Les Suisses endettés (13/03/2012)
Le désendettement hypothécaire des Suisses, Widmer-Schlumpf va-t-elle réussir là où d'autres se sont cassés les dents? Cette fois c'est pas le côté sécurité financière que le projet de désendettement revient. Encouragés fiscalement à ne pas rembourser leurs dettes contractées pour se loger, les Suisses sont parmi les habitants les plus endettés du monde. En termes hypothécaires seulement, pour les autres types de dette, les Suisses sont plutôt prudents.
L'endettement hypothécaire est un risque systémique juge une commission qui vient de rendre son rapport. Qui propose de renoncer à la déduction fiscale des intérêts contre la suppression de la valeur locative qui augmente sensiblement le revenu des propriétaires. Une grosse perte en perspective pour le fisc si la valeur locative est effectivement totalement supprimée.
On se demande si le bon sens - rembourser ses dettes - gagnera la partie. Le lobby des locataires ne voudra pas faire de cadeau aux propriétaires en abolissant la valeur locative et les banques n'ont guère intérêt à être remboursées. Des clients captifs, c'est profitable.
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Commentaires
37% de propriétaires en Suisse (et certainement beaucoup moins à Genève), 44% en Allemagne, 61% en France (+4% sous Sarkozy, l'Hexagone étant à 57% en 2007) 68% en moyenne dans l'UE et jusqu'à 88% dans certains pays de l'ex-bloc de l'Est. Où soit dit en passant, les emprunts sont souvent libellés en Francs suisses, ce qui est un risque énorme pour ces pays - et pour nos 2 grosses banques qui leur ont prêté - et qui explique aussi l'indexation du CHF sur l'Euro menée par la BNS).
Plus de 10% des Français sont propriétaires bien que n'ayant pas assez de revenus pour payer d'impôt ! Concrètement comment ça marche ? Tous simplement: les Français remboursent en 10, 15, 20 ou plus rarement 25 ans. Et le plus souvent empruntent à taux fixe, ce qui représente une sécurité considérable.
Le montant des traites est certes plus important que s'ils ne remboursaient pas, mais en revanche la part des intérêts est bien inférieure et donc, en remboursant, ils épargnent.
En Suisse, une partie importante de cette épargne est investie en bourse (notamment au travers du 2ème pilier). Ce qui est plus rentable lorsque l'économie boume, mais peut s'avérer catastrophique en cas de crise. Tandis que le logement, même s'il perd de sa valeur suite à l'éclosion d'une bulle spéculative, sert au moins toujours à se loger... Et si l'on est endetté à taux fixe avec une assurance chômage, on ne risque pas de perdre son logement.
Écrit par : Philippe Souaille | 14/03/2012
J'oubliais, différence essentielle d'avec la Suisse: au lieu de 20% d'aport minimum, l'usage est de 10 % et l'on peut facilement trouver à emprunter à 0%. En fait, seuls les frais de notaire sont à payer, de l'ordre de 3% sur du neuf et l'Etat aide l'accession à la propriété par les "Plan d'Epargne Logement" qui permettent de se constituer la petite épargne nécessaire pour entamer le processus.
Comme déjà dit, avec des prêts à taux bloqués sur toute la durée et une bonne ssurance, le risque est nul. A noter que la garantie décennale, qui fait tant râler les promoteurs/entrepreneurs suisses voulant construire en France est extrêmement utile à l'acheteur puisqu'elle le garantit contre les malfaçons ou la faillite du constructeur, catastrophes qui arrivent malheureusement trop souvent en Suisse.
Classiquement, les Français commencent par acheter un petit appartement qu'ils revendent quelques années plus tard, quand les enfants naissent ou grandissent et prenent de la place. Comme ils ont remboursé, leur capital a grossi, ils peuvent mettre une mise de fonds plus importante pour un domicile plus grand ou mieux situé. Et ainsi de suite. A leur retraite, ils n'ont pas pas de 2ème pilier, mais plus de loyer non plus, en général, et un logement très correct, qui à leur décès pourra être utilisé comme mise de fonds par leurs héritiers...
Comme la France construit beaucoup, il y a toujours du neuf à acheter.
J'entends ou lit souvent des Genevois un peu trop fiers se gausser des Gaulois flemmards, exactement comme la droite extrême alémanique le fait des welscho-grecs... A la vérité la surabondance des lois française sur le travail a des effets pervers sur la création d'emploi et sur le travailleur lui-même. Exactement comme la surabondance de loi helvétiques sur la protection des locataires a des effets pervers sur la création de logement en Suisse. Peut-ête serait-il temps de s'inspirer de ce qui se fait de bien chez nos voisins respectifs...
Écrit par : Philippe Souaille | 14/03/2012
La situation des prix de l'immobilier en Suisse, particulièrement dans la région lémanique, oblige tout acquéreur à s'endetter massivement, et pour plusieurs décennies. C'est un fait, incontournable, et il ne résulte pas d'un choix; le seul choix possible en l'occurence étant entre devenir propriétaire ou rester locataire (pour autant que l'on souhaite maintenir sa résidence en Suisse).
La solution préconisée de supprimer la déductibilité fiscale des intérêts d'emprunts sera peut-être incitative, mais elle n'améliorera pas la capacité des petits propriétaires à se désendetter, s'ils n'ont pas les fonds propres nécessaires. Je doute que beaucoup d'entre eux renoncent à rembourser leurs hypothèques pour jouer leur épargne à la bourse. Une telle mesure pourrait même avoir l'effet pervers d'inciter à retirer le maximum de leur 2ème pilier.
Par ailleurs, en cas de remontée subite des taux, l'effet serait catastrophique. En supprimant le coussin amortisseur que représente la déductibilité fiscale de la hausse des charges d'intérêt, on aurait un impact beaucoup plus direct et dévastateur sur le nombre de faillite des ménages, et la crise immobilière qui en découlerait serait sans doute largement amplifiée.
Écrit par : Punica Fides | 14/03/2012
J'ai écouté hier soir Mme Widmer-Schlumpf au sujet du désendettement hypothécaire des Suisses, je suis mal placée pour commenter. Seulement ce petit témoignage: Mon père (maman aussi) dans les années 30, 40 et plus ne se seraient jamais endettés. Les impôts dûment payés, il ne restait rien pour s'enrichir, mais la ferme était notre ferme. Des améliorations, des maintenances du travail de nos mains, oui. Quand je suis rentrée d'Afrique du sud, où la terre avait été volée par une minorité argentée et où nous avons vécu avec les gens sans terre, j'ai été surprise de voir que "notre ferme" (mes parents étaient tous les deux morts) s'était bien améliorée, oui, mais était, comme toutes nos fermes jurassiennes, me disait-on, hypothéquées. Notre terre appartient aux banques et nous sommes quasiment des employés terriens des banques.
Le désendettement hypothécaire signifierait quoi pour les paysans? Ou alors, suis-je vraiment déphasée?
Écrit par : cmj | 14/03/2012
Si l'on rembourse plus vite, on paie beaucoup moins d'intérêt. Combien, qui pourraient rembourser davantage ne remboursent quasimment rien et en tout cas nettement moins que ce que leur coûterait un loyer équivalent ? C'est un choix, mais il ne faut pas prétendre que c'est une obligation de rembourser peu. Par ailleurs, sur des durées plus courtes, 20 ou 25 ans, les banques peuvent fort bien prêter à taux fixes, prenant le risque à leur charge, en pool avec des assurances. Elles le font bien dans d'autres pays, où les taux d'intérêt sont moins stables que chez nous.
Le problème de fond cependant, cela reste les prix de l'immobilier. Pour cela, il n'est pas d'autre solution que de construire, encore et encore. De ce point de vue, la ceinture verte est une calamité, même si elle maintient de jolis paysages. L'environnement pâtit gravement de l'éloignement des logements. C'est totalement scyzophrène, lorsqu'on plus on met en place une préférence cantonale. Il y a certainement moyen de tout concilier. Mais pour cela, il faut réfléchir au lieu de râler.
Écrit par : Philippe Souaille | 14/03/2012
@ Monsieur Souaille: chacun ne peut rembourser qu'au rythme de sa capacité financière, et bienheureux celui qui en Suisse peut s'endetter si peu qu'il puisse tout rembourser en 25 ans. Si vous empruntez par exemple 1 million pour acquérir un appartement de CHF 1'250'000, cela vous donne un remboursement de CHF 40'000 par ans, en plus d'intérêts de CHF 30'000 à supposer un taux de 3%. CHF 5'800 par mois, c'est un joli loyer! En termes de flux de trésorerie, c'est certainement plus que le loyer d'un appartement équivalent. Et si le taux remonte, la capacité à rembourser baissera d'autant. Quant à fixer le taux à 20 ou 25 ans, je ne vois pas quelle banque suisse propose un horizon aussi long, je crois que le maximum est de 10 ans, voire 15 dans des cas exceptionnels.
Cette mesure serait peut-être plus ou moins indolore dans les circonstances présentes, avec les taux bas que nous connaissons; il n'est pas rare en effet de voir des personnes possédant un bien dont la valeur locative excède la charge hypothécaire, et qui seraient donc gagnantes à court terme. Mais il faut tout de même rappeler qu'historiquement, des taux aussi bas sont tout à fait exceptionnels, et qu'ils ne pourront certainement pas perdurer sur un horizon de 15 ans.
Non cette proposition me semble très dangereuse, les maigres aspects incitatifs ne compensent certainement pas l'augmentation du risque systémique qu'elle induit. Cela ne va en tout cas pas dans le sens d'une augmentation du taux de propriétaire en Suisse, que nous souhaitons tous.
Je vous rejoins en revanche sur la nécessité de construire plus, beaucoup plus, à Genève. C'est le seul moyen acceptable de faire baisser les prix (les autres étant, soit de chasser les multinationales, soit, justement, d'augmenter les obstacles à l'accession à la propriété).
Écrit par : Punica Fides | 14/03/2012
Punica Fides, ce que j'ai dit c'est que si l'on ne rembourse pas, ou très peu, on reste en-dessous du prix du loyer. Mais si on rembourse, alors effectivement, on atteint ou dépasse le prix d'un loyer équivalent. A la différence que vous êtes propriétaire et que ce que vous payez en plus, et même davantage, vous l'épargnez. Vous êtes donc clairement gagnant. Reste à savoir si vous voulez épargner. Mais CHF 5'800.- de loyer, avec deux salaires à CHF 8'000.-, soit 2 profs par exemple, ou deux journalistes, ou deux flics etc... cela n'a rien d'insurmontable.
Et avec CHF 1'250'000 de nos jours, on peut quand même trouver un bel appart ou une petite maison jumelle. Dont le loyer tournerait autour des CHF 5'000.- Quant aux banques si les suisses ne prêtent pas en bloquant sur 20 ans, empruntez auprès d'une banque française en CHF, elles le font. Ou alors voir le Crédit Agricole Suisse: puisqu'ils le font en France, sur base Libor, pourquoi ne le feraient-ils pas en Suisse ? Exemple d'offre d'une banque française en France pour CHF 800 000.- empruntés (sans apport personnel): CHF 4600 par mois, inclus une assurance décès/invalidité à 100% sur chacun des deux acquéreurs. CHF 4100 sans l'assurance. Bloqués sur 20 ans.
Écrit par : Philippe Souaille | 14/03/2012
Oui M. Souaille, j'entends bien que ce que vous remboursez constitue de l'épargne, mais je ne raisonne là qu'en termes de cash-in / cash-out, soit à relativement court terme: la situation générale des ménages propriétaires leur permet-elle réellement d'augmenter leur taux d'épargne? Peut-être oui, peut-être non. Admettez tout de même que des ménages avec deux salaires à 8'000 ne doivent pas courir les rues... surtout s'il y a les enfants et que Madame est passée à mi-temps.
Mais c'est clair qu'il est impossible de tirer des conclusions générales sur un exemple individuel, qui plus est purement théorique. A défaut d'une étude poussée basée sur la relation entre revenus / valeur de l'immeuble / niveau d'endettement des ménages propriétaires, avec simulation de l'impact d'une hausse des taux, je ne puis qu'exprimer un sentiment de doute face aux réelles conséquences d'une suppression de la déductibilité des intérêts, dont je ne suis pas sûr qu'elles aient été réellement mesurées.
Écrit par : Punica Fides | 15/03/2012
Exactement comme la surabondance de loi helvétiques sur la protection des locataires a des effets pervers sur la création de logement en Suisse.
Mais oui mon Souaille, lorsque l'on vit dans une somptueuse villa que l'on ne peut s'offrir que lorsque l'on joue sur le meilleur des deux systèmes (FR-CH) on peut se permettre de donner des leçons...
Écrit par : Anastase | 17/03/2012
L'impact d'une hausse des taux, dans le système français à taux fixes, ce sont les banques qui en prennent le risque.
Écrit par : Philippe Souaille | 17/03/2012
"Mais CHF 5'800.- de loyer, avec deux salaires à CHF 8'000.-, soit 2 profs par exemple, ou deux journalistes, ou deux flics etc... cela n'a rien d'insurmontable."
Je n'aime pas trop cette phrase: pour le locataire moyen il s'agit d'un salaire de riche (contre qui ne j'ai rien de particulier), et l'accession à la propriété dans ces conditions reste donc réservée aux riches. A moins que vous considériez que les couples que vous donnez en exemple soient une norme.
Pour la majorité d'entre nous autres, dont beaucoup aimeraient acquérir leur propre logement, ne serait-ce que pour échapper quelque peu au tracas de certaines régies et au pouvoir de certains propriétaires, et même pour ceux remplissent vos conditions à moitié, toute une vie passe sans que ne se présente jamais une seule occasion de le faire.
Écrit par : Mère-Grand | 17/03/2012
Merci PS et PF pour cet échange, c'est bien la première fois que j'apprends qch sur les blogs de la TdG.
Écrit par : rigolaux | 17/03/2012
Etant depuis peu confronté au système suisse j'ai fait quelques simulations financières. Ce système helvetique, comparé aux systèmes francais ou américain décourage la propriété. En effet, cette imposition sur la valeur locative ajoute un poids démesuré sur le rendement financier d'un investissement immobilier. Dans la plupart des cas il est préfèrable d'investir sur le marche boursier et de louer son domicile.
Dans le cas d'une inflation forte, associée avec un taux à long terme bas (cas le plus favorable), les gains se font au prix d'un transfert de fortune de liquidités parfaites vers un bien totalement illiquide (et ceci sans remboursement de l'hypotèque). Un investissement sur des marchés plus liquides me semble préfèrable.
Écrit par : Jean-Michel | 24/04/2012
La stroumpf est en train d'aligner la Suisse sur l'UE. Personne n'y voit rien, et surtout pas la majorité des parlementaires qui l'ont élue, qui ferme les yeux pour ses intérêts, pas pour leurs électeurs.
Le raccourci est trop facile de s'établir que sur la dette hypothécaire, toutes les dettes sont des dettes, alors il faut prendre l'entier de l'endettement pour nous faire une statistique qui mette les Suisses endettés à la bonne place, pas où l'on veut qu'elle soit pour des arguments de campagne.
Cette femme est une menteuse née, tout comme une traitresse qui n'a aucun scrupule pour se maintenir à sa place, et faire croire qu'elle est compétente et travaille pour le bien de notre pays.
Le système fiscal ne profite absolument pas au propriétaire-amortissant, surtout lorsqu'il se retrouve à la retraite avec une maison nette de dettes. Dès lors il faut garder une juste mesure de dette sur son biens et surtout le maintenir en très bon état, voire augmenter sa valeur par des plus-values. Au moins vous laissez à vos héritiers un bénéfice.
Mme stroumpf ne s'occupe que des intérêts des banquiers et de la BNS et c'est pour cela qu'elle monte au créneau sur l'hypothécaire. Nous sommes partis pour pas mal d'années avec des taux bas,(environnement UE oblige) et ce n'est pas les manipulations des "sous-fifres-banquiers" pour convaincre leurs clients de payer du taux fixe à long terme, qui changera la tendance en bourrinant systématiquement que les taux vont repartir à la hausse.
Écrit par : Corélande | 24/04/2012