L'odeur des Genevois (22/05/2015)

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L'odeur et le bruit. L'expression fait corps avec Jacques Chirac depuis 1991 et a fait la fortune de la bonne pensance hexagonale. Je ne connaissais pas la version pontificale de l'expression jusqu'à la lecture de L'Echo Magazine de cette semaine. Dans son éditorial, le réd en chef de la revue catholique romande cite cette phrase du pape François: Un pasteur doit sentir l'odeur de ses brebis. Patrice Favre en tire argument pour supputer la sympathie du pape à l'idée de réinstaller un évêque à Genève,  bientôt 600 ans après la fuite du dernier titulaire à Annecy. En 1533.

Serait-ce une bonne chose pour les catholiques genevois qu'un évêque entier vienne sentir leur odeur? Quelle est-elle au fait? Inodore comme l'argent? Je ne saurais en juger. Ce qui est certain, en revanche, c'est qu'en ce temps où chaque paroisse brandit à nouveau son drapeau et affirme son identité d'autant plus fort que ses rangs se clairesèment, le débarquement d'un prélat au bout du lac suscitera quelques remous. Les mauvaise langues disent parlant du vicaire actuel qu'il est plus auxiliaire qu'évêque et que son secrétaire général le roule un peu trop souvent dans la farine. Pour tout dire, je n'en sais rien, ne fréquentant pas le 13 rue des Granges.

http://www.echomagazine.ch/edito-la-haut-sur-la-montagne

D'autres argumenteront que du point de vue des enjeux internationaux, où le Vatican n'est pas un poids plume, la présence à Geneve d'un évêque pourrait être d'une mutuelle utilité. J'en doute. La grande politique se fait à New York et la force du Vatican est à Rome et dans son réseau qui innerve finement la planète jusque dans la plus isolée paroisse clandestine de la Chine. Et dans les audaces secrètes ou publiques de la papauté.

Un évêque à Genève n'a pas de sens si son territoire s'arrête aux frontières du canton. C'est une solution pratique, mais qui revient à marier le sabre et le goupillon. Étendre sa zone d'influence au Grand Genève relève de la fiction. Autant rattacher les catholiques genevois au diocèse d'Annecy ce qui fut le cas de 1533 à 1821.

Un évêque consacre des prêtres, délivre le sacrement de la confirmation, représente la communauté, la guide, la dynamise, l'interpelle. Des prêtres, il en faut sans doute. Mais je doute qu'un évêque soit une fabrique à prêtres. A moins qu'on lui laisse la faculté d'innover et de consacrer des hommes et des femmes mariées ou non.

Un évêque à Genève ne saurait être un anti-Calvin.  Il se devrait de conduire le dialogue œcuménique. Et dans quel but? Ramener les protestants hérétiques dans le giron de l'Eglise ou faciliter sa réforme en plaidant la cause de la Réforme à Rome? Absurde. Il m'arrive de penser que  la Réforme et les schismes sont, comme les divorces, inscrits dans notre condition et qu'ils ne sont au fond que la répétition du mythe de la Tour de Babel. Le prix de l'unité dans une idéologie, c'est le goulag, le bannissement, l'excommunication, le viol et la violence. La seule issue de l'oecuménisme, c'est le chemin parfois tortueux et escarpé de la coexistence pacifique et amicale, de l'action concertée et parfois de la célébration commune de ce qui nous rassemble sans cacher ce qui nous sépare. Sans doute pas la fusion.

La communion des saints relève du paradis.

http://fr.m.wikipedia.org/wiki/Le_bruit_et_l%27odeur_(discours_de_Jacques_Chirac)

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