terrorisme, régulation mondiale via les institutions multilatérales très représentées à Genève, vieillissement de la population suisse et européenne, pression sur l'environnement et sur les ressources, trafic de drogue, d'armes, d'êtres humains...)

On n'a pas parlé non plus du financement de la santé (assurance maladie, fin de vie,...) ni d'aucun financement d'ailleurs sauf celui de l'AVS. On n'a pas pas parlé de Tisa ni d'un possible accord de libre échange avec les Etats-Unis qui mobilise l'extrême gauche, absente du podium. On n'a pas parlé de l'alimentation, des régions, du tourisme.  On n'a pas parlé de l'aménagement du territoire. On n'a pas parlé de l'énergie. On n'a pas parlé de la réforme du collège sur le modèle des HES, du financement des médias, etc.

 

Traversée du lac: pauvre Genève, tu ne l'auras pas, seul le PLR la soutient

Niveau de complexité du sujet: faible

Capacité de compréhension du public: honnête 

Capacité des débataires d'être compris: pas terrible, personne ne situe le projet dans un contexte européen

Le plus convaincant: Cramer

Cramer tacle d'emblée Genecand sur la traversée du lac. Il dénonce l'idée que le gouvernement genevois n'airait rien fait pour la traversée du lac, explique avec véhémence, presque colère, que Genève n'a toujours pas compris comment séduire Berne, qu'il faut juste accepter le fait que Berne a décidé, pour des questions de coût et de faisabilité, d'ajouter deux voies à l'autoroute de contournement. Personne ne s'est demandé si cette affirmation allait connecter la rive gauche à la Suisse et exploiter correctement le réseau autoroutier regional.

Nidegger se moque du PLR qui a sabordé la traversée de la rade de l'UDC et verra avec crainte sa propre initiative menacée par le peuple genevois.  Maury Pasquier se range derrière Cramer.

Tout est bon à prendre la rade, le lac la 3e voie, les pistes cyclables même. Stauffer slalom entre les piquets que tente de planter l'animateur, esquive la question mais ne manque pas de rappeler que Genveve est un canton contributeur net à la Suisse.

 

Disparition des avantages fiscaux: ne comptez pas sur la Chambres des cantons pour réduire la facture genevoise!

Niveau de complexité du sujet: très élevée 

Capacité de compréhension du public: très faible

Capacité des débataires d'être compris: nulle, exception Genecand

Le plus convaincant: Egalité Genecand Stauffer

Maury Pasquier rappelle que Geneve et les cantons qui profitent du régime actuel ne font pas le poids à la Chambre des cantons. Il faudra compter sur le Conseil national. 

Stauffer, président de la commission des finances du canton de Genève, rappelle à la gauche que la baisse fiscale dont les classes moyennes ont enfin pu profiter n'a en rien réduit les recettes de l'Etat de Genève. Baisser les impôts des entreprises à 13% sera un bienfait pour l'économie. Les PME en profiteront. Ce sont elles qui offrent le plus d'emplois. 

Cramer voit quelques marges de manœuvre, il évoque dans le secteur du shipping la taxe au tonnage, dont Berne ne veut pas parce qu'elle ne serait pas légale. Il constate que les Anglo-saxons et les Suisses alémaniques ont une culture de ne pas taxer les entreprises, ce n'est pas notre culture. 

Genecand tente d'expliquer la genèse du système fiscal à deux vitesses. Zurich a peu recouru au taux réduit pour attirer des entreprises étrangères. Vaud et Geneve l'ont beaucoup utilisé. Si vous remontez le taux à 24% - niveau d'imposition actuel des entreprises suisses -  et bien les entreprises étrangères partiront. C'est tout simple. Vaud a aussi abusé de ce système un peu toxique mais il a au moins su réduire sa dette. Nous pas. J'aimerais avoir la preuve que le taux de 13% est bien le meilleur compromis Pour conserver les multinationales et les emplois qu'elles offrent.

Nidegger est favorable à la baisse des impôts des entreprises, mais conteste que nos partenaires européens soient choqués, comme le dit Genecand, par l'inégalité de traitement. La difficulté, c'est que chaque canton à ses spécificités. Genève et Vaud sont dans le même panier mais ne font pas le poids à Berne. Il ne propose aucune solution pour sortir du piège.

 

Asile: formidable déni de réalité presque collectif

Niveau de complexité du sujet: simple

Capacité de compréhension du public: forte

Capacité des débataires d'être compris: bonne, mais personne n'a la solution et on assiste à un déni de réalité dans tous les camps ou presque

Le plus convaincant: Cramer et Genecand 

Répondant à Nidegger qui a esquivé la question sur l'accueil accru de Syriens en Suisse, Cramer se gausse en parlant des requérants d'asile informaticiens, financiers, scientifiques, ingénieurs que la Suisse accueille volontiers. Puis il se reprend. La situation est tragique pour beaucoup pour en rire. Il faut tout faire pour aider les pays de premiers accueil. La majeure partie des réfugiés ne part pas de gaité de cœur. Ils veulent rester chez eux Ou près de chez eux. La deuxième chose à faire est de rétablir le dépôt des demandes d'asile dans les ambassades afin de contourner les passeurs. Et puis favoriser l'accueil dans les familles suisses de ceux qui sont là et les intégrer rapidement sans contraindre les gens prêts à les héberger chez eux à devoir respecter des critères bureaucratiques, absurdes et à proprement dit inhumains. (Longs applaudissements)

Stauffer rappelle son credo sur le sujet: il faut tout faire pour fixer les gens près de la Syrie. Il faut aussi dénoncer les criminels qui gouvernent ces pays. Je l'ai fait six mois avant la chute du colonel Kadhafi et j'ai été l'objet d'une enquête pénale fédéral et de trois ans de prison. La diplomatie doit arrêter de se coucher devant les dictateurs. 

Maury Pasquier dénonce les baisses de crédit et constate qu'il faudra bien en prendre une parti chez nous pour soulager les pays du premier accueil.

Nidegger est pour le renvoi des requérants arrivés en Europe via un pays partie de l'accord de Dublin. Genecand aussi. Il est le seul à plaider la modestie face à un problème qui dépasse tout le monde. Sur le même mode que Stauffer, Nidegger dénonce les potentats du sud et parle d'un indice Mercedes qu'il prétend corrélé à l'aide au développement suisse.

Genecand avoue qu'il n'est pas prêt personnellement à accueillir un requérants et il est moins optimiste que Cramer qui pense que la population est prête en masse à accueillir des migrants et que le blocage ne serait qu'administratif. 

Stauffer joue sur les chiffres. Vous pouvez accueillir 10, 20, 30'000 personnes et que faites vous du million qui attend à nos portes. Il faut régler le problème à la source.

 

9 février: Fin des bilatérales, victoire des anti-européens

Niveau de complexité du sujet: élevé 

Capacité de compréhension du public: faible

Capacité des débataires d'être compris: plutôt bonne. 

Le plus convaincant: Nidegger et Genecand

Stauffer: L'Europe a fait des exceptions pour la Grande Bretagne et pour la Grèce. Nous sommes en négociations. Il faut faire comprendre à l'Union européenne notre position et les raisons qui sont les nôtres de rétablir des quotas de main-d'oeuvre, elle saura comprendre. C'est aussi son intérêt.

Genecand: La Suisse profite de 120 à 200 accords bilatéraux. Nous sommes 8 millions. Ils sont 500 millions. Je ne suis pas désespéré mais je ne vois pas Bruxelles prête à accepter les quotas. Il faudra sans doute revoter mais pas sur la même question. Commençons par mieux intégrer dans le marché du travail ceux qui sont là notamment les femmes toujours handicapées par les horaires scolaires. 

Nidegger joue sur les mots. Vous voulez revoter? Mais on a déjà revoté. Depuis février 2014, la majorité dit que l'UDC nous a mis dans une impasse, le 18 octobre les Suisses ont envoyé encore plus d'UDC sous la Coupole fédérale. C'est clair, non! En fait, la majorité ne veut pas admettre que les Suisses ne veulent pas entrer dans l'UE ni directement ni par des chemins de traverse. C'est un fait.

Cramer rétorque que le vote des Genevois doit déterminer l'action d'un conseiller aux États genevois à Berne qui a précisément pour rôle de faire en sorte que la libre circulation et les bilatérales ne soient pas mis à mal, comme l'ont souhaité plus de 61% des Genevois le 9 février 2014.

Maury Pasquier craint des répercutions sur la Geneve internationale. Nidegger le conteste absolument. La Geneve internationale existe depuis la Société des Nations en 1918 et n'a jamais eu besoin de la libre circulation pour fonctionner.

 

La réforme Berset de l'AVS: l'espoir fait vivre 

Niveau de complexité du sujet: complexe

Capacité de compréhension du public: honnête quoique

Capacité des débataires d'être compris: correct

Le plus convaincant: Genecand, Maury Pasquier

Maury Pasquier a voté contre l'alignement de la retraite des femmes à 65 ans. Je suis contre L'egalité par le bas. L'écart des salaires entre les femmes et les hommes reste béant, leur deuxième pilier bien inférieur à celui des hommes. 

Genecand explique que l'AVS est un système très déséquilibré. Cette réforme ne tiendra pas plus de 10 ou 15 ans. Un État fort ne promet pas des prestations qu'il ne peut pas tenir. Aujourd'hui ceux qui paient ne sont pas du tout sûr de toucher eux mêmes l'AVS. Les Suisses ne veulent pas de croissance plus grande. On ne peut pas baisser les rentes, la seule issue compte tenu de l'augmentation de l'espérance de vie c'est de travailler plus longtemps.

Cramer parlé des gens qui perdent leur emploi à 55, 57, 60 ans qui sont au chômage puis à l'assistance. Les graphiques de M Genecand, on les connaît. Or l'AVS s'est systématiquement mieux porté que ce que prévoyant les M. Genecand du passé. Aujourd'hui il nous faut passer le cap du baby boom. L'ambition de la révision Berset n'est pas de régler une fois pour toute le financement de l'AVS.

Stauffer est contre l'augmentation de l'âge de la retraite à 65 ans pour les femmes, à 67 ans pour tous, contre aussi la baisse du taux de conversion. Le système est clairement insuffisant puisque les cantons doivent verser des rentes complémentaires. Augmenter l'âge de la retraite à 67 ans est une manière subtile pour la Confédération de se défausser sur l'aide sociale que paie les cantons. Le candidat MCG ne donne aucune solution pour financer la retraite solidaire qu'est le premier pilier suisse, évoque l'Icha dont une part finançait le premier pilier. Il glisse sur le 2e pilier qui coûte cher aux employeurs surtout si leurs employés sont âgés. 

Maury Pasquier dit que les travailleurs des chantiers ou les travailleurs dans le domaine de la santé n'ont pas la capacité de prendre une retraite anticipée contrairement aux cadres.

 

Qu'allez-vous faire à Berne si vous ne deviez faire qu'une chose?

Cramer: préserver au Conseil des États une culture de consensus qui seul permet aux Romands d'être entendu par la majorité

Maury Pasquier regrette qu'on aie pas parlé de l'assurance maladie. Je veux défendre les intérêts des assurés genevois mis à mal par les partis UDC et PLR

Genecand se concentrera sur la résolution du défi posé par la votation du 9 février

Nidegger: que serait Geneve sans une Suisse forte? Un département français avec 12 % de chômeurs défendre la capcité de faire valoir le droit suisse face à d'autres droits au rabais

Stauffer réformera la règle de la péréquation défavorable à Genève, car Berne prend la masse salariale totale y compris celle des frontaliers qu'il divise par la population résidente. Cela penalise Geneve d'une centaine de millions. Berne a reconnu ce fait en accordant au canton un rabais de 25 millions. Mon rééquilibrage rapporterait 70 millions au canton.

 

Qui soutient la sortie du nucléaire en 2029?

Cramer, Maury Pasquer oui. Genecand est pour conserver les centrales actuelles tant qu'elles sont sûrs. Nidegger est allé à Tschernobyl et à Fukushima et constate que tirer la prise est aussi cher parfois plus que de maintenir les centrales en bon ordre de fonctionnement. Stauffer veut plus de géothermie, de solaire, de barrage mais pas de centrale à gaz.

Interpellé sur le budget cantonal, Stauffer indique que la masse salariale du petit État est 2,2 milliards de francs. Ruetschi lui demande d'être bref. Stauffer s'arrête très mécontent.

Travailler plus longtemps, n'est-ce empêcher des jeunes chômeurs de travailler?

Genecand: le marché de l'emploi n'est pas un gâteau fixe, c'est un gâteau qui grandit et qui a beaucoup grandit à Genève. Je comprends votre préoccupation qui paraît frapper du bon sens, mais vous oubliez que le marché du travail n'est pas fixe. 

Fin du débat

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