"Laudato Si", une Constitution pour L'Expo universelle de Milan (19/06/2015)
Que manque-t-il à l'Expo universelle 2015? Une Charte, une feuille de route. Aucun pavillon national ne s'y risque. Quant aux pavillons onusiens, ils attirent moins les foules, car se produit à Milan le même réflexe qu'au foot. On aime son équipe, et on visite celles des autres pour bien se convaincre qu'on est les meilleurs. Hop Suisse!
"Laudato Si" est un texte fort, qui contient tout de même quelques trous. Je n'en citerai que trois qui m'ont frappé en lisant la lettre circulaire de François.
Nulle part il n'est fait mention de la démographie et du défi pour l'environnement que représente la population en quelques endroits et ces conséquences les migrations de survie. (Je n'ai rien vu non plus à ce sujet à Milan) Nulle part il n'est fait mention de l'énergie nucléaire.
Enfin, dans son appel au changement, le pape espère une conversion des personnes et l'émergence d'un régulateur mondial fort et efficace, bref d'un véritable gouvernement mondial capable d'imposer ses lois à tous. Rien n'est dit sur comment on y parvient.
Voici en attendant ma sélection de cette Encyclique qu'on peut lire sur le site du Vatican.
1. « Laudato Si’, mi’ Signore », - « Loué sois-tu, mon Seigneur », chantait saint François d’Assise. Dans ce beau cantique, il nous rappelait que notre maison commune est aussi comme une sœur, avec laquelle nous partageons l’existence, et comme une mère, belle, qui nous accueille à bras ouverts
14 Se convertir Nous avons besoin d’une conversion qui nous unisse tous, parce que le défi environnemental que nous vivons, et ses racines humaines, nous concernent et nous touchent tous.
68. Le repos du dimanche (...) le repos du septième jour n’est pas proposé seulement à l’être humain, mais aussi « afin que se reposent ton âne et ton bœuf » (Ex 23, 12). Nous nous apercevons ainsi que la Bible ne donne pas lieu à un anthropocentrisme despotique qui se désintéresserait des autres créatures.
76 La création et la nature. Pour la tradition judéo-chrétienne, dire “création”, c’est signifier plus que “nature”, parce qu’il y a un rapport avec un projet de l’amour de Dieu dans lequel chaque créature a une valeur et une signification. La nature s’entend d’habitude comme un système qui s’analyse, se comprend et se gère, mais la création peut seulement être comprise comme un don qui surgit de la main ouverte du Père de tous, comme une réalité illuminée par l’amour qui nous appelle à une communion universelle.
94 Le riche et le pauvre Cela a des conséquences pratiques, comme celles qu’ont énoncées les Évêques du Paraguay : « Tout paysan a le droit naturel de posséder un lot de terre raisonnable, où il puisse établir sa demeure, travailler pour la subsistance de sa famille et avoir la sécurité de l’existence. Ce droit doit être garanti pour que son exercice ne soit pas illusoire mais réel. Cela signifie que, en plus du titre de propriété, le paysan doit compter sur les moyens d’éducation technique, sur des crédits, des assurances et la commercialisation ».
105 L'homme est nu L’être humain n’est pas pleinement autonome. Sa liberté est affectée quand elle se livre aux forces aveugles de l’inconscient, des nécessités immédiates, de l’égoïsme, de la violence. En ce sens, l’homme est nu...
119. Et Dieu dans tout ça? L’ouverture à un “ tu ” capable de connaître, d’aimer, et de dialoguer continue d’être la grande noblesse de la personne humaine. C’est pourquoi, pour une relation convenable avec le monde créé, il n’est pas nécessaire d’affaiblir la dimension sociale de l’être humain ni sa dimension transcendante, son ouverture au “ Tu ” divin. En effet, on ne peut pas envisager une relation avec l’environnement isolée de la relation avec les autres personnes et avec Dieu. Ce serait un individualisme romantique, déguisé en beauté écologique, et un enfermement asphyxiant dans l’immanence.
131 Risques biotechnologiques Si on ne peut interdire à un artiste de déployer sa capacité créatrice, on ne peut pas non plus inhiber ceux qui ont des dons spéciaux pour le développement scientifique et technologique, dont les capacités ont été données par Dieu pour le service des autres. En même temps, on ne peut pas cesser de préciser toujours davantage les objectifs, les effets, le contexte et les limites éthiques de cette activité humaine qui est une forme de pouvoir comportant de hauts risques.
133-135 OGM Il faut rappeler que le début des développements scientifiques de céréales transgéniques a été l’observation d’une bactérie qui produit naturellement et spontanément une modification du génome d’un végétal. (...) Il s’agit d’une question d’environnement complexe dont le traitement exige un regard intégral sous tous ses aspects, et cela requiert au moins un plus grand effort pour financer les diverses lignes de recherche, autonomes et interdisciplinaires, en mesure d’apporter une lumière nouvelle.
155 L'écologie humaine et la question du genre Apprendre à recevoir son propre corps, à en prendre soin et à en respecter les significations, est essentiel pour une vraie écologie humaine. La valorisation de son propre corps dans sa féminité ou dans sa masculinité est aussi nécessaire pour pouvoir se reconnaître soi-même dans la rencontre avec celui qui est différent. De cette manière, il est possible d’accepter joyeusement le don spécifique de l’autre, homme ou femme, œuvre du Dieu créateur, et de s’enrichir réciproquement. Par conséquent, l’attitude qui prétend « effacer la différence sexuelle parce qu’elle ne sait plus s’y confronter »[121], n’est pas saine.
175. Une Autorité politique mondiale Comme l’a affirmé Benoît XVI dans la ligne déjà développée par la doctrine sociale de l’Eglise : « Pour le gouvernement de l’économie mondiale, pour assainir les économies frappées par la crise, pour prévenir son aggravation et de plus grands déséquilibres, pour procéder à un souhaitable désarmement intégral, pour arriver à la sécurité alimentaire et à la paix, pour assurer la protection de l’environnement et pour réguler les flux migratoires, il est urgent que soit mise en place une véritable Autorité politique mondiale telle qu’elle a déjà été esquissée par mon Prédécesseur, [saint] Jean XXIII».[129] Dans cette perspective, la diplomatie acquiert une importance inédite, en vue de promouvoir des stratégies internationales anticipant les problèmes plus graves qui finissent par affecter chacun.
186. Le principe de précaution Si l’information objective conduit à prévoir un dommage grave et irréversible, bien qu’il n’y ait pas de preuve indiscutable, tout projet devra être arrêté ou modifié. Ainsi, on inverse la charge de la preuve, puisque dans ce cas il faut apporter une démonstration objective et indiscutable que l’activité proposée ne va pas générer de graves dommages à l’environnement ou à ceux qui y habitent.
195 La décroissance C’est pourquoi l’heure est venue d’accepter une certaine décroissance dans quelques parties du monde, mettant à disposition des ressources pour une saine croissance en d’autres parties. Benoît XVI affirmait qu’« il est nécessaire que les sociétés technologiquement avancées soient disposées à favoriser des comportements plus sobres, réduisant leurs propres besoins d’énergie et améliorant les conditions de son utilisation ».
203. La liberté Ce paradigme fait croire à tous qu’ils sont libres, tant qu’ils ont une soi-disant liberté pour consommer, alors que ceux qui ont en réalité la liberté, ce sont ceux qui constituent la minorité en possession du pouvoir économique et financier. Dans cette équivoque, l’humanité postmoderne n’a pas trouvé une nouvelle conception d’elle-même qui puisse l’orienter, et ce manque d’identité est vécu avec angoisse. Nous possédons trop de moyens pour des fins limitées et rachitiques.
222. Moins est plus La spiritualité chrétienne propose une autre manière de comprendre la qualité de vie, et encourage un style de vie prophétique et contemplatif, capable d’aider à apprécier profondément les choses sans être obsédé par la consommation. Il est important d’assimiler un vieil enseignement, présent dans diverses traditions religieuses, et aussi dans la Bible. Il s’agit de la conviction que “moins est plus”. En effet, l’accumulation constante de possibilités de consommer distrait le cœur et empêche d’évaluer chaque chose et chaque moment.
223. La sobriété, qui est vécue avec liberté et de manière consciente, est libératrice.
229. L'éthique Il faut reprendre conscience que nous avons besoin les uns des autres, que nous avons une responsabilité vis-à-vis des autres et du monde, que cela vaut la peine d’être bons et honnêtes. Depuis trop longtemps déjà, nous sommes dans la dégradation morale, en nous moquant de l’éthique, de la bonté, de la foi, de l’honnêteté.
232. Agir local Tout le monde n’est pas appelé à travailler directement en politique ; mais au sein de la société germe une variété innombrable d’associations qui interviennent en faveur du bien commun en préservant l’environnement naturel et urbain. Par exemple, elles s’occupent d’un lieu public (un édifice, une fontaine, un monument abandonné, un paysage, une place) pour protéger, pour assainir, pour améliorer ou pour embellir quelque chose qui appartient à tous. Autour d’elles, se développent ou se reforment des liens, et un nouveau tissu social local surgit. Une communauté se libère ainsi de l’indifférence consumériste.
246. La prière Après cette longue réflexion, à la fois joyeuse et dramatique, je propose deux prières : l’une que nous pourrons partager, nous tous qui croyons en un Dieu Créateur Tout-Puissant ; et l’autre pour que nous, chrétiens, nous sachions assumer les engagements que nous propose l’Évangile de Jésus, en faveur de la création.
Prière pour notre terre
Dieu Tout-Puissant
qui es présent dans tout l’univers
et dans la plus petite de tes créatures,
Toi qui entoures de ta tendresse tout ce qui existe,
répands sur nous la force de ton amour pour que
nous protégions la vie et la beauté.
Inonde-nous de paix, pour que nous vivions
comme frères et sœurs
sans causer de dommages à personne.
Ô Dieu des pauvres,
aide-nous à secourir les abandonnés
et les oubliés de cette terre
qui valent tant à tes yeux.
Guéris nos vies,
pour que nous soyons des protecteurs du monde
et non des prédateurs,
pour que nous semions la beauté
et non la pollution ni la destruction.
Touche les cœurs
de ceux qui cherchent seulement des profits
aux dépens de la terre et des pauvres.
Apprends-nous à découvrir
la valeur de chaque chose,
à contempler, émerveillés,
à reconnaître que nous sommes profondément unis
à toutes les créatures
sur notre chemin vers ta lumière infinie.
Merci parce que tu es avec nous tous les jours.
Soutiens-nous, nous t’en prions,
dans notre lutte pour la justice, l’amour et la paix.
Donné à Rome, près de Saint-Pierre, le 24 mai 2015, solennité de Pentecôte, en la troisième année de mon Pontificat.
Franciscus
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