Pourquoi diable Genève ne veut pas enseigner le fait religieux? (05/04/2009)

P4040024.JPGParce que "Genève est une République laïque, a répété hier Charles Beer à Uni Dufour, ce qui n'est pas le cas du canton de Vaud, a poursuivi le chef du DIP, ou des autres cantons suisses." Ce qui n'a pas empêché Nicole Durisch Gauthier, ancienne directrice du Centre d'information sur les croyances, de déclarer sa flamme pour un cours obligatoire au Cycle et au post-obligatoire d’histoire des religions dispensé par des enseignants formés à l’Université.

Le chef du Départemenmt s'inscrit lui dans la vieille logique anticléricale qui fonde encore à Genève, 102 ans après la séparation des Eglise et de l'Etat, les rapports entre les religions et l'enseignement public.

A l'heure où le créationnisme atteint l'Europe et où la tradition judéo-chrétienne se révélera sans doute un allié  objectif de la raison, l'école genevoise fait figure de sanctuaire, de cocon républicain dans une société traversée par les violences communautaristes, claniques ou sectaires médiatisées, l'engouement pour l'ésotérisme, l'astrologie et les thérapeutiques qui se donnent des airs de sciences. Sans parler des addictions de toutes sortes. Au point que les nouvelles générations de profs genevois, elles mêmes souvent dépourvues de toute culture religieuse, en viennent à réclamer des aides pédagogiques et même à les inventer, lorsque les questions de la vie et de la mort déboulent dans les classes.

C'est ainsi que dix ans après avoir été interpellé, l'Etat de Genève a apporté "une réponse prudente mais consensuelle", selon les termes de Charles Beer, en proposant dès 2004-2005 aux profs intéressés une formation complémentaire facultative en matière d'histoire des religions et en autorisant dès 2006 à en parler en classe.

Les cours de formation continue des profs rencontrent un véritable succès, mais l'enseignement des élèves n'est nullement le même pour tous. Car, à Genève, les profs restent seuls maîtres (avant Dieu) de l'enseignement qu'ils dispensent.

P4040012.JPGHier matin, à la veille du jour des Rameaux, qui marque la  montée de Jésus à Jérusalem, sa condamnation à mort pour blasphème envers l'empereur romain - un occupant joliment instrumentalisé par les Docteurs de la loi - et sa résurrection au lendemain de la Pâque juive, quelque 400 personnes qui avaient répondu à l'invitation conjointe du DIP et du Groupe citoyen www.ecolelaique-religions.org ont pu éprouver ce paradoxe: le paradoxe, d'une part, d'un Etat de Genève qui ne sait trop comment inculquer les Droits de l'homme, qui est confronté chaque jour davantage, selon l'aveu de Charles Beer, à des tâches de simple éducation, de guidance infantile, alors que l'école peine à assumer sa reponsabilité principale de transmission des savoirs et, d'autre part, d'un appel de croyants qui pensent qu'un meilleur enracinement culturel, la connaissance des faits religieux est de nature, sans être la panacée, à favoriser le mieux vivre ensemble.

Dans le cours du débat dirigé par Isabelle Moncada, deux jeunes enseignants du Cycle du Foron sont venus présenter les fiches d'information qu'ils ont réalisées avec sept de leurs collègues profs d'histoire pour répondre aux questions des élèves. Avec le soutien de leur direction ont-ils affirmé et, jusqu'à présent, sans problème avec les parents. Trois fiches apparaissent dans la pénombre du grand amphi Jean Piaget: fêtes et contes, Pessah, pourquoi est-on en vacances à Pâques? L’Iliade, les croyances des Grecs. Le rituel du sacrifice.

P4040021.JPGDans le public, une enseignante fait part du désarroi des profs lorsque les questions des élèves surgissent. C'est le cas, témoigne-t-elle, lorsque des élèves de confession musulmane respectent le jeûne du Ramadan et demandent un jour de congé pour fêter la fête de la rupture du Jeûne. Et que d'autres élèves l'interpellent: "Dites, Madame, c'est quoi le Ramadan chez nous?"

En 7e, poursuit-elle, nous abordons les récits sur les origines du monde. Dans la brochure, il y a un récit sur le déluge selon la culture perse. Si j’avais parlé de Noé, j’aurais sans doute eu des critiques des parents.

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