Un triste débat digne d'une élection municipale (11/10/2007)

 

"Nos sondages ne sont pas scientifiques. Et on peut les manipuler..." Il est près de 23 heures hier soir. Romaine Jean tente maladroitement de redresser une émission ubuesque. Le dernier des six mini-débats qui ont rythmé le grand débat électoral sur la TSR portait sur la question (scandaleuse en soi): Faut-il interdire les minarets en Suisse? Plus populiste, tu meurs! Résultat du sondage par SMS: 68% des téléspectateurs votent oui. Applaudissements de Freysinger et cris d'orfraie de ses malheureux contradicteurs, réduits au rang de faire valoir d'une émission de télé-achat, et d'une flopée de candidats à l'Assemblée fédérale, réduits au rôle de spectateurs potiches et applaudissant.

 

Télé-achat ou télé à l'italienne. Mais la TSR n'a pas (encore) oser assumer jusqu'au bout les règles du jeu du cirque cathodique: offrir des speakers et des speakerines glamours et entrelarder les séquences de concours et de spots publicitaires. Deux-heures trente durant, la première chaîne romande a servi hier soir une soupe écœurante, un bien triste spectacle. Heureusement, une grosse majorité des téléspectateurs ont préféré les séries américaines ou la xème rediffusion du Casse sur TSR2 ou carrément se priver de télé. Un rapide sondage dans la rédaction révèle qu'ici personne n'était devant le petit écran. (Mais les journalistes ne sont pas représentatifs de la population.)

 

 

Organiser un débat politique à la tv relève du casse-tête. L'idée de réaliser six mini-débats de 20 minutes n'était pourtant pas mauvaise. Elle a donné du rythme à l'émission. Celle d'introduire chaque question par une scénette sur le mode de la télé-achat aurait pu se révéler séduisante si les acteurs avaient été excellents. Mais la télé-achat est par définition une télé bon marché. Il fallait donc s'entendre au pire.

 

Pas mauvaise non plus l'idée de demander leur sentiment à des témoins extraits de la "société civile" à l'issue de chaque séquence. Mais le choix des trois témoins a achevé de donner un tour caricatural à l'émission. L'entrepreneuse bernoise n'avait rien à dire (merci pour les femmes), le jeune de service s'est opportunément et habilement réfugié dans la dérision. Seul l'avocat Marc Bonnant s'est tiré de se guêpier à son avantage et sans trop forcer son talent oratoire qui est grand. En distillant dans des plaidoiries distanciées, à la limite de la suffisance et de la vacherie, une pensée somme toute bien droitière.

 

En revanche, hautement risquée était la décision de sonder les téléspectateurs par SMS. Les questions choisies forcément simples pour ne pas dire simplistes ont favorisé la dérive populiste et rabaissé le débat au niveau d'une séance de conseil municipal ou de café du commerce.

 

Tout aussi risquée fut le choix de retenir des thèmes "choisis" par les téléspectateurs (où sont les journalistes?). Salaire des managers, augmentation du nombre de crèches, congé paternité, interdiction des voitures polluantes, interdiction des minarets. Le ton était donné et l'UDC avait gagné.

 

Jusqu'au propos surréaliste d'André Baud qui introduit le résultat du sondage sur les minarets par cette phrase: "On reproche souvent à la TSR d'être éloignée du peuple". Voilà le résultat. L'état zéro de la politique.

 

 

 

 

08:19 | Lien permanent | Commentaires (4)