Pie XII saint? (26/12/2009)

ta 24 déc 09.jpgDes millions de dindes, de foies gras, de saumons, de poulardes, de cardon, de rissoles et de champagne plus tard - notez que je n'aime pas trop le champagne, mais c'est le vin de la fête, n'est-ce pas! - revenons aux sujets qui fâchent. La neige n'est bonne qu'au-dessus de 2000 mètres et encore elle est une promesse de linceul blanc pour qui sortirait des pistes. Au-dessous, elle est noire du pétrole et des atomes qui actionnent les canons à neige. Heureusement il y a un peu de soleil en vue.

L'autre sujet qui fâche en ce temps de Noël, c'est B XVI et son idée fixe -saugrenue ou scandaleuse, c'est selon - de sanctifier P XII. J'admire toujours cette capacité qu'ont les papes d'actionner la pompe à articles. Plus fort que Sarkozy ou qu'Obama réunis! Pas un média hier dans le désert de nouvelles qu'est le 25 Décembre qui n'a affiché sur son site l'image du patron du Vatican et relayé son credo du jour: l'accueil des immigrés.

L'Eglise protestante ou réformée qui nous a bassiné avec Calvin toute l'année est toujours à des années lumière dans cette capacité de mobiliser les caméras. En tout cas de ce côté ci de l'Atlantique. Aux Amériques, leurs ouailles multiples et diverses savent depuis belle lurette clamer la Bonne Parole sur les ondes.

Benoît XVI veut donc sanctifier Pie XII: parce qu'il fut pieux et que ses silences politiques durant la guerre sont ennuyeux, sans doute une faute, mais présentez-moi un saint qui n'aurait pas péché!  Faire de Pie XII un exemple de vertu est une offense aux massacres des innocents, pardon à la Shoah, explique-t-on. Le sujet est délicat, car il concerne le Peuple de Jésus. Autant dire la moitié de ce qui forge notre vision du monde de ce côté-ci de la terre. L'autre moitié trouvant ses racines dans l'humanisme lentement forgé au fil des siècles.

A ce propos deux notations en passant.

La une du Tages Anzeiger de ce long week-end de Noël publie un texte de Michael Meier qui s'intitule "Die christliche Leitkultur gibt es nicht" illustré du dessin reproduit ci-dessus [cliquer sur la vignette pour l'agrandir].

Dans la veine de La Suisse n'existe pas, l'auteur dénonce le projet du Parti évangélique d'ancrer le principe de la culture chrétienne dans la Constitution suisse via une initiative populaire. Le Parti évangélique cite comme valeur cardinale de la tradition chrétien la liberté: Ce qui fait sauter l'auteur sur sa chaise. Michael Meiler n'a pas de peine à rappeler que s'il y a bien une valeur qui furent déniée par les églises: c'est bien celle de la liberté et de l'émancipation de l'humain.

Quant à l'amour, qui est plutôt le commandement premier des Evangiles, il aurait dû inciter les Suisses à voter contre l'initiative anti-minaret et pour l'interdiction de l'exportation des armes. Mieux vaut conclut le journaliste laisser la culture chrétienne en dehors de la politique. Et de rappeler ce mot de Peter Bichsel: Etre chrétien est bien plus difficile que d'être suisse.

La seconde notation porte sur le film diffusé hier soir sur France 2 relatant le règne de Louis XV, le soleil noir: un long règne de soixante ans dont on a retenu que le style des chaises. Un règne raté qui conduit directement à la Révolution, parce que ce roi dépressif et dévergondé ne sut entendre les voix des Lumières si vives en son temps. Des Lumières qui se turent cependant à propos de l'horrible supplice qu'on fit subir en place de grève à Damiens qui crut pouvoir alerter son roi des souffrances de ses sujets en l'égratignant à peine de sa lame. Déjà à l'époque il y avait des causes pour lesquelles les intellectuels s'enflamaient et d'autres qui les tenaient cois ou indifférents.

Même la beauté espiègle de la Pompadour ne réussit pas à sortir Louis du carcan de Versailles. Mais peut-être fallait-il cette résistance, cet autisme au temps moderne pour que la Révolution ait lieu et que la France invente la laïcité.

Les voies de Dieu sont impénétrables.

 

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