La ronce et Genève (07/01/2012)

ronce.jpgA quoi servent les ronces? A la fin de l'été, elles livrent de succulents fruits noirs, les mures. Livrer est un euphémisme, car pour en profiter, il ne faut pas craindre les méchantes piqures de cet épineux.

La ronce a une autre vertu qu'on a oublié jusque dans nos campagnes. La ronce est le berceau de la forêt. Elle protège les jeunes plants de la gourmandise des chèvres. Et la forêt est une usine à humus. Or nous sommes devenus pauvres en humus.

Jamais on m'a enseigné ces choses durant mes études d'agronomie à Zurich. Je suis issu de ces fermiers pionniers et de cette agriculture productiviste, qui, pas encore sortie de l'étatisme hérité de la guerre, s'était jetée sur les engrais synthétiques et n'avait qu'une idée en tête: arracher les ronces, défricher les haies, assécher les marais, abattre les arbres, autant d'obstacles à l'avancement du tracteur et privaient les humains de bonnes terres à blé.

Exercice réussi: l'Europe regorge de lait, de blé, de fruits, de pomme de terre, de sucre, d'huile et de viande de qualité et bon marché. Au point que régulièrement les surplus doivent être éliminés à grands frais. Souvent dans les pays du sud où ces produits concurrencent l'agriculture locale et alimentent des trafics.

L'envers de la médaille, c'est qu'on n'a un peu trop considéré le sol pour ses apports uniquement physiques: enracinement, apport d'eau et de sels minéraux. Les sols les plus fragiles manifestent des pertes d'humus, des phénomènes de colmatage, d'asphyxie. La vie microbienne souffre et la fertilité naturelle en pâtit. J'ai retourné l'an dernier la terre d'un ancien jardin recouvert d'herbe pendant des années. Cette terre meuble et grumeleuse s'est révélée d'une incroyable fertilité par rapport au reste du potager.

Reste à transformer l'essai en plein champ et à trouver un modèle économique qui assure une nourriture bon marché pour tous à un prix rémunérateur pour les paysans.

Depuis pas mal de temps, des pionniers chantent les vertus de la culture sans labour. Le 21 janvier prochain les paysans genevois entendront Frédéric Thomas un des papes de ce mode de culture.

D'autres replantent des haies des arbres: 50 arbres par hectare, ont dit ce matin Alain Canet, directeur de l’association "Arbre et paysage 32", président de l’AFAF (association française d’agroforesterie) et Jack Delozzo, agriculteur agroforestier, dans l'émission Terre à Terre sur France culture.

A quel prix? Le modèle économique n'est pas encore inventé. Actuellement, il ne tient qu'à coup de subventions ce qui veut dire pour les paysans beaucoup de contrôles administratifs. Sans doute est-ce un mal nécessaire, car tout le monde ne peut pas se payer les fruits de l'agriculture de conservation.

 

 

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