Les voeux du président sortant (17/12/2008)
Laurent Moutinot m'adresse ses voeux les plus chaleureux pour la nouvelle année. Dirais-je que j'en suis flatté: aussitôt l'on pérorera sur les relations incestueuses que le pouvoir et les journalistes politiques entretiennent. Surtout dans cette si petite République, où les journalistes terminent parfois leur carrière au sein d'une direction de la communication. L'avenir plus qu'incertain des quotidiens n'incite guère à dire "Fontaine je ne boirai pas de ton eau".
Au revers de la photo - la même pour tous les conseillers d'Etat -, le texte choisi par le président sortant du Conseil d'Etat retient mon attention. Il me faut le lire deux fois pour apprécier l'amère ironie du chef des Institutions dont le département est privé de son intitulé "Justice et police et transports" jusque là consacré, en raions d'un savant autant que surprenant et vraisemblablement éphémère redécoupage des portefeuilles ministériels.
Si je veulx dancer, saulter, mener joyeuse vie, que az affaire la justice: rien!
Etrange déclaration, n'est-il pas? Elle est signée d'un mystérieux Jacques Gruet (et ici).
En plus petits caractères, Laurent Moutinot nous en donne la clé.
"2009 est l'année du 500e anniversaire de la naissance de Jean Calvin.
S'il est indispensable de se souvenir de l'apport majeur du grand Réformateur à Genève,
il convient aussi de rendre hommage aux victimes de sa rigueur.
C'est la raison pour laquelle j'ai choisi cette citation de Jacques Gruet, décapité en 1547 pour athéisme, blasphème et libertinage."
Coïncidence qui n'en est pas une, le même jour, je reçois la Vie protestante de Noël. Le journal consacre sa une et son dossier à la honte de notre société libérale avancée: Champ-Dollon surpeuplée.
"Désabusé, Laurent Moutinot ne cache même plus son impuissance, écrit Aline Bachofner rédactrice en chef du mensuel. C'est sans conviction qu'il annonce que "Curabilis", un établissement pour détenus souffrant de troubles de la personnalité, dans trois ans peut-être, pourra soulager la prison "modèle" de la République." Laurent Moutinot est responsable de la prison, mais il n'est pas coupable de sa surpopulation. Personne n'est coupable explique même le dossier de la VP. Ni le procureur général qui applique la loi, ni les députés qui votent les budgets, ni le peuple.
"A force de tolérer l'inacceptable, le "scandaleux" ne devient que préoccupant et l' "exceptionnel", banal," conclut Aline Bachofner.
Personne ne songe plus bien sûr à rétablir la peine capitale pour désengorger les prisons. Mais peut-être qu'imposer aux cent députés et à quelques citoyens tirés au sort - on tire bien au sort les jurés - un stage de gardien de prison durant les dix jours des féries de Noël changerait le ton et le sens du débat budgétaire.
21:02 | Lien permanent | Commentaires (2)
Commentaires
3 x hélas, VP a raison, sans parler du fait qu'il n'y a pas seulement la dignité humaine en jeu, mais il s'agit également d'une mise en péril de l'ordre et de la sécurité publics. La classe politique genevoise est ainsi: elle se dispute les mérites, mais refute toute responsabilité en cas d'échec. Puisque les élections n'y changent généralement rien, place donc à la société civile (lobbys, ONG etc.) pour faire bouger les choses. Imaginez un instant 2009: un gouvernement préoccupé par son élection, tandis que la tempête économique et bientôt sociale fait fureur. Les années récentes ont gommé - un tant soi peu - l'incompétence du monde politique. Dorénavant, elle va nous éclater en pleine gueule.
Écrit par : Dixit | 18/12/2008
Incroyable : j'ai reçu la même carte d'un Conseiller d'Etat! La même photo mais avec une maxime différente! Mark Muller souhaite "que la sérénité du temps des fêtes soit un heureux prélude à l'année nouvelle." Souhaitons-lui donc que cette année électorale se présente sous les meilleurs auspices! Amputé d'une part importante à son département, il est au moins honnête et mérite d'être réélu. Quand on voit la gabegie de certains de ses collègues...
Écrit par : Micheline Pace | 18/12/2008