Au combat de coqs, Sarko l'emporte (03/05/2012)
Sarko gagne aux points un pugilat médiatisé à outrance. Le candidat "Moi Président des Français" ne s'est pas effondré, mais il n'a pas su élever le débat au niveau d'un duel de poids lourds, d'un duel de présidents.
Fébrile, coincé dans sa posture raidie, une moue presque mitterrandienne, un rien distancée, donnant l'impression qu'il refusait le combat, Hollande a sans doute eu raison de ne pas répondre à la mitraille argumentaire que Sarkozy lui a infligée dès l'entame de l'émission. Mais il a manqué au candidat socialiste la petite phrase qui aurait pu expliquer et la posture de son adversaire et son propre refus de jouer ce jeu assez pitoyable: "Monsieur le président, n'a pas dit François Hollande, souhaitez-vous poursuivre votre carrière politique comme premier ministre, à l'exemple d'un dirigeant d'un grand pays ami de la France?"
Hollande aurait montré qu'il n'entendait pas abaisser la fonction de président des Français à celle d'un premier ministre d'un pays, certes encore cinquième puissance du monde, mais qui, d'ici dix ou vingt ans, ne sera guère plus qu'un canton de Berne ou de Vaud dans une Europe confédérale.
Incapable de se départir de son versant bling bling - malgré une posture modeste et même voutée - le président sortant a continué de jouer les voltigeurs, ce qu'il n'a cessé de faire durant cinq ans, courant d'un sommet à l'autre, d'un fait divers à l'autre, d'un chiffre à l'autre, décernant des bonnes et des mauvaises notes à ses interlocuteurs, collant aussitôt des patchs législatifs à tous les maux de la France qui en compte beaucoup.
A ce combat de coqs, Sarkozy est le meilleur. Il a évidemment l'avantage de connaître ses sujets. Impossible, hier soir, de savoir qui disait vrai ou faux. Il a sans doute manqué dans le dispositif, bêtement analysé par les médias, un grand jury qui, deux ou trois fois, aurait pu interrombre ce trop long combat des chefs et dire qui mentait en parole, en détournement ou par ommission.
Le débat changera-t-il le cours de l'élection? Après avoir longtemps pensé que Sarkozy pouvait l'emporter face à un Hollande molachu et sans expérience ministérielle, j'avais fini par me rendre à l'évidence des sondages. Hollande tenait la route. Sarkozy ressemblait tellement à sa poupée des Guignols qu'on voulait le voir débarrasser le plancher et que n'importe quel candidat socialiste pouvait l'emporter. Mais sa pugnacité hier soir face à un Hollande plutôt brouillon me font dire que le sortant n'est pas encore sorti et que, pour la première fois peut-être, on pourra écrire dimanche que tout se sera jouer sur un débat, que je n'ai pas pu regarder de bout en bout.
07:07 | Lien permanent | Commentaires (7)
Commentaires
Je trouve que le débat s'est fini comme vous le dites, avec Sarkozy plus calme et Hollande s'énervant, de plus en plus autoritaire et agressif, revenant à son halètement. Personnellement j'ai trouvé que son attitude était du niveau de Casse toi pauv con de Sarkozx. Pas à la hauteur de la fonction. J'ai aussi l'idée que Sarkozy est vainqueur aux points. Mais chacun ressent autrement, à preuve des blogs qui trouvent FH vainqueur.
Écrit par : hommelibre | 03/05/2012
Cher Monsieur,
Dommage que vous n'ayez pas trouvé ce site: https://twitter.com/#!/LeVeritometre qui permettait de savoir qui disait vrai ou faux.
Sinon, vos observations et celles de Jean-Noël Cuénod rejoignent en grande part celles que j'ai pu faire.
Mon sujet de blog a cependant voulu mettre l'accent sur un moment assez étonnant dont peu on a parlé: http://voix.blog.tdg.ch/archive/2012/05/03/hollande-bailleur-de-fonds.html
Écrit par : Hélène Richard-Favre | 03/05/2012
Et sinon, voici un site qui vous permettra de savoir ce qu'il en a été des chiffres vrais ou faux: http://owni.fr/2012/05/03/veritometre-debat-hollande-sarkozy/
Bien à vous
Écrit par : Hélène Richard-Favre | 03/05/2012
Alors là... j'ai regardé en entier et je pense exactement l'inverse : Hollande (qui ne m'est par ailleurs pas particulièrement sympathique) a plutôt été bien meilleur que Sarkozy car il n'a rien lâché et n'a cessé de rappeler son bilan désastreux !
Bizarre comme analyse...
Écrit par : Ethan | 03/05/2012
Intéressante perception ! J'ai quant à moi trouvé M. Sarkozy dans une attitude fort peu présidentielle. Irritable, arrogant, nerveux, ne cessant d'insulter son contradicteur ("mensonges", "Petit calomniateur" etc.), il a voulu jouer au maître d'école en nous assommant de chiffres et % sur un plan beaucoup trop technocratique.
Hollande m'a surpris en bien, plutôt pugnace et rendant coup sur coup, même si certains points de son programme sont peu clairs financièrement.
Mais à mon avis c'est sur la conclusion que tout s'est joué : Hollande "Moi président" tentait d'ouvrir une perspective, une description de la fonction présidentielle du futur, même si c'était un peu trop long.
Sarkozy, qui avait pourtant l'avantage de terminer, a été pitoyable dans ses appels aux électeurs de Mme Le Pen et de M. Bayrou. Il faisait presque pitié, KO debout, comme terrassé par sa prise de conscience, à ce moment, que "les carottes étaient cuites".
Écrit par : A. Piller | 03/05/2012
Comment pouvez-vous juger sans avoir "pu regarder de bout en bout" ?
Je vous croyais journaliste pourvu d'éthique...
Écrit par : bidouille | 03/05/2012
C'est avec ce type de billet qu'on juge la qualité des journalistes.
L'écrasante majorité des rédacteurs des services po de la presse nationale a donné Hollande vainqueur, y compris au sein des news mag de droite comme L'express.
Je ne sais si ce sont vos principes de jugements ou votre positionnement politique qui vous mènent à l'échec d'analyse.
Le ralliement de Bayrou à Hollande, suite au débat de mercredi, devrait sonner comme une alarme pour vous. Comment se fait-il que même bayrou, avec qui vous partagez des préoccupations politiques, a jugé Hollande plus convainquant que le président sortant?
Écrit par : reudny | 04/05/2012