Quinze jours sans Tribune et la Constituante qui sort du bois (31/05/2010)
Quinze jours sans Tribune et sans blogs... Pour cause de tour dans le talon de la botte. Météo perturbée comme ici, mais bains culturels et maritimes réussis. Que retenir de cette ellipse médiatique?
L'UDC suisse vire de bord et soutiendra la levée partielle du secret bancaire pour sauver UBS et peut-être la place financière suisse. Le moteur oppositionnel à deux temps Blocher Levrat a des ratés. Ni les radicaux ni les PDC n'en profiteront cependant. Le tam tam des médias fait davantage son beurre avec les discours carrés de l'opposition qu'avec le discours consensuel des soutiens d'un Conseil fédéral surmené.
Obama est un bouc-émissaire commode dans l'affaire de la plate-forme pétrolière: la chute du président dans les faveurs du publics et des médias est d'autant plus rude que l'espoir mis en lui était déraisonnablement grand. Il en va de même, à notre modeste proportion, de notre Conseil fédéral dont on voudrait qu'il rétablisse la Suisse dans son nirvana d'antan - paradis des riches étrangers et des droits populaires.
Encore plus modestement, notre Constituante, dont on attendait monts et merveilles en matière de gouvernance de notre micro territoire, mais qui n'est au fond que le reflet d'une société genevoise tout à ses égoismes catégoriels, a fait la une des journaux (lire ici et là). Après 18 mois de quasi mutisme pour cause de travaux en commission à huis clos, c'était bien le moment. Mais quelle mouche a donc piqué la droite pour supprimer le droit au logement?
Certes on peut comprendre la logique qui a conduit l'axe Kunz (chef de groupe radical), Genecand (GE-avance et président de la Chambre genevoise immobilière) et Dimier (chef de groupe du MCG dont les quatre membres peuvent à eux seuls faire pencher la balance de la majorité à droite ou à gauche) à resserrer les boulons d'une majorité fort peu disciplinée.
Majoritaires dans la plupart des commissions, les élus de droite avaient en effet opté pour maintenir le droit au logement introduit en 1992 par les Genevois dans le chapitre des droits fondamentaux.
L'y laisser posait au moins deux gros problèmes pour la droite.
- A quoi sert une Constitution dont les articles ne sont pas appliqués, le canton ne connaît-il pas la crise du logement la plus rude de son histoire? Maintenir un article sur le droit au logement pouvait même inciter à violer d'autres droits fondamentaux et transformer peu à peu le Constitution en chiffon de papier.
- Mettre en oeuvre le droit au logement notamment en permettant aux habitants de réclamer sa réalisation devant la Justice est, pour la droite et même pour le centre, gros de deux défauts: il aurait été presqu'impossible de déloger un locataire mauvais payeur en raison de la pénurie et le juge pourrait se substituer au Grand Conseil et obliger le pouvoir exécutif à construire des logements, de quoi créer un mélange des pouvoirs bien pernicieux.
A ces deux arguments, s'ajoute me dit-on, la nécessité dans le cadre de sa fusion avec le parti libéral de recadrer le parti radical* et notamment son aile sociale favorable au droit au logement.
Décision fut donc prise d'expurger les 451 thèses soumises en première lecture à l'examen de la Constituante. Malheureusement la tactique choisie risque de se révéler lourde de conséquences.
En votant l'amendement Dimier, la majorité de droite a bloqué le débat sur 14 thèses proposées par la Commission des droits fondamentaux (dont le droit au logement). Un coup de force aux yeux de la gauche, laquelle, à Genève, fonctionne à l'émotion comme sa soeur française. Elle a donc répondu par un autre coup de force en quittant la salle. Résultat un à un dans le match "déni démocratique". Au passage, ce jeu de coqs est une première dans l'histoire constitutionnelle suisse.
Que va-t-il se passer jeudi?
La gauche ne reviendra pas dans la salle des débats sans concessions. Sans doute les parti(e)s se mettront-ils d'accord pour débattre néanmoins et pour la forme sur les 14 propositions évincées par l'amendement Dimier. Lesquelles seront vraisemblablement toutes refusés.
Reste la question de l'agenda. Pourquoi cette brutale montée de fièvre? La droite ne pouvait-elle pas s'arranger pour débattre de ces questions en juillet ou pendant le Mondial ou reporter les votes qui fâchent à plus tard? Il est vrai que 2011 est une année électorale et qu'il n'est pas trop tôt pour marquer les fronts.
Sans doute me donnera-t-on quelques explications dans les commentaires que j'attends avec intérêt.
* A noter que le parti radical convoque ce mercredi 2 juin 2010, 18h30 au secrétariat général du PRG, boulevard Jaques-Dalcroze 13, une Agora sur le thème "Les droits sociaux : buts généraux ou droits subjectifs ?". Avec notamment le constituant libéral Michel Hottelier, spécialiste des droits fondamentaux, et le constituant socialiste Maurice Gardiol, travailleur social consultant, ancien diacre de l'Eglise Protestante de Genève et président de la Commission des droits fondamentaux.
** Sur le même sujet on lira les blogs de Pascal Holenweg, Pierre Kunz, Boris Calame
17:49 | Lien permanent | Commentaires (2)
Commentaires
Bonjour Mr Mabut. Vous voilà de retour un jour de grande désolation humanitaire et de catastrophe écologique qui perdure! Cela fait plaisir de voir que vos vacances vous ont été profitables. Les blogs poursuivent leur route. Et tous ensemble, nous avançons dans un crépuscule planétaire qui fait peur mais qui donne aussi de l'espoir à toutes celles et tous ceux qui croient à la bonté des êtres humains. Excellente journée à vous.
Écrit par : pachakmac | 01/06/2010
Bon retour Mabut, nous vous imaginions déjà en pénitence sur les traces de Padre Pio demandant à quelque prêcheur en guenille que Dieu sauve le barreau sud. Eh non vous vous preniez les eaux alors que ces les radicaux faisaient la fête sans vous. J'ai l'impression que cette constituante est une mise à l'épreuve personelle destinée à tester votre foi...
Écrit par : Anastase | 03/06/2010