Vu du Salève

Au pavillion du Centre Afrique, un bloc de bois posé sur une vitrine attire l'attention du visiteur un peu curieux. Il contient une vingtaine d'échantillons, du beige au noir. "Ce sont les bois équatoriaux qu'exploite le pays, dit un assistant en boubou, les autres espèces qui ne sont pas exploitées ne sont pas là."

On repère l'ébène, le balsa. Les forêts sont-elles replantées? "Oui", répond-il. Il hésite... "Enfin, non, l'obligation de replanter figure bien dans les concessions d'exploitation, mais elles ne sont jamais respectées." Et comment va la situation politique du pays? "A Bangui, la capitale, c'est à peu près pacifier, commente l'homme au regard fatigué, mais à Bambari, un peu plus à l'est, les exactions continuent." Au mur derrière lui est affiché le portrait de la présidente de la transition qui devrait accueillir le pape François, à moins que le processus électoral, déjà reporté trois fois, ne le soit encore. 

Un peu moins que ceux des grands pays, le pavillon suisse est, lui aussi, pris d'assaut - l'Expo est dans l'ensemble plus courue qu'en juin, les Italiens dominent largement - impossible de visiter les tours. Le pavillon a accueilli un million de visiteurs moitié moins que le pavillon chinois ou espagnols qui affichent le score en grand. Partout les queues s'allongent, dissuasives.

Pas de place non plus au restaurant - gris comme tout le pavillon .ch - où seule la vidéo de promotion d'Uri donne un air gentiment déjanté à notre Heidiland. On avait dégusté une fondue en juin. On s'est rabattu sur une chaîne italienne, un plat de nouilles tièdes et chères.

Retour au pavillon national. Des queues encore, petites, pour voir la section eau du Gothard et celle des trois villes invitées: Bâle, Zurich et Genève. Bâle était présente en juin. C'est la seule ville qui a répondu, à mon sens, au thèmes de Milan 2015 (Nourrir le monde), du diaporama initial aux choses exposées. Zurich a choisi le thème de l'eau, c'est un peu laborieux mais accessible au flot des visiteurs qui s'écoule sans arrêt.

Quant à Genève, dont l'inauguration officielle de la participation aura lieu ce 17 septembre, c'est... on dira abstrait pour ne pas dire abscons.

Chimera, c'est le nom des trois installations inventées par des étudiants de la HES. Elles sont sensés être animées, mais le flux des visiteurs nous emporte et l'on ne verra donc pas la lanterne magique tourner. Elle projette un fond blanc sale (en fait des taches de nourritures recueillies sur un set de table de papier au cours d'un repas, un des dix repas issus de dix restaurants ethniques de Genève).

A coté, dans la pénombre du boyau où Genève s'expose ad minima, une dizaine de disques aux bords colorés, un par pays, restent rebelles à tout décryptage. Il faut aller sur le site internet de Chimera pour comprendre que toute l'installation à vocation de montrer la grande diversité culinaires de Genève qu'offre le cosmopolitisme de la ville. Les disques sont autant d'assiettes qu'un moteur électrique doit faire tourner, ce qui produit une musique.

Au fond de la salle, juste avant la sortie, un réseau de tuyaux transparents d'un centimètre de diamètre contenant un liquide jaune, l'eau qui alimente les restaurants, explique Chimera. On sort sans appétit, avec la certitude que la pensée artistique en vogue trouvera tout ça merveilleux d'audace. 

Sur l'Expo de Milan, lire 

http://jfmabut.blogspirit.com/archive/2015/06/15/nourrir-le-monde-268046.html#more

http://jfmabut.blogspirit.com/archive/2015/06/13/l-expo-universelle-2015-ne-fait-d-omelette-sans-oeufs-267976.html

http://jfmabut.blogspirit.com/archive/2015/06/12/a-milan-la-suisse-n-existe-pas-267940.html